L’Allemagne est actuellement le punching-ball favori de tout le monde. Alors que ce sont précisément les Allemands qui ont payé seuls la facture de la réunification allemande, qui financent les déficits commerciaux européens et les opérations de sauvetage.
L’Allemagne est actuellement le punching-ball favori de tout le monde. On lui reproche de pratiquer un dumping salarial, de se montrer asociale à l’égard de la Grèce, de tourner le dos à la pensée européenne, de ne pas assez consommer et de ne pas assez s’endetter. Alors que ce sont précisément les Allemands qui ont payé seuls la facture de la réunification allemande, qui financent les déficits commerciaux européens et les opérations de sauvetage.
Porter l’âge de la pension à 67 ans, chercher à atteindre un équilibre budgétaire et remplacer l’indexation automatique des salaires par des adaptations négociées. Ce sont là, me semble-t-il, trois mesures indispensables pour assurer la stabilité économique future. Mais hélas, ces propositions venaient de l’Allemagne, pire encore, d’Angela Merkel, et elles ont donc fait l’objet d’une violente opposition. La plupart des critiques portaient sur la forme : il n’y avait pas eu assez de consultation.
Peut-être un retour en arrière aidera-t-il à mieux comprendre pourquoi l’Allemagne (et la France) veut pousser ces mesures sans d’interminables négociations. La cause remonte au 9 mai 2010. A cette époque non plus, on n’a pas écouté l’Allemagne. Le pays a été mis au pied du mur. Depuis lors, le Traité de Maastricht n’est plus qu’un vulgaire chiffon de papier et la BCE n’est plus une institution apolitique. La semaine dernière, le patron de la Bundesbank (la Banque centrale allemande) Axel Weber a retiré sa candidature à la présidence de la BCE. C’est un signal très important qui illustre la frustration allemande concernant la politique menée.
Ce que les Allemands craignaient, est devenu réalité en mai 2010. L’euro a été bâti sur la stabilité et la crédibilité du mark allemand. L’Allemagne était l’ancrage. Tous les pays qui voulaient accéder à l’euro, ont promis de respecter les principes que cette adhésion impliquait. Mais une fois admis, ils ont été immergés dans les avantages de l’euro et surtout le dopage offert par un taux d’intérêt peu élevé. Au lieu d’utiliser ce bonus lié au taux d’intérêt pour réaliser des économies afin de faire face au vieillissement de la population, la plupart des gouvernements l’ont gaspillé tandis que le taux d’intérêt bas a alimenté une bulle dans des pays qui étaient habitués à vivre avec un taux d’intérêt élevé.
Des accusations absurdes
On reproche aujourd’hui à l’Allemagne d’être trop concurrentielle, voire même de pratiquer un dumping salarial. C’est largement exagéré. Les emplois à bas salaires créés outre-Rhin, existent dans les autres pays mais… dans le circuit noir. Le niveau moyen des salaires allemands est encore toujours celui d’un pays prospère, ce n’est pas une économie de dumping.
On reproche aussi à l’Allemagne d’avoir un excédent commercial au détriment de tous les autres pays de la zone euro. C’est absurde car l’excédent allemand est surtout réalisé par des exportations vers des pays en dehors de la zone euro. La campagne anti-Allemagne est symptomatique de la lutte entre les pays “cigales” et les pays “fourmis”. Le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, vient d’un pays cigale. Il s’efforce à présent de résoudre les problèmes qu’il a laissé naître au Portugal, avec l’aide et le financement de l’UE. L’Allemagne n’a pour l’instant aucune aide sur le plan UE et c’est pourquoi elle a recherché une entente typique entre grands pays.
Si l’Europe occidentale n’aime pas l’Allemagne, l’Allemagne pourra aussi adopter une autre attitude. Il n’est pas impensable qu’elle place la barre de plus en plus haut pour elle-même mais aussi pour les pays avec lesquels elle veut bien former une union monétaire. L’Allemagne est confrontée à des défis importants tels qu’une population qui se contracte et la concurrence incessante des pays à bas salaires. L’Europe devra témoigner d’un plus grand respect pour le système économique allemand ou bien l’Allemagne prendra, tout comme le Royaume-Uni, ses distances par rapport au projet européen.
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