Pour cause de la guerre, l’UE renonce à son corset budgétaire en 2023

Le vice-président de la Commission, Valdis Dombrovskis © Belgaimage

Les règles de discipline budgétaire imposées aux Etats membres de l’UE, qui ne sont plus appliquées depuis mars 2020, resteront suspendues en 2023 en raison du choc économique provoqué par la guerre en Ukraine, a annoncé lundi la Commission européenne.

A période exceptionnelle, mesure exceptionnelle. Pas encore remise du choc de la pandémie de Covid, l’activité économique européenne affronte une flambée des prix et un net ralentissement de sa croissance provoqués par le conflit militaire avec la Russie. Pour se donner de l’air, l’UE préfère renoncer à rétablir son corset budgétaire jusqu’à la fin de l’année prochaine. “Nous proposons de maintenir en 2023 la clause de sauvegarde générale”, qui permet de déroger temporairement aux limites de dettes et de déficits fixées par le Pacte de stabilité, a déclaré le vice-président de la Commission, Valdis Dombrovskis, lors d’une conférence de presse. “Cela offre des marges de manoeuvre aux politiques budgétaires nationales pour réagir rapidement en cas de besoin”, a-t-il expliqué, tout en appelant à une gestion rigoureuse des deniers publics.

Cette position de la Commission a été bien accueillie par les ministres des Finances de l’UE réunis dans l’après-midi à Bruxelles, aucun ne s’y opposant.

L’allemand Christian Lindner a toutefois exprimé des réserves. Pour lutter contre l’inflation, il faut “réduire les déficits”, a-t-il affirmé. Soulignant que l’Allemagne n’utiliserait pas cette souplesse budgétaire, il a conseillé aux autres pays de faire de même. “Nous devons sortir de l’endettement dès que possible, nous devons retourner au pacte de stabilité dès que possible”, a-t-il dit.

L’activité économique souffre de la flambée des prix des matières premières qui, au-delà de l’énergie, se propage aux tarifs de l’alimentation. Le conflit a également accru les problèmes des chaînes d’approvisionnement et augmenté l’incertitude tant pour les entreprises que pour les ménages. La Commission européenne a dû réduire drastiquement la semaine dernière ses prévisions de croissance économique pour l’UE et la zone euro en 2022. Elle table désormais sur 2,7% contre 4% en début d’année et n’exclut pas une nouvelle détérioration.

– Règles obsolètes ? –

Or, des investissements massifs sont nécessaires pour éliminer le plus vite possible la dépendance européenne au pétrole, gaz et charbon russes afin de ne plus financer l’effort de guerre de Moscou. Bruxelles a présenté jeudi un plan à 210 milliards d’euros pour financer de nouvelles infrastructures énergétiques. Dans ce contexte, il était délicat d’imposer aux comptes publics des limites trop sévères. “Tous les Etats membres doivent promouvoir et développer l’investissement public pour la transition verte et numérique et pour la sécurité énergétique. Cependant, un contrôle strict des autres dépenses courantes est nécessaire”, en particulier pour les pays les plus endettés, a souligné M. Dombrovskis.

La Commission ne sévira pas à court terme, mais elle surveillera le respect de ses recommandations par les Etats membres. Les procédures pour déficit excessif, prévues par les règles européennes, ne seront pas activées, au moins jusqu’à une nouvelle évaluation prévue à l’automne puis au printemps prochain. Le pacte de stabilité, qui limite les déficits publics à 3% et la dette à 60% du Produit intérieur brut (PIB), a été suspendu début 2020 en raison de la pandémie mondiale de Covid-19. Cela a permis aux 27 pays membres d’engager des dépenses exceptionnelles de soutien aux ménages et entreprises pour éviter un crash économique.

Bruxelles avait prévu de présenter en juin des propositions pour réformer ce pacte, à la demande de plusieurs pays dont la France qui le juge “obsolète”. Elles seront finalement formulées “à l’automne”, a annoncé Valdis Dombrovskis. “La guerre en Ukraine nous a obligés à nous concentrer sur des mesures immédiates”, ralentissant le travail sur cette réforme, a-t-il expliqué. Il a souligné la nécessité de trouver “un consensus” sur cette question qui divise les Etats membres.

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