Cambridge Analytica a joué un “rôle crucial” dans le Brexit

Christopher Wylie © REUTERS

La société Cambridge Analytica (CA), accusée d’avoir utilisé à des fins politiques les données privées de 50 millions d’utilisateurs de Facebook, a joué un “rôle crucial” dans le vote en faveur du Brexit, affirme le lanceur d’alerte Christopher Wylie, dans un entretien accordé à plusieurs journaux européens.

Les Britanniques auraient-ils approuvé le Brexit en 2016 sans Cambridge Analytica? “Non, ils ont joué un rôle crucial, j’en suis sûr”, a déclaré l’ex-directeur de recherche de la firme, selon des propos publiés mardi par le quotidien français Libération, qui l’a interviewé dimanche en compagnie d’autres journaux parmi lesquels Le Monde, Die Welt, El Pais et La Repubblica.

Dans cet entretien, le lanceur d’alerte affirme qu’AggregateIQ (AIQ), une entreprise canadienne liée à Cambridge Analytica, a travaillé avec cette dernière afin d’aider la campagne en faveur de la sortie de l’Union européenne “Leave.EU” à contourner son plafond de dépenses, et a dépensé “près d’un million de livres pour cibler” les électeurs. Il estime que “sans AggregateIQ, le camp du +Leave+ n’aurait pas pu gagner le référendum, qui s’est joué à moins de 2% des votes”.

Mardi, devant un comité parlementaire britannique enquêtant sur les “fake news”, il s’est dit “absolument” convaincu que AIQ a utilisé les bases de données de CA lors de la campagne du référendum sur le Brexit.

Il a aussi affirmé que AIQ avait joué un rôle dans la campagne présidentielle de 2015 au Nigeria, en diffusant des éléments compromettants et des vidéos destinées à intimider les partisans de Muhammadu Buhari, candidat à la présidentielle. AIQ a aussi travaillé sur un projet à Trinité-et-Tobago destiné à tenter de récolter les données Internet de la population du pays, a affirmé Wylie. “C’est une entreprise qui joue un rôle-clé en politique”, a-t-il assuré aux membres du comité, leur recommandant de “presser les autorités et les soutenir pour enquêter sur cette entreprise”.

Le lanceur d’alerte, qui a travaillé environ un an et demi pour SCL, maison mère de Cambridge Analytica qu’il a contribué à créer, a expliqué aux parlementaires avoir découvert après coup que son prédécesseur était mort dans des conditions inexpliquées dans sa chambre d’hôtel à Nairobi, alors qu’il travaillait pour Uhuru Kenyatta, l’actuel président du Kenya. “Les gens soupçonnaient un empoisonnement”, a-t-il déclaré.

Il a expliqué que SCL s’impliquait dans des élections se jouant dans les pays émergents, dénonçant un “colonialisme des temps modernes”.

Dans son entretien à des journaux européens, il a réaffirmé par ailleurs l’implication au sein de Cambridge Analytica du sulfureux Steve Bannon, ex-proche conseiller de Donald Trump et ancien patron de Breitbart, le site phare de l’ultra-droite américaine, affirmant qu’il venait à Londres “au moins une fois par mois”.

Dans cet entretien, M. Wylie a estimé qu’il ne fallait pas “supprimer” Facebook mais le “réparer”.

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