Boeing: les licenciements en masse se concrétisent et la faillite est envisagée par un ténor de l’aviation
Les licenciements de milliers de travailleurs, annoncés par Boeing, vont commencer en novembre. Les livraisons du nouveau modèle, 777X, sont à nouveau reportées. Le président d’Emirates commence à envisager une réorganisation judicaire “se profiler à l’horizon”.
Les déboires continuent pour Boeing. Dans une année marquée par des incidents sur des avions, un ralentissement forcé de la production et une grève historique, ce sont maintenant des licenciements qui sont à l’ordre du jour. Samedi, le constructeur a annoncé vouloir réduire ses effectifs de 10%, soit 17.000 personnes environ. C’est notamment la division des avions commerciaux qui est concernée.
Ces licenciements se concrétisent ce mardi : des milliers de personnes vont recevoir leur préavis de départ (de 60 jours) le 15 novembre. C’est ce que rapporte Reuters, citant le syndicat Society of Professional Engineering Employees in Aerospace, qui dit avoir été informé ce lundi par la direction.
Une deuxième vague d’envoi de préavis pourrait avoir lieu à la mi-décembre, si nécessaire, ajoute une autre source proche du dossier. Les travailleurs encartés chez IAM et actuellement en grève ne seraient pour l’heure pas concernés par les licenciements, laisse entendre Boeing.
Autres détails sur les départs : il n’y aura pas de programme de départs volontaires, selon des sources. Le constructeur veut éviter de devoir payer plus d’indemnités et éviter une fuite des talents. Dans un contexte de pénurie, ceux-ci pourraient être tentés d’aller voir chez un concurrent (ce qui pourrait encore davantage retarder la production), avec un bonus à la clé, alors que leur domaine n’est pas forcément visé par les mesures d’économies. Il y aura donc uniquement des licenciements forcés.
Faillite en vue ?
Dans ce contexte de production limitée, de grèves et de licenciements, Boeing a annoncé que les livraisons du nouveau modèle, le 777X, seraient reportées à 2026. Un énième report pour un avion qui devait de base commencer à être livré dès… 2020. La nouvelle a évidemment fortement déplu aux clients. Emirates, qui en a commandé 150, se rebiffe ce lundi, via son président Tim Clark : “Nous aurons une conversation sérieuse avec eux au cours des prochains mois. Je ne vois pas comment Boeing peut faire des prévisions sérieuses sur les dates de livraison.”
Dans les pages du média spécialisé Air Current, l’homme fort d’un des principaux clients de Boeing va même plus loin et pose la question de la viabilité du groupe, disant tout haut ce que d’autres observateurs pensent tout bas. “À moins que la société ne soit en mesure de lever des fonds par le biais d’une émission de droits, je vois une dégradation imminente de la note de crédit avec une procédure de Chaptre 11 qui se profile à l’horizon”, continue Tim Clark. Ce “Chapitre 11” est une loi américaine sur la protection judiciaire en cas de faillite d’une entreprise. Et la note de crédit pourrait en effet être dégradée, l’agence S&P ayant déjà averti qu’il y a des risques qu’elle revoit sa copie. La note actuelle dit que Boeing est “investissable”.
Bref, ce nouveau report risque de mettre de l’eau dans le gaz entre Boeing et ses clients. D’un côté, Boeing doit lever des fonds mais de l’autre, les clients ne sont pas rassurés pour passer commande, avec ces risques financiers. D’autant plus que ces commandes demandent des acomptes. Selon Reuters, certaines compagnies aériennes se posent d’ailleurs des questions sur cet argent déjà déposé auprès de Boeing et se demandent comment ils peuvent réduire les risques.
Mais Boeing pourrait bientôt lever des fonds, jusqu’à 15 milliards de dollars, via une nouvelle émission d’actions, selon des analystes du secteur. La bourse n’est cependant pas clémente avec Boeing cette année : le titre a perdu 40% depuis début janvier.
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