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‘Voici la véritable richesse qui manque à l’Arabie saoudite pour se moderniser’

Les Saoudiens changent leur modèle économique. En tout cas, c’est ce que le fils du roi actuel veut faire comprendre au monde entier via son plan intitulé sobrement ‘Vision 2030’.

En clair, grâce à ce plan, l’Arabie saoudite veut d’ici 2030 ne plus dépendre comme c’est le cas aujourd’hui du pétrole à 85 ou 90%. Le fils du roi actuel n’a que 31 ans, mais il s’impose comme l’homme fort du régime, et comme n’importe quel jeune homme, il est pressé de changer. Les habitants du royaume l’ont d’ailleurs déjà remarqué dans leurs factures de carburant ou d’électricité. La hausse soudaine a été très forte. Mais les habitants ne se sont pas révoltés: les prix du carburant et de l’électricité sont tellement bas que même en les triplant, ils restent à des niveaux anormalement bas.

Le drame de l’Arabie saoudite, c’est que les citoyens y sont subsidiés pour tout

En fait, c’est le drame de ce pays, les citoyens sont subsidiés pour tout. En réalité, ils ne paient pas le vrai prix des services dont ils disposent. Et c’est évidemment une manière d’acheter la paix sociale.

Mais aujourd’hui, le prix du pétrole est tellement bas, que même l’Arabie saoudite a dû emprunter pour boucler son budget. En fait, ces hausses des prix du carburant et de l’électricité, c’est surtout un symbole, un signal puissant qui vise à démontrer que le nouveau prince héritier, qui n’est d’ailleurs que deuxième dans l’ordre de succession, veut vraiment imprimer sa marque. D’où ce plan ‘Vision 2030’ dans lequel il y a des bonnes choses, comme privatiser une partie de ARAMCO, la plus grande société d’exploitation pétrolière du monde. Mais il y a aussi du bluff, notamment quand ce plan vise à faire de l’Arabie saoudite la 15e économie de la planète d’ici 20 ans. C’est du bluff, ou au minimum de l’autohypnose, car si l’Arabie saoudite a bien les moyens financiers de son plan ‘Vision 2030’, elle n’a pas les citoyens capables de le faire. Il suffit d’y aller pour se rendre compte que la majorité des emplois privés – 86 % – sont occupés par des étrangers, que les postes administratifs le sont par des Saoudiens de souche, et le reste, les emplois subalternes, le sont par des immigrés payés avec des salaires parmi les plus faibles au monde…

Dans aucun autre pays, les citoyens accepteraient de se voir confier uniquement les postes de fonctionnaire en laissant le privé aux mains des étrangers. Mais l’Arabie saoudite a réussi cet exploit en payant des salaires publics 2 à 4 fois plus élevés que ceux du privé. C’est Marc Goblet qui serait content.

C’est donc bien beau de dire qu’on va mettre de l’argent pour moderniser l’Arabie saoudite, mais il n’y a de véritables richesses qu’à travers les hommes. Or, non seulement la population n’a pas les compétences pour remplacer les expatriés présents dans le royaume, mais en plus, à force d’être cocoonés, les Saoudiens ne déploient plus beaucoup d’ardeur au travail. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si l’un des fléaux de ce pays, c’est l’obésité qui frappe une bonne partie de sa population: le chiffre de 30% circule, à comparer avec un taux de 15% ici en Europe. En 2013, le roi d’Arabie saoudite a dû affréter un avion spécial pour faire soigner l’un de ses concitoyens qui avait atteint le poids extraordinaire de 610 kilos !

Je pense qu’il faudra plus qu’un avion spécial pour modifier un pays en proie à une mauvaise gouvernance économique depuis plusieurs décennies… mais chapeau quand même à ce prince qui y croit.

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