Des lettres de grands écrivains à envoyer

Virginia Woolf, " Tout ce que je vous dois : Lettres à ses amies ", éditions L'Orma, 64 pages, 7,95 euros.

On peut dire qu’ils tombent à pic. Les nouveaux livres des éditions franco- italiennes L’Orma représentent un projet littéraire original et un beau cadeau à (se) faire en période de distanciation sociale. Vous allez comprendre… La collection s’appelle ” Les Plis “, elle regroupe pour l’heure six titres de Virginia Woolf, Jane Austen, Fernando Pessoa, Voltaire, Giacomo Leopardi et Stendhal. Tous les six sont des compilations de correspondance… à faire circuler !

Des livres faits pour être offerts

Ainsi, on découvre des Lettres de pensée et de désir envoyées par Stendhal à sa soeur qui nous montre l’auteur de La Chartreuse de Parme sous un visage léger et enjoué par l’Italie, par l’art, par l’émancipation des femmes. Dans les Lettres sur le bonheur que l’immense écrivain italien Leopardi adresse à ses frères et neveux, il est question de désir de vie et de liberté. Il y a aussi les Lettres de mon ailleurs regroupant des mots adressés par Pessoa, l’écrivain portugais aux multiples hétéronymes et auteur du chef-d’oeuvre éternel Le Livre de l’intranquillité, à ses amis et pairs poètes, ainsi que ses lettres devenues célèbres adressées à Ofélia Queiroz, l’éternelle fiancée.

Plus on écrit, meilleur on devient.

Censée être lancée dans le monde francophone le 19 mars, la collection a subi de plein fouet la crise du Covid-19 à laquelle elle répond pourtant avec malice. Car les petits ouvrages à présent disponibles, tous de 64 pages et revenant à 7,95 euros, sont au format ” carte postale ” et vendus avec une enveloppe dont le système de plis (d’où le nom) permet de les affranchir pour les envoyer à ses proches. A défaut de pouvoir les voir, voici un joli présent à leur adresser. ” C’est la tristesse de nos boîtes aux lettres depuis quelques années qui nous a donné l’idée des Plis, expliquait sur la radio suisse RTS l’éditeur italien Lorenzo Flabbi, cofondateur de L’Orma. Dans nos boîtes individuelles, que des factures à payer. On se disait : qu’est-ce que ce serait beau de recevoir de la poésie, de la littérature. ” Déjà publiés en Italie où une trentaine de titres sont disponibles, les Plis y remportent un beau succès, assure l’éditeur.

” La mission culturelle derrière la collection est aussi de casser les stéréotypes figés sur les grands auteurs “, continue Lorenzo Flabbi. Ainsi Leopardi, dont la réputation est d’être un auteur triste, est ici réhabilité en tant que figure inspirante sur la notion de bonheur dont il parle dans de nombreuses lettres. La volonté de casser les conventions, la quête de liberté et l’ouverture d’esprit sont les fils rouges que l’on retrouve dans l’ensemble des six ” Plis ” : ” Ces écrivains ont mis dans leurs lettres toute une partie de leur art et de leurs pensées. Ils utilisaient les moyens épistolaires comme une sorte de prolongement de leurs ouvrages “, analyse Lorenzo Flabbi.

Une Virginia Woolf virevoltante

Parmi ces six livres ” prêts-à-envoyer “, ce sont les Lettres à ses amies de Virginia Woolf qui ont plus particulièrement attiré notre attention, ” d’une intelligence extrême ” remarque Lorenzo Flabbi. On retrouve là l’auteure d’ Une chambre à soi plus passionnée que jamais, brassant dans un même mouvement les grands thèmes de son époque. Ici en décembre 1939 : ” On m’a demandé de donner des conférences à la Cambridge English Society, mais j’ai répété maintes fois que les conférences étaient de fichues choses, et également que les femmes devraient refuser de prendre la parole à Cambridge tant que cette institution n’accomplit pas son devoir en les faisant membres de l’université – mais à quoi bon protester ? Avec cette guerre en cours… Néanmoins je suis chaque jour plus convaincue que nous nous devons de capturer Hitler dans sa tanière et de l’enferrer, fût-ce avec la pointe d’un vieux stylo à plume. ”

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