Christine Lagarde: une ascension météorique assombrie par les affaires

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Première femme à diriger le FMI, Christine Lagarde, inculpée par la justice française pour “négligence” dans un dossier d’arbitrage controversé, a connu une ascension météorique jusqu’au gotha des dirigeants mondiaux.

Avocate d’affaires aux États-Unis, ministre de l’Économie en France sous Nicolas Sarkozy: cette fille d’enseignants, mère de deux fils, s’est frayée en moins de dix ans un chemin vers ces hauts lieux du pouvoir où les femmes ne sont pas légion. Mais l’affaire pour laquelle elle est inculpée pourrait sérieusement écorner ses états de service. Elle porte sur un arbitrage rendu en 2008 et octroyant quelque 400 millions d’euros à l’homme d’affaires Bernard Tapie, pour clore le long litige qui opposait l’homme d’affaires au Crédit Lyonnais sur la revente de l’équipementier sportif Adidas.

Mme Lagarde avait été placée en mai 2013 sous le statut de témoin assisté, statut intermédiaire entre celui de simple témoin et celui de mis en examen. Le FMI l’a depuis toujours assurée de son soutien et elle a annoncé mercredi à l’AFP qu’elle excluait de démissionner après sa mise en examen.

Christine Lagarde avait été propulsée à la tête de l’institution financière internationale en juillet 2011, pour succéder à un autre Français, Dominique Strauss-Kahn, emporté par la tornade de ses déboires judiciaires aux Etats-Unis. Propulsée par M. Sarkozy, l’ex-ministre âgée de 58 ans a permis à l’institution ébranlée par le scandale d’offrir le visage plus consensuel et moins sulfureux d’une femme végétarienne, à la chevelure argentée et à l’allure sportive qui affirme ne pas boire ni fumer et cultive un amour immodéré pour la mer. Armée de son anglais parfait et de sa maîtrise technique, elle parcourt le monde pour porter la bonne parole du FMI.

Les États-Unis occupent une place à part dans sa carrière. C’est là qu’elle part étudier pendant un an et c’est également outre-Atlantique, des années plus tard, qu’elle prendra la présidence du cabinet d’avocats Baker & McKenzie avant d’être remarquée par la droite française. Débauchée en 2005, elle deviendra en 2007 la première femme à diriger le ministère de l’Économie en France où elle signera un record de longévité en y restant jusqu’en 2011.

Son adaptation n’a pas été sans heurts. En 2005, pour sa première entrée dans un gouvernement au portefeuille du Commerce extérieur, elle juge le code du travail français “compliqué” et “lourd”. A la tête de l’Economie deux ans plus tard, en pleine flambée des prix des carburants, elle appelle les Français à “utiliser leur bicyclette”, contribuant à forger d’elle l’image d’une femme parfois en décalage avec la réalité quotidienne des gens.

Son arrivée à la tête du FMI n’aura pas totalement raison de son franc-parler. Elle provoquera ainsi un tollé en appelant au printemps 2012 les Grecs, essorés par les plans d’austérité, à payer tous “leurs impôts”. Mme Lagarde n’a pas non plus hésité à froisser ses anciens partenaires européens, malmenés par la crise de la dette, en appelant à recapitaliser leurs banques “d’urgence” ou en réclamant des solutions “durables” aux problèmes de la dette grecque. Elle s’est récemment chamaillée avec la Banque centrale européenne (BCE), en répétant qu’il existait un risque de déflation en Europe, alors que la BCE ne partageait pas cette analyse.

Mais même certains pays émergents, pourtant très remontés contre la surreprésentation des Occidentaux au sein du FMI, lui rendent hommage. Le fond de sa pensée économique reste toutefois difficile à cerner, d’autant qu’elle a dû accompagner le lent et tortueux aggiornamento du FMI sur l’austérité. Du temps où elle était ministre, ses détracteurs assuraient que la politique économique de la France était bien plus façonnée à la présidence qu’à son ministère. Discrète sur sa vie privée, Mme Lagarde s’est toutefois autorisée quelques détours vers les pages “people” des magazines en s’affichant avec son compagnon, Xavier Giocanti, un entrepreneur de Marseille.

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