Une vie sur cintres

© PG

Dans “La garde-robe”, Sébastien Ministru marie deux de ses passions: la chanson et la mode. Un deuxième roman moins léger qu’il n’y paraît.

Même s’il ne publie aujourd’hui que son deuxième texte, il y a des constantes observables dans l’univers romanesque du journaliste, chroniqueur et homme de théâtre Sébastien Ministru. Dans La garde-robe comme dans Apprendre à lire (2018) se déploie en effet le désir identique de s’élever socialement, de quitter un milieu dans lequel il est difficile, voire impossible, de se réaliser: celui d’une famille d’origine italienne vivant dans une petite ville minière dont l’horizon est bouché par de noirs terrils.

La garde-robe, c’est l’histoire de Vera di Pasquale, née Doriano, alias Vera Dor. Douée pour la mode, cette jeune femme a tourné le dos à sa famille à 18 ans et est devenue, presque malgré elle, vedette de la chanson dans les années 1970. Après deux albums qui ne trouvent pas leur public mais deviendront cultes, Vera quitte le show-biz et devient l’épouse de Renzo, qui l’aime mais pour lequel elle sert d’alibi parce qu’il préfère les hommes à une époque où il valait mieux le cacher.

Cette vie tumultueuse, Sébastien Ministru va la reconstituer après la mort de son héroïne par le biais de sa foisonnante garde-robe. Une garde-robe dans laquelle les deux nièces de la défunte, qui ne la connaissaient pas, vont devoir faire le tri. D’une nature espiègle, l’auteur brouille les pistes, mixe ses références et s’amuse à piéger le lecteur. D’abord parce qu’il l’emmène dans un récit décousu (un comble pour un livre qui traite de parures! ) mais seulement en apparence: Sébastien Ministru sait exactement où il va, composant un portrait à la manière d’un peintre impressionniste. Ensuite, parce que derrière l’apparente légèreté du propos, il nous parle aussi exil, violence familiale, viol, libération de la femme ou sida. Autant de sujets que le roman traite au passé mais qui restent malheureusement d’actualité…

SÉBASTIEN MINISTRU, LA GARDE-ROBE, GRASSET, 192 PAGES, 18 EUROS.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content