Les mesures de Thomas Dermine pour sortir la Wallonie de l’ornière

Thomas Dermine, 35 ans, secrétaire d'Etat à la Relance (PS).

Dans la foulée de notre dossier comparant la situation économique et budgétaire de la Wallonie à celle de la Grèce de 2010, nous avons demandé à plusieurs jeunes mandataires politiques, celles et ceux qui devront gérer la Wallonie de demain, de nous présenter trois mesures qui pourraient contribuer au redressement économique de la région.

Voici les propositions de Thomas Dermine, 35 ans, secrétaire d’Etat à la Relance (PS).

  1. Une plateforme transparente de données pour améliorer l’orientation professionnelle. Plusieurs de nos interlocuteurs avaient pointé l’absence d’une vraie réforme du marché du travail comme l’une des grandes lacunes du Plan Marshall. La première proposition de Thomas Dermine concerne ce marché du travail et plus particulièrement l’orientation. “Nous avons un gros problème d’orientation en Wallonie, estime le secrétaire d’Etat à la Relance. Beaucoup de jeunes, et de moins jeunes aussi, posent des choix sans bien connaître tous les éléments sur les débouchés professionnels. Evidemment, l’enseignement ne doit pas faire de l’adéquationisme mais il faut un maximum de transparence sur les opportunités d’emploi à l’issue des différentes filières.” Il propose de créer une plateforme reprenant les données pour chaque cursus, des universités aux formations techniques et professionnelles : le taux d’emploi à la sortie, le salaire moyen, la proportion de personnes exerçant un lien avec les études etc. “Cela ne coûte pas cher et cela permet de poser autrement la question des métiers en pénurie, poursuit Thomas Dermine, dont la proposition est directement inspirée d’une idée mise en place aux Etats-Unis par Barack Obama. Dans les milieux les plus favorisés, on sait beaucoup mieux quelles sont les filières porteuses. Offrir cette information, de manière transparente, à tout le monde, c’est renforcer l’égalité des chances. C’est une mesure radicalement sociale. Et elle se base sur la confiance aux jeunes et à leur capacité à s’orienter en fonction d’informations précises.”
  2. Revoir la fiscalité immobilière. “La Wallonie est prisonnière d’une typologie immobilière issue de la révolution industrielle”, résume Thomas Dermine. Une partie significative du bâti dans certaines provinces est constitué de petites maisons de rangée datant d’il y a plusieurs décennies. Les personnes qui y ont grandi préfèrent souvent acheter ailleurs que rénover ces habitations ; et à l’inverse, des personnes précarisées viennent d’un peu partout pour s’y loger dans des conditions souvent déplorables. Ces quartiers sont ainsi victimes d’un “double flux” qui retarde leur redressement . “Ces maisons sont souvent rachetées par des investisseurs professionnels en vue d’être remises en location, aves des rendements relativement élevés et aucune obligation de rénovation”, dénonce Thomas Dermine, qui vit à Charleroi.Sa proposition : faciliter l’accès à la propriété par une diminution des droits d’enregistrement (6%, voire 3% comme en Flandre, au lieu des actuels 12,5%). La diminution serait plus forte en cas de rénovation énergétique du bâtiment. “Cela permet d’endiguer le double-flux, d’améliorer le confort de ces habitations, de réduire nos émissions et d’apporter des chantiers supplémentaires au secteur de la construction”, dit-il. Une telle mesure, comparable à celle que la Flandre vient de mettre en oeuvre, serait aussi de nature à favoriser la mobilité des travailleurs. Miser la logistique, la pharmacie et le génie mécanique.
  3. Les stratégies industrielles. Sur un petit territoire de 3,5 millions d’habitants, on ne peut pas être champions du monde dans toutes les disciplines. Il propose de simplifier les politiques industrielles éparpillées entre les pôles, clusters et autres domaines d’innovation stratégique pour concentrer les moyens publics sur quelques secteurs dans lesquels la Wallonie présente de vrais avantages compétitifs. Il s’agit d’abord de la logistique. “Notre localisation géographique nous place au centre des flux logistiques européens, dit Thomas Dermine. Nous avons de l’espace et des infrastructures routières, ferroviaires, aéroportuaires et fluviales, nous pouvons capter une plus grande part de la valeur ajoutée de ces flux.” Ensuite, il y a bien entendu la pharmacie où “la conjugaison de l’histoire économique et de stratégies public/privé a permis d’atteindre un effet de masse décisif au niveau international” ; et enfin, le génie mécanique, aussi le fruit de notre histoire, qui donne aux entreprises wallonnes une visibilité mondiale dans des domaines aussi divers que les constructions métalliques, l’armement, le spatial ou l’énergie (y compris le démantèlement des centrales nucléaires). “Et puis, c’est tout, insiste Thomas Dermine. Il faut concentrer les moyens et la formation sur ces trois domaines.”

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