Restructuration d’AXA: “de nombreuses autres personnes vont perdre leur job”

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AXA a annoncé ce lundi la suppression dans les deux ans de 650 emplois à temps plein. Pour l’économiste Koen Schoors de l’UGent interviewé dans De Morgen, cette restructuration annonce d’autres vagues de licenciements dans le secteur des assurances. En cause: “les taux bas qui commencent sérieusement à faire mal”, prévient-il.

En cette rentrée, les nouvelles sur le front de l’emploi sont dramatiques. En à peine une semaine, deux gros employeurs du pays ont fait la une: Caterpillar qui ferme tout simplement son site de Gosselies laissant sur le carreau pas moins de 2200 travailleurs (sans compter les nombreux sous-traitants); Et ce lundi, le bancassureur AXA qui annonce la suppression de 650 temps plein (sur 4300) dans les deux ans à venir.

Avec cette restructuration à grande échelle, AXA avance vouloir miser avant tout sur la digitalisation de l’entreprise en y injectant 200 millions d’euros ces prochaines années. Pourquoi en effet payer du personnel alors qu’une opération gratuite via un smartphone est possible ? Le personnel qui gardera son poste devra, en outre, faire des efforts en termes de masse salariale. Négociations houleuses en vue.

L’annonce faite par AXA en de début de semaine n’est toutefois pas une grande surprise. La société est déjà depuis un moment sous pression. AXA propose en effet des assurances-vie qui promettent sur le long terme une rente minimum garantie. Seulement, le bancassureur ne peut plus tenir ses promesses de rentabilité à ses clients à cause du taux actuel beaucoup plus bas en vigueur sur le marché financier.

Le “vieux “compte Crest20 révisé

Son “vieux” compte Crest20 lancé fin des années 1980 et qui promettait un rendement de 4,75 % sur toutes les primes versées, vient d’ailleurs d’être révisé. Comment en effet procurer aux clients un taux de 3 ou de 4 % alors qu’aujourd’hui un placement dans un emprunt d’Etat sur 10 ans ne rapporte que 0,15 % ? Axa a donc employé les grands moyens : en se basant sur une loi de mars 2016, la filiale belge d’AXA a supprimé la garantie de rendement à vie qui caractérisait sa vieille police. Il offre aux 27.000 clients qui ont souscrit à un compte Crest 20 avant le 31 janvier 2002 de racheter leur contrat avec une prime de sortie de 25 % au minimum.

Même scénario chez Ethias, avec son compte First A, qui a proposé dès 2014 aux 53.000 détenteurs d’un compte First de première génération (souscrit avant 2003) de clore leur compte et de recevoir une prime de 14 %. Ces deux cas préludent de la fin programmée des assurances à taux garanti à vie. C’est certain, on ne reverra pas de sitôt ce type de produits qui garantissait à vie le rendement des primes versées, même dans le futur. Depuis 1993, la loi interdit en effet aux assureurs de garantir un taux sur les primes qui seront versées dans le futur.

=> Lire aussi : ETHIAS et AXA veulent se libérer du boulet de leurs anciens contrats

Le problème est simple: les assureurs récoltent moins de bénéfices de leurs activités, et ne peuvent plus honorer leurs promesses sur le long terme”, explique Koen Schoors, économiste à l’Université de Gand. “On ressent actuellement l’effet collatéral de la politique monétaire menée en Europe. Afin de contrer l’inflation, les taux sont tirés vers le bas afin que les banques puissent avoir un peu d’oxygène. Mais après 5 ans, ces taux bas commencent à faire sérieusement mal.

AXA, le premier domino?

Selon Schoors, des pertes d’emplois sont encore prévisibles dans les mois à venir. ” Toutes les sociétés d’assurance sont sous haute pression. Si les taux n’augmentent pas, elles doivent remonter leurs primes ou épargner des frais. Vraisemblablement, de nombreuses autres personnes vont perdre leur job.

De par le monde, ces taux bas inquiètent depuis un moment déjà car ils représentent un réel danger pour la stabilité des assureurs. Des institutions comme le FMI et la Banque Mondiale ont déjà prévenu des risques que prennent les banques dans leur quête de toujours plus de rendements. Selon le rapport ‘Global Financial Stability Report’ du FMI, qui a analysé les risques financiers à travers le monde entier, les assureurs représentent un danger sérieux pour la stabilité économique.

AXA serait-il alors le premier domino de cette dégringolade? Hans Degryse, professeur en finances à la KULeuven évoque plutôt dans De Morgenune accélération rapide dans un processus graduel”. “Le nombre de banque et de bureaux d’assurance diminue depuis un petit temps. Les risques sont grands que d’autres assureurs suivent l’exemple d’AXA. Mais que cela se passe de façon visible et structurelle est difficilement prévisible.”

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