Le Covid n’est plus le ciment de la coalition Vivaldi, qui semble se fissurer

Vandenbroucke et De Croo : On a parfois l'impression que le gouvernement fédéral n'est composé que de deux membres.
Alain Mouton Journaliste chez Trends  

L’an passé, chaque vague de la pandémie a rapproché le gouvernement fédéral. Les divergences d’idéologies sont temporairement passées au second plan. Mais la quatrième vague n’a plus cet effet fédérateur. Les tensions augmentent au sein du gouvernement. Même le ministre de la Santé Frank Vandenbroucke est tombé de son piédestal.

Depuis l’entrée en fonction du gouvernement De Croo, début octobre 2020, rares ont été les moments où tous les membres l’équipe partageaient le même avis lorsqu’il a fallu s’attaquer à des dossiers cruciaux, tels que les pensions, le budget, la sortie du nucléaire ou la politique du marché du travail. La déclaration de politique fédérale du Premier ministre Alexander De Croo (Open Vld) a presque dû être reportée le mois dernier en raison d’un nouveau désaccord entre les socialistes du PS et les libéraux du MR. Certains sujets délicats, comme le travail de nuit dans l’e-commerce, ont été renvoyés aux groupes de travail et aux partenaires sociaux. Le débat des pensions est à l’arrêt.

L’année écoulée a montré que le gouvernement De Croo n’a pu faire preuve d’un certain esprit de cohésion que lorsque la pandémie se montrait menaçante. Le duo composé d’Alexander De Croo et du ministre de la Santé publique Frank Vandenbroucke (Vooruit) a notamment reçu des éloges pour son travail. On a parfois l’impression que le gouvernement fédéral n’est composé que de deux membres. La lutte contre la pandémie semblait également être l’occasion idéale pour un peu de marketing politique. “L’équipe de 11 millions” a vu le jour. Au-dessus des centres de vaccination pendaient de grandes pancartes annonçant “ici nous retrouvons notre liberté”. La lutte contre la pandémie est devenue le ciment de la Vivaldi. Jusqu’à maintenant.

Le PS se repositionne

Finie l’unanimité Covid. Le PS est revenu sur l’accord selon lequel les membres du personnel des soins de santé qui refusent un vaccin peuvent être suspendus voire, à partir du 1er avril 2022, être licenciés. Selon le président du PS, Paul Magnette, cela n’est possible que s’il existe une obligation générale de vacciner l’ensemble de la population.

Cette situation est particulièrement douloureuse pour son équivalent socialiste flamand, le Vooruit. Le ministre de la Santé Frank Vandenbroucke aime garder le contrôle. Il est ainsi démontré une fois de plus qu’il n’existe pas de grande unité socialiste dépassant la frontière linguistique. Quand c’est vraiment important, le PS joue cavalier seul. Comme avant, quand les démocrates-chrétiens wallons du PSC étaient un appendice occasionnellement utile du CVP, beaucoup plus grand, Vooruit n’est guère plus qu’un outil politique pratique pour le PS.

Frank Vandenbroucke a connu de meilleures semaines. Il a encore perdu un peu de son aura de professeur omniscient. Il lui a été reproché de s’opposer au ministre flamand du Bien-être Wouter Beke (CD&V), qui voulait accélérer le déploiement de la troisième dose. Il apparaît maintenant que du temps précieux a été gaspillé ces dernières semaines. Frank Vandenbroucke a réagi aux critiques formulées hier à la Chambre en s’adressant avec sarcasme au virologue Johan Neyts. Ce dernier avait déclaré dans Terzake que la décision d’une troisième dose était arrivée trop tard pour le personnel soignant. Frank Vandenbroucke a répondu que Johan Neyts avait déclaré fin octobre qu’une troisième dose n’était pas nécessaire. “Je ne lui en veux pas. Sa vision évolue.” Seulement, le virologue n’a jamais dit une telle chose. Il a déclaré “qu’une dose de rappel est un bonus, mais soulève aussi une question d’éthique. Sur le plan virologique, je suis favorable à ce rappel.”

La réponse de Frank Vandenbroucke n’est donc pas fondée sur des faits, et le ministre utilise également l’astuce boiteuse du “je suis intelligent et les autres sont stupides”. Cette attitude lui a déjà causé quelques soucis par le passé. En 2003-2004, son attitude pédante l’a mis en porte-à-faux avec le PS au sein du gouvernement de Guy Verhofstadt. Quelques années plus tard, il s’est disputé avec une grande partie du sp.a. Frank Vandenbroucke a longtemps été une figure de proue du gouvernement Vivaldi, mais les politologues ont prédit qu’à terme, il pourrait faire obstacle au bon fonctionnement du gouvernement. Ce moment est peut-être arrivé.

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