Piketty répond aux critiques du Financial Times
L’auteur du livre “Le capital au XXIème siècle” est attaqué par le Financial Times, qui estime que ses données sont insuffisantes pour prouver la montée des inégalités économiques. Thomas Piketty conteste cette analyse et va sortir de nouvelles données.
L’économiste français Thomas Piketty fait un tabac aux Etats-Unis avec la sortie de la traduction américaine de son ouvrage “Le capital au XXIème siècle”, publié en septembre dernier. Il analyse la répartition des richesses sur le long terme et estime que nous entrons dans une ère de concentration des patrimoines. L’héritage deviendra de plus en plus une source de richesse plus importante que le mérite personnel. Ce dernier, qui avait joué un rôle important dans l’après-guerre, s’estompe. L’attaque du FT Le quotidien Financial Times a contesté la validité des données utilisées par l’économiste français. Il a utilisé pour ce faire les données disponibles sur le web, mises à la disposition de Thomas Piketty (http://piketty.pse.ens.fr/fr/capital21c). Le journaliste du FT, Chris Giles, estime que “le niveau exact des inégalités en Europe ces 50 dernières années est impossible à déterminer, car il dépend des sources utilisées.” Réponses de Krugman et Piketty Paul Krugman, Nobel d’économie, qui soutient les travaux de Thomas Piketty, a estimé que l’accusation du FT était faiblarde.
“Aux Etats-Unis, l’inégalité entre les revenus a augmenté depuis 1980, peu importe les données que vous utilisez” indique-t-il dans son blog du New York Times.
Thomas Piketty a minimisé la portée de la critique du quotidien britannique. “ Les données qu’on a sur les patrimoines sont imparfaites mais d’autres comme les déclarations de succession sont plus fiables. Je fais cela en toute transparence, je mets tout en ligne ”, a expliqué l’économiste à l’AFP. “ Là où le Financial Times est malhonnête, c’est qu’il laisse entendre que cela change des choses aux conclusions alors que cela ne change rien.”
De nouvelles données seront publiées Thomas Piketty a aussi déclaré à Business Insider qu’il va étoffer les données publiées sur son site. “Je vais mettre à jour les données de l’annexe technique du livre mises en ligne dans les prochains jours pour clarifier les choses”.
L’ouvrage de l’économiste français porte sur 20 pays. Il n’inclut pas la Belgique, où, précisément, les données sur les richesses sont trop lacunaires. Dans une interview accordée à Trends-Tendances en septembre dernier, il estimait que l’évolution décrite dans son livre devait être identique chez nous. “J’ai toutes les raisons de penser que la situation belge est proche de celle de la France et d’autres pays d’Europe continentale, pays à propos desquels nous avons des données précises.”
Une thèse déjà contestée en Belgique Certaines thèses sont toutefois contestées en Belgique. La base de l’ouvrage est l’écart entre la croissance et le rendement du capital. Thomas Piketty estime qu’après l’après-guerre, où le rendement du capital était inférieur à la croissance, une situation inverse devrait s’imposer dans les années à venir. La croissance, qui, selon lui, devrait rester modérée, se situera en-dessous du rendement du capital. Ce qui, mécaniquement, va gonfler les revenus du patrimoine par rapport à ceux du travail. Et donner plus de poids aux rentiers.
Philippe Ledent, économiste chez ING, avait contesté dans Trends Tendances l’hypothèse d’une croissance tendanciellement basse. “Je ne serais pas aussi pessimiste que Thomas Piketty sur la croissance, elle n’est pas condamnée à demeurer faible. Pour une raison au moins: nous ne savons pas aujourd’hui quelles sont les innovations qui pourraient, demain, pousser la productivité, donc la croissance. Nous connaissons juste les éléments négatifs, comme le vieillissement, la tendance à la hausse du prix du pétrole, etc. Ce qui crée un biais pessimiste.”
Robert van Apeldoorn
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