Fin du boom minier en Australie

© Reuters

Les grands groupes miniers voient leurs revenus s’effondrer, plombés par le freinage de la Chine. Ils s’attendent d’ores et déjà à voir chuter les investissements.

Il y a quelques mois, l’Australie donnait des leçons à l’Europe en matière de croissance. Cette page est désormais tournée. L’Australie craint la fin du “boom minier” après l’effondrement des bénéfices de ses champions, BHP Billiton et Rio Tinto, et le gel d’importants projets, imputés au coup de frein de l’économie chinoise qui mine la demande et les cours des matières premières.

Les analystes prédisaient depuis longtemps le crépuscule du miracle minier en Australie, au moins provisoire, sous l’effet d’une indigestion de l’ogre chinois. La Chine est le premier partenaire commercial de l’Australie, un investisseur de premier ordre et un consommateur avide de charbon, de minerai de fer et de gaz naturel australiens. Or le tassement de sa croissance, actuellement à son rythme le plus faible depuis le premier trimestre 2009, a fait descendre les cours du minerai de fer sous la barre des 100 dollars la tonne pour la première fois depuis deux ans et demi et ceux du charbon thermique à la moitié de leur niveau de 2008.

Des résultats en baisse d’au moins 25%

“La Chine ralentit, l’Inde ralentit, le Brésil ralentit. De ce fait les cours descendent alors que les coûts n’ont cessé d’augmenter en Australie ces dernières années”, relève le directeur du cabinet Deloitte en Australie, Chris Richardson. L’avertissement le plus spectaculaire est venu du ministre des Ressources naturelles après la publication des résultats des géants anglo-australien BHP Billiton et Rio Tinto. “Nous en avons profité -270 milliards de dollars australiens d’investissements (225 milliards d’euros)- le monde entier nous envie. Mais le boom des ressources naturelles est terminé”, a assuré Martin Ferguson.

BHP Billiton a annoncé cette semaine le gel de plusieurs projets de développement après un effondrement de 35% de son bénéfice net sur l’exercice 2011/2012, directement lié au tassement de la croissance chinoise. Pour les mêmes raisons, son rival Rio Tinto, avait fait état début août d’une baisse de 25% de son bénéfice net au premier semestre. Lundi, Yancoal Australia, filiale du chinois Yanzhou, annonçait le réexamen de ses plans de développement sur sept de ses mines. Et ce vendredi, le groupe Whitehaven Coal a rendu public le retrait de l’offre de son compatriote Tinkler Group qui avait proposé d’en prendre le contrôle pour consolider ses positions dans le charbon.

Les investissements menacés

Certes l’économie australienne n’est pas encore à terre. Les exportations peuvent encore tenir le coup quelques temps puisque l’extraction n’a même pas commencé sur des myriades de sites en cours d’aménagement. En revanche, le boom est sans doute terminé du côté des investissements. La Banque centrale australienne (RBA) prévoit que les dépenses relatives au secteur minier culmineront dès 2013, au mieux en 2014, en tout cas plus rapidement qu’anticipé. “Ensuite le taux d’investissement devrait décliner tandis que les exportations des matières premières, elles, augmenteront”, a nuancé vendredi le gouverneur de la RBA, Glenn Stevens.

La Première ministre travailliste, Julia Gillard, a elle-même démenti son ministre en promettant de beaux lendemains au pays grâce à ses sous-sols. “Nous continuerons à voir cette nation gagner prospérité et richesse grâce à l’exportation des ressources naturelles (…). Le boom minier (…) est encore avec nous pendant longtemps”, a-t-elle martelé. Moins optimiste, la Deutsche Bank estime de son côté que l’essouflement minier risque carrément de précipiter le pays dans la récession en 2013. En 2011 déjà, l’Organisation mondiale du Commerce (OMC) mettait l’Australie en garde contre une dépendance excessive au secteur minier qui pourrait constituer un “défi économique majeur”. Reste à savoir si Canberra a sagement thésaurisé la manne minière: une partie du magot pourrait servir à amortir les conséquences sociales d’un brusque retour de manivelle, plusieurs groupes ayant évoqué des réductions d’effectifs dans les mois qui viennent.

Trends.be avec l’Expansion

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