La société Polo Loco incarne la résilience de l’industrie belge

© photos: Franky Verdickt

L’industrie se remet beaucoup plus vite que prévu de la crise sanitaire. A Roulers, l’année écoulée a été la meilleure de l’histoire de Poco Loco. Le leader européen sur le marché des tortillas, chips, tacos et sauces “dip” est en pleine forme.

Une visite sur place suffit pour comprendre pourquoi l’entreprise Poco Loco construit une usine supplémentaire. Les 29 lignes de production de plusieurs dizaines de mètres de long ne laissent pas le moindre mètre carré inoccupé sur le site actuel. Les chips passent dans les tambours, de grands wraps sortent de convoyeurs…

Arnauld Demoulin (50 ans) ne s’est pas encore plaint un seul jour de son changement de carrière. Début septembre, en pleine pandémie, il est devenu administrateur délégué de Snack Food Poco Loco, une filiale du groupe agroalimentaire finlandais Paulig (lire l’encadré). Auparavant, ce Brabançon wallon a travaillé 23 ans chez les producteurs de couches Procter & Gamble, puis Ontex. Aujourd’hui, c’est avec des étincelles dans les yeux qu’il se promène le long des lignes de production où grésillent les chips. “Poco Loco est une chouette entreprise, sourit-il. C’est une combinaison du dynamisme ouest-flandrien avec des gens qui s’engagent sans retenue et d’un groupe finlandais à la mentalité scandinave qui privilégie la version à long terme. Vous ne trouverez jamais les valeurs de notre entreprise sur un tableau ou un ordinateur. Elles se vivent sur le terrain. Grandir ensemble, viser l’excellence, rester curieux.”

Un groupe familial finlandais

Le groupe agroalimentaire familial finlandais Paulig est né en 1876. En Finlande, il est surtout connu pour sa marque de café du même nom, leader sur le marché national. La marque tex-mex Santa Maria, avec notamment des herbes et des épices, est également vendue en Belgique. Poco Loco Roulers appartient à la division Marques de distributeurs, dirigée par Arnauld Demoulin. A ce titre, le Belge est également membre du comité de direction. Poco Loco est devenu le plus important contributeur au chiffre d’affaires du groupe l’an dernier. Paulig a enregistré un chiffre d’affaires consolidé de 919,5 millions d’euros, pour un bénéfice net de 67 millions. Sur les 2.160 collaborateurs, 31% travaillent en Belgique.

Marché de croissance

Le fait d’opérer sur un marché de croissance est évidemment utile. Paulig est le leader sur le marché européen de l’alimentation tex-mex. Son site roularien produit des tortillas, des chips, des tacos, des sauces dip ou encore des nachos. Poco Loco a été fondée en 1995 par deux compagnons d’étude ouest-flandriens, Patrick Maselis et Gerard De Brabandere. Ils l’ont vendue au groupe finlandais Paulig en 2010.

“Notre chiffre d’affaires a grossi en moyenne de 6,1% par an ces dernières années, se réjouit Arnauld Demoulin. Le marché de l’alimentation tex-mex enregistre une croissance de 5 à 8% par an en Europe occidentale. Il n’y a qu’en Scandinavie et au Royaume-Uni où la croissance est légèrement plus faible: 2 à 3% par an.”

Pourtant, tout n’a pas été facile pour Poco Loco. Le chiffre d’affaires et les effectifs ont progressé beaucoup plus rapidement que les bénéfices ces dernières années. “Ce n’est pas que notre famille de propriétaires finlandais Paulig soit particulièrement cupide, mais ils veulent que les marges justifient les investissements. Une nouvelle ligne de production coûte rapidement 10 millions d’euros. Nous avons mené des discussions difficiles avec plusieurs clients l’an dernier. Dans les conditions en vigueur, il n’y avait plus aucun sens à poursuivre notre collaboration.”

La société Polo Loco incarne la résilience de l'industrie belge
© photos: Franky Verdickt

“Opération Août”, tel est le nom de code de la nouvelle stratégie qui doit accroître la rentabilité. Le bénéfice a enfin augmenté plus rapidement que le chiffre d’affaires 2020. L’année du corona a ainsi été la meilleure de l’histoire de l’entreprise… et Poco Loco est devenue la division la plus importante du groupe.

Ce succès est en partie la conséquence de la hausse générale des ventes en magasin. Quand la pandémie a provoqué la suspension de la vie en société, le consommateur a accru ses dépenses pour son domicile. Poco Loco produit aussi des marques de distributeurs pour les chaînes de supermarchés les plus connues d’Europe occidentale, apportant 60% de son chiffre d’affaires. Les liens avec les grandes surfaces ont été renouvelés l’an dernier. “Nous voulons participer à la construction des marques de distributeurs afin qu’elles puissent se positionner pleinement, explique Arnauld Demoulin. Nous voulons aussi déterminer avec le client le type de tortilla ou la saveur du snack dont il a besoin, et mieux faire connaître les souhaits du consommateur.”

Nouvelle usine

Ce consommateur, par exemple, achète plus souvent des wraps. C’est pourquoi Poco Loco construit une nouvelle usine parallèlement à l’usine existante – un investissement de 45 millions d’euros. Elle y installera trois lignes de production. C’est le plus gros investissement jamais consenti par Paulig en dehors de la Finlande. “La nouvelle usine ouvrira ses portes en avril, annonce Arnauld Demoulin. Elle sera neutre en termes de CO2. Paulig veut réduire ses émissions de 80% pour 2030 mais nous recherchons encore des solutions pour certains éléments. Poco Loco n’utilise pas encore de plastique recyclé, par exemple. Pour ce faire, nous devrions remplacer toutes nos lignes de production.”

ARNAULD DEMOULIN
ARNAULD DEMOULIN “Poco Loco est une combinaison de dynamisme ouest-flandrien et de vision à long terme finlandaise.”

Exercice tout aussi complexe: la quête de personnel. En 2012, Poco Loco comptait 370 collaborateurs. Aujourd’hui, ils sont 730. Et ce, dans une région où règne presque le plein emploi. “Nous sommes à nouveau à la recherche d’au moins 100 personnes dans l’année, explique Arnauld Demoulin. Jusqu’à 50 personnes pour la nouvelle usine et 50 autres pour l’usine existante. Cette dernière tourne 24 heures sur 24. Nous pouvons également élargir l’équipe du week-end. Ce n’est pas facile. Un opérateur a droit à une formation de six à neuf mois. La formation d’un bon technicien dure encore un peu plus longtemps.” Ce défi se remarque aussi dans l’évolution des langues utilisées sur le site. En 2016, c’était uniquement le néerlandais. Aujourd’hui, le français et l’anglais s’y sont ajoutés…

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