Face à l’inflation, désaccord à la Fed sur le rythme de hausse des taux
La banque centrale américaine s’apprête à relever ses taux directeurs, pour lutter contre l’inflation, mais deux camps s’affrontent au sein de l’institution: ceux qui veulent agir vite et plaident pour une forte hausse, face aux partisans d’une première augmentation plus modérée.
“Personnellement, je ne vois aucun argument convaincant pour y aller fort au début”, a déclaré vendredi le président de la Fed de New York, John Williams, à des journalistes en marge d’une conférence en ligne à l’Université de New Jersey City.
Face à une inflation au plus haut depuis 40 ans, le débat n’est en effet plus de savoir si la puissante Réserve fédérale commencera ou non en mars à relever ses taux, mais de combien: 25 ou 50 points de base (soit 0,25 ou 0,50 point de pourcentage).
“Je ne pense pas que nous ayons besoin d’aller très vite au début”, a souligné John Williams, qui préfère par la suite, selon l’évolution de la situation, “ralentir ou accélérer”.
D’autres responsables ne partagent pas cet avis.
Notamment James Bullard, président de l’antenne de St. Louis de la Fed, qui plaide pour que les taux soient relevés au total de 100 points de base au cours des trois réunions au programme de la Fed d’ici le 1er juillet.
Ce qui suppose au moins une hausse de 50 points.
“Nous avons été surpris par la forte inflation. (…) Notre crédibilité est en jeu ici”, avait-il indiqué lundi.
Il avait mis en avant la nécessité de “réagir aux chiffres”, mais “de manière organisée et sans perturber les marchés”.
“Je pense que ma position est bonne et j’essaierai de convaincre mes collègues qu’elle est bonne”, avait-il ajouté, avant de réitérer, jeudi, ses craintes de voir une inflation “hors de contrôle”.
C’est en mai 2000 que la Fed avait, pour la dernière fois, eu recours à une hausse de 50 points de base.
Inflation à 3% fin 2022
La première économie du monde s’est rétablie des dommages causés par la pandémie de Covid-19. Mais elle est à présent menacée par un danger qu’elle n’avait plus vu depuis 40 ans: une inflation trop forte.
La hausse des prix a atteint 5,8% en 2021, selon l’indice PCE qui est privilégié par la Fed, son rythme le plus élevé depuis 1982, et surtout bien supérieur aux 2% à long terme que vise l’institution monétaire.
L’inflation sous-jacente, qui exclut les prix volatils de l’énergie et de l’alimentation, s’est élevée à 4,9%.
Relever les taux directeurs permet de faire baisser l’inflation, en renchérissant le coût du crédit, ce qui fait ralentir la demande de la part des consommateurs et entreprises.
Les taux sont depuis près de deux ans dans une fourchette de 0 à 0,25%. Ils avaient été brusquement abaissés en mars 2020, face à l’imminence aux Etats-Unis de la menace liée au Covid-19.
John Williams est optimiste quand à un ralentissement de l’inflation, et s’attend à ce que, d’ici fin 2022, “l’inflation des prix PCE revienne à environ 3%, avant de baisser encore l’année prochaine alors que les problèmes d’approvisionnement continueront de s’atténuer”.
Il table par ailleurs sur “une croissance du PIB d’un peu moins de 3% cette année” et un taux de chômage “autour de 3,5%” fin 2022.
Lorsque les taux auront commencé à remonter, “l’étape suivante consistera à entamer le processus de réduction (…) de nos avoirs en bons du Trésor et en MBS (produits financiers adossés à des prêts immobiliers, NDLR)”, a-t-il souligné.
Autrement dit, commencer à réduire le bilan de la Fed, gonflé par deux années d’achats d’actifs.
“En supposant que l’économie se développe à peu près comme prévu, je prévois que ce processus commencera plus tard cette année”, a souligné M. Williams.
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