En plein chaos politique, les femmes sont appelées à la rescousse en Allemagne

Sauf surprise, Andrea Nahles sera désignée présidente du parti par un congrès du SPD le 22 avril, succédant ainsi à Martin Schulz. © AFP

Pour la première fois en Allemagne, les deux plus grandes formations politiques vont être dirigées par des femmes, le parti social-démocrate en pleine déroute prévoyant d’élire Andrea Nahles comme nouvelle présidente.

Sauf surprise, cette battante de 47 ans sera désignée présidente du parti par un congrès du SPD le 22 avril. Elle succèdera à Martin Schulz, l’ex-président du Parlement européen qui a connu une année catastrophique marquée notamment par une gifle électorale et des volte-face en série.

M. Nahles rejoindra alors un club de moins en moins fermé de femmes à la tête de partis allemands, avec son exemple le plus célèbre, Angela Merkel, depuis près de deux décennies aux commandes de l’Union chrétienne-démocrate (CDU).

En plus de 150 ans d’histoire, le SPD n’avait jamais confié son destin à une femme.

“Quand tout est en miettes, alors on fait appel aux femmes”, estime cette semaine le quotidien Süddeutsche Zeitung, qui dresse un parallèle avec les “femmes des décombres” qui ont déblayé les ruines après la dernière guerre pour reconstruire les villes allemandes ravagées par les bombes.

Il y a vingt ans, Angela Merkel avait redressé une CDU alors au bord de l’abîme, plombée par un scandale de financement illégal sous Helmut Kohl.

Sauver un SPD en crise d’identité et en chute libre dans les sondages: “c’est désormais la tâche qui attend Andrea Nahles”, écrit le quotidien.

– Matriarcat –

Au-delà “jamais le matriarcat n’a été aussi fort” dans la politique allemande, juge le Spiegel.

Les écologistes et la gauche radicale ont à leur tête une direction duale avec un homme et une femme. Dans le parti d’extrême-droite AfD, la co-présidente du groupe parlementaire Alice Weidel jouit d’une grande influence.

On prête par ailleurs à Angela Merkel l’intention d’organiser -après son éventuel quatrième mandat- une succession au profit d’Annegret Kramp-Karrenbauer, chef du gouvernement de la Sarre.

Certes, avec 30,7%, la représentation des femmes à la chambre des députés a chuté à son niveau le plus bas depuis environ vingt ans. Le revers est attribué toutefois avant tout au succès électoral en septembre de l’AfD et des libéraux où les femmes sont sous-représentées.

Et même si une chancelière gouverne depuis douze ans la première économie européenne, les ministères les plus prestigieux ont jusqu’à présent été confiés à des hommes.

Mais les choses changent: la conservatrice Ursula von der Leyen est à la Défense et devrait y rester, tandis que la sociale-démocrate Katarina Barley pourrait décrocher le ministère des Affaires étrangères selon les médias, une première pour une femme en Allemagne.

Pour Mona Küppers, présidente du “Frauenrat”, groupe d’influence pour les droits des femmes, le plus important est que “la parité soit respectée dans le prochain cabinet ministériel”, comme l’ont promis SPD et CDU, indique-t-elle à l’AFP.

Une règle déjà instaurée par Justin Trudeau au Canada et d’Emmanuel Macron en France. Elle se félicite aussi de la priorité donnée dans le contrat de coalition au combat pour l’égalité hommes-femmes.

– ‘Toujours mal pris’ –

Andrea Nahles, qui dirige déjà le groupe parlementaire du SPD, est loin d’être un choix par défaut. En tant qu’ancienne ministre du Travail, elle s’est battue pour la mise en place d’un salaire minimum, une petite révolution en Allemagne.

Depuis plusieurs semaines, cette mère d’une fille de 6 ans est de facto devenue la voix du SPD, face à un Martin Schulz décrédibilisé depuis la déroute des législatives du 24 septembre.

Après un récent discours enflammé, le journal populaire Bild l’avait qualifié de “seul vrai mec à la tête du SPD”. Sa personnalité un peu brusque – elle a promis d’en “mettre plein la gueule” à la droite – ne lui vaut pas que des amitiés.

“Sa façon de parler, de hurler dans le micro, et son ton légèrement démagogique: il faut l’apprécier. Ou bien la supporter”, soulignait récemment le journal berlinois TAZ.

En septembre, celle qu’on range dans l’aile gauche du parti avait confié souffrir de son image de caractérielle bourrue, à qui on reproche tour à tour un trop plein d’ambition ou un manque de féminité. “Quoique je fasse, c’est toujours plus ou moins mal pris”.

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