Marché saturé et capitalisme d’addiction

AMID FALJAOUI, RÉDACTEUR EN CHEF DE TRENDS-TENDANCES

Barcelone était le lieu de rendez-vous cette semaine des opérateurs téléphoniques du monde entier. Mais la grand-messe mondiale de la mobilophonie a aussi servi de révélateur : le marché des smartphones est entré en phase de déclin. L’année 2018 a servi de déclic puisqu’elle s’est soldée par une baisse de 5% des ventes de smartphones au niveau mondial. Même la Chine a subi un recul de 11%. Et d’après les experts, il ne s’agit pas là d’un trou d’air momentané, mais d’une tendance lourde. La meilleure preuve en est la durée de détention des smartphones qui, elle, est en augmentation.

La faute à qui ? Mais à la lassitude ! En économie, on parle plutôt de marché arrivé à saturation, c’est plus chic. Et c’est effectivement le cas, aujourd’hui, deux personnes sur trois possèdent déjà un smartphone. Mais la lassitude des consommateurs ne tombe pas du ciel, elle est la résultante de deux phénomènes.

D’abord, le prix des smartphones qui ne fait que grimper. Le prix moyen a augmenté de 10% et les smartphones à plus de 1.000 euros sont aujourd’hui légion. Bien entendu, les fabricants tentent de justifier cette hausse des prix : tantôt parce que l’écran est plus grand, tantôt parce qu’il est plus design ou parce que la capacité de stockage est plus importante.

L’autre raison du manque d’appétit des consommateurs, c’est l’absence d’innovation dans le secteur des smartphones. Bien entendu, on pourrait citer le dernier smartphone pliable de Samsung, mais au-delà de l’exploit technologique, quel en sera l’usage ? Limité sans doute, et c’est d’ailleurs la raison pour laquelle Samsung le proposera à un prix avoisinant les 2.000 euros, ce qui prouve que ce marché du mobile pliable est un marché de niche.

Vu comme cela, il serait aisé de se dire que la messe est dite et que les fabricants de smartphones ont mangé leur pain blanc. Ce serait une erreur de le penser. L’exemple d’Apple est d’ailleurs là pour le confirmer. C’est vrai que la firme à la pomme vend du hardware. Et elle le vend bien et très cher, avec une belle marge de 40% sur chaque iPhone. Mais Apple vend aussi des services et de plus en plus de services. Via App Store, Apple Music ou Apple Pay pour n’en citer que quelques-uns. Or, sur ce segment, les marges sont encore plus juteuses (65%). Tim Cook, le patron, l’a bien compris : la clé de voûte pour Apple, c’est sa base d’utilisateurs. Plus cette base est importante, et plus Apple sera riche. Pour peu qu’e la société arrive à fidéliser sa base d’utilisateurs, elle pourra leur vendre cher et vilain de nombreux services forcément… indispensables. Enfin, c’est ce qu’on essaie de nous inculquer. Avec hélas beaucoup de succès jusqu’à présent. Bienvenue au capitalisme d’addiction !

Pour peu qu’Apple arrive à fidéliser sa base d’utilisateurs, elle pourra leur vendre cher et vilain de nombreux services forcément… indispensables.

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