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Pourquoi le PS ne lèvera pas un impôt wallon sur la fortune

Le PS plaide pour un impôt sur la fortune depuis 1985, sans arriver à l’imposer. Le débat est toujours aussi vif de nos jours, et notamment parce que le gouvernement s’est engagé à faire un glissement de la fiscalité, ce qu’on appelle un tax shift.

En clair, il faudrait baisser l’impôt des personnes physiques, que tout le monde s’accorde à trouver excessif, pour le contrebalancer par une hausse sur d’autres revenus que ceux du travail. Et c’est la raison pour laquelle le PS insiste pour mettre à contribution le patrimoine ou le capital via un impôt sur la fortune.

Toucher au patrimoine ou aux voitures de société, ce serait toucher en premier lieu aux électeurs de la majorité

Mais pour le moment, au fédéral, rien n’est encore décidé. Et s’il y a un léger consensus, c’est pour plutôt augmenter la TVA. Pourquoi ? Parce que c’est autour de la TVA que la coalition gouvernementale pourrait le plus aisément s’accorder. Toucher au patrimoine ou aux voitures de société, ce serait toucher en premier lieu aux électeurs de la majorité gouvernementale actuelle. Donc, pour le moment, tout le monde parle de tax shift, de glissement de l’imposition, mais personne ne se décide à sortir du bois pour dire quoi exactement ! Sauf le parti socialiste qui insiste pour que l’on mette en place un impôt sur la fortune.

Cela a permis au ministre fédéral du budget, Hervé Jamar, de piéger en quelque sorte le PS en lui disant que, puisqu’il tient tant à son impôt sur la fortune, il n’a qu’à l’appliquer en Wallonie. Il y gouverne, il en a donc la compétence ! Évidemment, le PS ne pouvait pas dire ‘non’, sinon il perdait toute crédibilité, et donc, une étude urgente a été demandée aux experts fiscaux wallons pour savoir si cela était possible.

La réponse sera évidemment ‘oui’ sur le plan technique – la Région wallonne peut sans aucun problème lever un impôt sur le patrimoine – mais sur le plan politique, cela ne se fera pas. D’abord, parce que si le PS est en faveur de cet impôt et qu’il peut compter sur l’appui d’Ecolo et du PTB, cela ne lui donne pas une majorité au parlement wallon. Pour faire passer un tel impôt, il faudrait l’accord du cdH qui a déjà dit qu’il n’en voulait pas. Il a par ailleurs trouvé là une occasion en or de démontrer son indépendance vis-à-vis de son partenaire socialiste. Et puis, l’autre raison qui fera que cet impôt ne devrait pas voir le jour, c’est qu’on nous expliquera que si la Wallonie est la seule à imposer les grosses fortunes, celles-ci seront tentées de se délocaliser en Flandre, dans une commune à facilités par exemple.

Bref, à nouveau, il est probable que ce débat sur l’impôt sur la fortune se limitera à des joutes oratoires, mais sans qu’aucune décision ne soit prise en ce sens.

Mais est-ce un débat qui a encore du sens aujourd’hui ? Si on part du principe que les plus pauvres sont débiteurs, et que les plus riches sont créanciers, il faut rappeler qu’actuellement, la Banque centrale européenne, avec la complicité assumée des gouvernements de la zone euro, a décidé d’euthanasier les créanciers en imposant des taux d’intérêt très bas. Quelqu’un qui veut aujourd’hui vivre de ses rentes, c’est-à-dire de revenus d’intérêt de placements sans risque comme des obligations d’État, ne peut plus le faire. Pourquoi ? Parce que le taux de rendement après inflation et taxes frôle les 0 % ! N’est-ce pas là déjà un impôt sur la fortune qui ne dit pas son nom puisque 100% de ce revenu d’intérêt est confisqué ? La question n’a pas encore été posée, voilà qui est fait.

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