Trends Tendances

Charles Michel, ce roi nu

Parler du malheur des autres n’est pas chose aisée. Donc, je me garderai bien de faire des commentaires sur la situation de 2000 familles brisées par une décision prise aux Etats-Unis et tombée comme un couperet vendredi dernier. Plus modestement, j’avais juste envie de partager avec vous quelques réflexions sur l’affaire Caterpillar de Gosselies.

D’abord, notre Premier ministre a avoué avec beaucoup de sincérité qu’il a lui aussi découvert la nouvelle, quasi en même temps que nous, simples citoyens.

Je le crois très sincère, pour la simple raison que Charles Michel, ou demain son successeur, tous ces Premiers ministres sont en quelque sorte des rois nus, des rois sans pouvoirs.

Je le dis pour eux comme je pourrai le dire pour le président français François Hollande ou le Premier ministre hollandais. Que peuvent-ils faire aujourd’hui, si ce n’est engager des avocats pour défendre les travailleurs mis sur le carreau, et vérifier que la législation sociale – la fameuse loi Renault – soit respectée?

Pour le reste, comme le disait justement Jacques Attali, nos politiques ne peuvent que faire preuve d’empathie avec les victimes d’attentats hier ou de restructurations économiques aujourd’hui, et tenter de nous dire que demain sera meilleur si nous faisons ceci ou si nous défaisons cela. Mais leur vrai pouvoir, il ne faut pas avoir peur de le dire, est plus de l’ordre de la communication, du coaching que de l’action véritable. Suis-je trop dur, voire méchant en faisant ce constat ?

Tous ces Premiers ministres sont en quelque sorte des rois nus, des rois sans pouvoirs.

Hélas, non ! Parce que les gouvernements – et singulièrement ceux des petits pays – n’ont plus de pouvoir économique depuis longtemps. Vous en voulez la preuve ? La fixation de notre taux d’intérêt, celui de votre prêt hypothécaire ou de votre carte de crédit ? Il est fixé en partie par la banque centrale européenne et par les marchés financiers !

En clair, ce sont soit des fonctionnaires non élus, soit des traders qui décident de nos taux d’intérêt. Même chose pour le taux de change de l’euro : il est fixé par la loi de l’offre et de la demande et non pas par le bon vouloir de nos décideurs politiques. Vous me direz, qu’il reste tout de même la politique budgétaire ? Hélas, non. Même constat d’impuissance : en tant que ministre fédéral, et c’est encore pire si vous vous placez au niveau régional, vos marges de manoeuvre sont réduites à peau de chagrin. Regardez la baisse de l’impôt des sociétés proposée tout récemment par le ministre des Finances. A peine, en a-t-il parlé qu’on lui a rappelé qu’elle doit être neutre budgétairement sinon nous serons aussitôt taclés par la Commission européenne.

En résumé, on a le droit d’avoir des idées, on peut même les exposer, mais pour ce qui est de l’appliquer, il faut demander l’autorisation à des technocrates européens qui nous imposent de respecter des normes de Maastricht que nous avons nous-mêmes votées.

Quant au patronat, il doit se rendre compte que tout baser sur la baisse de la fiscalité des sociétés pour rendre plus attractive la Belgique revient à choisir le destin de l’Irlande. Une île de 4,5 millions d’habitants, transformée en paradis fiscal, et qui est aujourd’hui obligée de refuser 13 milliards d’euros d’amende infligée à Apple, car le gouvernement irlandais a peur.

En effet, s’il accepte ce pactole, qui n’est rien d’autre que l’impôt qui lui est dû par Apple, il a peur que les autres multinationales basées à Dublin ne quittent rapidement l’île. Car après tout s’ils sont là, ce n’est pas pour la qualité de la laine des moutons irlandais, mais pour sa fiscalité très douce. Mes confrères du Figaro ont donc eu raison de titrer : l’Irlande appartient-elle encore aux Irlandais ou à Apple ? Poser la question, c’est y répondre!

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content