Entre roman et récit autobiographique, le Bruxellois Jean-Luc Outers nous replonge dans le calvaire de Sarajevo.
En 1994, à l’invitation de Reporters sans Frontières, Jean-Luc Outers participe à l’opération “Chaque jour pour Sarajevo”. On lui demande de réaliser un petit film et d’écrire un texte tiré de son expérience sur place. Voilà donc l’écrivain plongé pendant plusieurs jours dans la capitale de la Bosnie- Herzégovine assiégée par les forces serbes depuis deux ans. Une ville dont l’avenue Tito a été rebaptisée “Sniper Alley”. Une ville dont la bibliothèque nationale et universitaire est partie en fumée, emportant deux millions de livres et de documents. Une ville dont tous les arbres ont disparu dans des cheminées pour rendre l’hiver moins rude. Une ville dont les cimetières sont saturés, et où le son des conversations a été remplacé par celui des bombardements et des tirs incessants.
Sur place, les questions de Jean-Luc Outers sont à la fois celles d’un écrivain et d’un journaliste. Quel angle ou quel sujet “original” choisir pour rendre compte de la situation? Préoccupations triviales face au sort de ceux qui vivent dans la terreur, alors que lui sera bientôt de retour dans un pays en paix. Pourtant, comme il est écrit dans Hôtel de guerre : “Il n’y a que pour les morts que la guerre prend fin”. Pour tous les autres, et notamment les témoins comme lui, elle ne disparaît jamais de la mémoire.
Vingt-cinq plus tard, le Bruxellois est retourné dans cette ville pour tenter d’y retrouver les personnes croisées durant ce court séjour qui l’a durablement marqué. Si le mot “roman” est bel et bien écrit sur la couverture, Hôtel de guerre relève donc autant du récit autobiographique. Et toutes les questions que l’ouvrage soulève sont d’autant plus pertinentes qu’il suffit aujourd’hui de remplacer Sarajevo par Marioupol pour retrouver les mêmes décors de désolation, la même détresse des populations, la même folie des hommes.
Jean-Luc Outers, “Hôtel de guerre”, Gallimard, 192 pages, 18 euros.