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Pourquoi la situation de la Grèce ne peut pas être comparée à celle de l’Irlande

La Grèce est souvent critiquée pour son non-respect des engagements budgétaires envers l’Europe. L’exemple de l’Irlande est souvent pris pour montrer qu’un pays tombé en forte crise peut remonter la pente. Pourtant, les deux pays ne sont pas vraiment comparables. Explications.

La Grèce est souvent critiquée pour son non-respect des engagements budgétaires envers l’Europe. Quand les Grecs disent qu’ils ne peuvent pas respecter leurs engagements, car ils enfoncent le pays encore plus dans la crise et que sa population est à bout de souffle, il y a souvent un responsable européen qui n’hésite pas à donner l’exemple de l’Irlande pour démontrer qu’un pays tombé en forte crise peut remonter la pente. C’est une manière de dire aux Grecs : “arrêtez de vous plaindre et suivez l’exemple Irlandais qui démontre qu’il est possible de réformer son économie et de s’en sortir !”. Mais est-ce aussi simple que cela ? Philippe Béchade, commentateur économique avisé (Chronique Agora) n’y croit pas trop à cet exemple de vertu, jugé trop beau pour être vrai.

D’abord, il y a une grosse différence entre la Grèce et l’Irlande. La Grèce est un pays où personne ne paie d’impôts. L’évasion fiscale y est un sport national mais il n’y a aucun avantage pour une entreprise étrangère de s’y établir. En revanche, les Irlandais paient au prix fort leurs impôts et leur pays est un véritable paradis fiscal pour les multinationales. Quand un homme politique dit : “regardez, le PIB de l’Irlande remonte à nouveau”, il oublie juste de dire que ce PIB est surtout alimenté par des flux de capitaux intéressés uniquement par l’aspect “paradis fiscal” de l’Irlande et qui bien souvent ne font que transiter par Dublin.

Ce dont on parle moins, c’est de l’exode des Irlandais, plus de 200.000 ont ainsi quitté le pays depuis la crise de 2009. Pour un pays de 4,6 millions d’habitants, c’est quasi 5% de la population qui est partie tenter sa chance ailleurs. Ce n’est pas vraiment un modèle de réussite, d’autant que l’Irlande a toujours eu une tradition d’exode, notamment pour des raisons de famine, et qu’on pensait à tort qu’elle en était quitte aujourd’hui.

C’est clair qu’à partir du moment où 5% de votre population fait ses valises, il y a souvent une baisse du chômage qui s’ensuit. Officiellement, les chiffres de l’Irlande sont meilleurs, mais a-t-on assez parlé de ces aspects négatifs et qui sont escamotés par ceux qui donnent en exemple l’Irlande ? D’autant que si 5% de la population irlandaise a quitté le pays, c’est aussi parce qu’en Irlande, la protection sociale des chômeurs et des personnes sans emploi est quasi inexistante. En résumé, oui, l’Irlande se porte mieux que la Grèce, mais il faut aussi nuancer ces propos.

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