Les salles blanches – des espaces peu chargés en particules et contrôlés – sont cruciales pour la fabrication de puces informatiques, de médicaments, de technologies spatiales et même de cosmétiques. Les entreprises de construction qui installent ces espaces croissent avec le marché. Trois entreprises du Benelux appliquent chacune un modèle différent.
Le marché des salles blanches croît avec l’industrie de haute technologie. À partir de 2026, les pharmacies hospitalières devront, par exemple, disposer d’un tel espace, ce qui provoque une forte augmentation de la demande. “Une salle blanche est un espace contrôlé, peu chargé en particules, explique Nadia Jansen, CEO de Group Jansen. En créant une surpression ou une dépression dans un espace, nous empêchons les particules de poussière d’y pénétrer. Le nombre de particules par mètre cube diminue ainsi de manière drastique. Cela est nécessaire pour certains processus high-tech.”
Cela est également requis pour la production de puces informatiques, car des structures très petites sont appliquées dans ce domaine. Si une particule de poussière tombe dessus pendant la production, cela peut perturber tout le processus. “La réglementation devient de plus en plus stricte, précise Nadia Jansen. Autrefois, il y avait surtout des salles blanches dans l’industrie pharmaceutique et dans les pharmacies hospitalières pour la production de médicaments. Là où un environnement aussi propre que possible est primordial pour ne courir aucun risque de contamination ou de pollution. Entre-temps, le champ d’application s’est considérablement élargi. Tout ce qui touche à la nanotechnologie a besoin de salles blanches, mais aussi les cosmétiques, l’aéronautique et parfois même l’alimentation. Tout devient plus stérile et plus propre. Cela fait croître notre secteur.”
Group Jansen construit des salles blanches depuis 25 ans. L’entreprise sous-traite le moins possible. “Il est très important que l’espace fonctionne parfaitement, souligne la CEO. Si vous ne pouvez pas produire pendant un jour parce que la salle blanche est défaillante, cela a de sérieuses conséquences financières pour nos clients et les personnes qui dépendent d’eux, comme les patients. En réalisant tout en interne, nous pouvons contrôler l’ensemble du projet. Nous avons nos propres ingénieurs, chefs de projet, techniciens, ingénieurs du bâtiment et personnel d’entretien, poursuit notre interlocutrice. Nous fabriquons aussi des produits pour les salles blanches, comme du mobilier pour laboratoires et des portes spécialisées.”
Le chiffre d’affaires de Jansen Cleanrooms & Labs tourne autour de 60 millions d’euros. L’équipe compte environ 75 personnes qui se concentrent sur les salles blanches, tandis que 85 autres travaillent avec les laboratoires. La société mère, Group Jansen, regroupe 14 entreprises dans divers secteurs, avec au total 757 employés, qui génèrent un chiffre d’affaires de 250 millions d’euros.
Espaces modulaires
ABN Cleanroom Technology, tout comme Group Jansen, est une entreprise limbourgeoise, mais qui opte pour une autre stratégie. Pas d’intégration verticale ici, mais une construction modulaire. “Nous nous concentrons sur la conception et l’ingénierie de la salle blanche. La construction est réalisée par des sous-traitants, qui travaillent avec des technologies que nous avons développées”, explique Jo Nelissen. Il est, avec Rosaline Wijnen, le co-CEO et cofondateur d’ABN Cleanroom Technology. “Nous assurons aussi la gestion du cycle de vie de la salle blanche. Nous accompagnons le client jusqu’à la déconstruction. C’est une sorte de cleanroom-as-a-service.”
Cette approche a vu le jour car ABN a développé un logiciel pour mieux gérer ses salles blanches.”Une salle blanche doit pouvoir fonctionner en continu, pointe Jo Nelissen. C’est pourquoi nous avons développé un système logiciel pour surveiller nos salles blanches et prédire les mécanismes de défaillance éventuels. Nous savons donc parfaitement dans quel état se trouve la salle blanche et comment nous pouvons intervenir.”
Pendant la construction, l’entreprise travaille de manière modulaire. “Nous ne concevons pas des salles blanches, nous les configurons sur notre plateforme de produits, précise Jo Nelissen. C’est comme assembler des blocs Lego dans une conception. Cela rend tout beaucoup plus rapide et adapté à la croissance.”
ABN détient les brevets de cette technologie. “La construction est ensuite en grande partie assurée par des sous-traitants, poursuit le co-CEO. Il s’agit d’un réseau étroit de partenaires. Nous les intégrons dans la standardisation. Nous avons 65 blocs de construction. Nos sous-traitants construisent toujours la même chose. Ainsi, nous pouvons maintenir la qualité.” Le réseau de sous-traitants est réparti dans toute l’Europe. ABN emploie directement une quarantaine de personnes et réalise un chiffre d’affaires de 23 millions d’euros. “Mais au quotidien, environ 120 personnes travaillent pour nous”, ajoute Jo Nelissen.
Un marché important pour les salles blanches se trouve juste de l’autre côté de la frontière, aux Pays-Bas, dans la région autour d’Eindhoven. On y trouve de grandes entreprises de semi-conducteurs comme ASML et NXP, qui ont besoin de salles blanches et s’attendent aussi à ce que leurs fournisseurs en soient équipés. De cet écosystème est née l’entreprise néerlandaise ProCleanroom. Elle aussi voit le marché croître. Le modèle de ProCleanroom, avec un chiffre d’affaires de 8 millions d’euros, est axé sur le sur-mesure. “D’autres entreprises poussent souvent un seul concept, explique Mike Ferguson, directeur des opérations de ProCleanroom. Nous examinons les préférences de nos clients et concevons une solution sur-mesure.”
Expansion
Les trois entreprises observent une consolidation du marché. Group Jansen a racheté en 2023 l’aménageur de laboratoires Vinitex. “Nous voulons encore nous étendre sur ce marché en croissance, indique Nadia Jansen. Nous essayons également d’élargir le marché de nos produits.” Pour ce faire, Group Jansen lorgne depuis un moment vers le Moyen-Orient, où la demande en salles blanches est forte, et elle a récemment annoncé qu’elle allait collaborer dans cette région avec l’entreprise familiale turque Altinbölme.
ABN aussi s’agrandit. L’an dernier, elle a racheté son sous-traitant Poels et procède également à une internationalisation. “Nous visons maintenant l’Europe, déclare Rosaline Wijnen d’ABN. Mais nous devons encore étudier beaucoup de choses. Dans chaque nouveau pays, les règles sont un peu différentes et nous devons coopérer avec de nouveaux partenaires.”
Trois nouvelles salles blanches en préparation en Belgique
• Imec construit à Louvain une salle blanche de 4.000 m², qui fait partie de la ligne pilote nano-IC. Dans ce projet, Imec recherche des méthodes de production pour de nouvelles générations de puces. Le centre de recherche a reçu pour cela 2,5 milliards d’euros, notamment de la Commission européenne.
• Aerospacelab construit à Charleroi une grande usine, où elle souhaite produire des satellites en série. Cette usine devrait également accueillir 4.000 m² de salles blanches, cruciales pour l’assemblage des satellites.
• Les hôpitaux anversois GZA et ZNA construisent à Kontich une nouvelle pharmacie hospitalière centrale, dans laquelle une salle blanche sera installée. Environ 100.000 préparations devraient y être réalisées chaque année.
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