Les Mangeurs d’argile

Un homme en cavale en Géorgie profonde. La richesse de la terre s’appelle ici le kaolin, l’argile blanche. ” Quand il était enfant, les gens disaient que seules les femmes nègres mangeaient de l’argile, et sa mère répondait avec un sourire narquois que les nègres blancs aussi en mangeaient. ” C’est à ce phénomène que Billy, notre fugitif, va assister en débarquant dans ces bois. Il y rencontre le jeune Jesse, 14 ans, à un triste tournant de la vie. Déjà orphelin de mère, l’adolescent vient de perdre son père, propriétaire terrien. Un stupide accident qui se révélera tout autre : la mort de Richie Pelham serait criminelle… Peter Farris ( Le Diable en personne) met en second plan l’intrigue policière pour faire converger les anges et démons des Etats-Unis contemporains : un Sud maltraité jamais remis de son passé raciste, une police locale corrompue dans ces bourgades frappées par la crise économique, un FBI à la limite de l’impuissance, des charlatans cupides manipulant les masses, des vétérans de guerre abandonnés à leurs stress post-traumatique… La violence paysanne et terrienne est ici magnifiée par une nature intacte, humide et habitée. Les écorchés de la vie s’y sentent protégés s’ils en maîtrisent les codes, ou menacés quand ils se décident à la défier. Bienveillant avec ses personnages même les moins recommandables, l’auteur américain, rockeur par ailleurs, teinte ce roman noir des couleurs chaudes et détrempées d’une fascinante Amérique des délaissés.

Peter Farris, ” Les Mangeurs d’argile “, éditions Gallmeister, 336 pages, 23 euros.

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