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‘Tout fout le camp’ ou ‘tout ira bien’ ?

Souvent lorsqu’on parle d’économie, on a l’impression qu’il y a deux camps qui s’affrontent. Ceux qui disent que ‘tout fout le camp’, que nos enfants vivront moins bien, et puis les autres, minoritaires, ceux qui croient en l’avenir, les indécrottables optimistes…

Ce dialogue, quasi quotidien, a également eu lieu dans les colonnes du journal Le Figaro entre un philosophe dit de gauche Michel Onfray et un autre de droite Luc Ferry. Et le résultat est agréable à lire…

Michel Onfray s’inquiète par exemple des conséquences sociales de la modernité. Il cite l’exemple de son ami libraire à Bordeaux qui s’en tire assez bien, car sa librairie dispose d’un stock formidable. Mais les petites librairies vont mourir, selon Michel Onfray, leur stock étant trop petit. Et comme le délai de commande des ouvrages est trop long, ils n’auront d’autre choix que de mettre la clé sous le paillasson.

En effet, le philosophe Michel Onfray reconnaît que quand on vit comme lui en province, il est, hélas, bien plus pratique de commander sur Internet, car on reçoit les livres le lendemain dans sa boîte aux lettres ! La plateforme Internet de type Amazon sera donc toujours plus performante que les petites librairies qui seront donc prolétarisées avant d’être éjectées par le système !

La réponse de son interlocuteur, Luc Ferry, est intéressante dans le sens où elle se montre résolument optimiste dans l’avenir. Premièrement, il rappelle que c’est la vie: des métiers naissent et disparaissent, comme les canuts ont dû faire place aux métiers à tisser, comme les moines copistes ont dû faire place à l’imprimerie. Et Luc Ferry de rappeler que ce progrès qu’on redoute aujourd’hui nous a quand même permis de gagner 40 ans d’espérance de vie au cours du XXe siècle. Ce n’est pas rien…

Si l’on excepte Daech, tout a tourné à l’avantage de notre modèle économique et démocratique…

Quant à ceux qui dénigrent l’évolution actuelle, il leur rappelle, un peu perfidement, je le reconnais, car il fait l’impasse sur les aspects positifs de mai 68, que si on se reporte à la fin des années 60, c’était l’époque de la Chine maoïste et de ses millions de morts, de l’URSS et de ses goulags. C’était aussi l’époque des tortionnaires fous en Amérique du Sud. C’était le temps du charmant Franco en Espagne, et de la douce dictature des colonels en Grèce. C’est vrai que si l’on excepte Daech, tout a tourné aujourd’hui à l’avantage de notre modèle économique et démocratique.

Luc Ferry, à rebrousse-poil des discours ambiants, met au défi quiconque de lui indiquer, dans le temps ou dans la géographie, un régime plus doux, plus libre ou plus protecteur que celui de nos vieilles démocraties européennes. Ceux qui en doutent devraient savoir, comme le rappelle un expert en terrorisme, qu’en Syrie, il y a l’équivalent d’un Bataclan tous les deux jours en termes de morts.

Est-ce pour autant à dire que tout va bien ? Non évidemment, Luc Ferry le reconnait. La politique est restée locale alors que l’économie, le marché est devenu mondial. Du coup, les leviers politiques ne lèvent hélas plus grand-chose. C’est pourquoi les citoyens ressentent cette impuissance des politiques. D’où l’attrait pour les mouvements populistes. Marine Le Pen ou Donald Trump se nourrissent en partie de ce sentiment d’impuissance des politiques traditionnels, et nettement moins du caractère borné ou du racisme supposé de leurs électeurs. C’est assurément un beau débat.

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