Des millions d’ordinateurs concernés: une faille dans les micro-processeurs inquiète les spécialistes

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Des fabricants de micro-processeurs – le composant qui fait tourner les ordinateurs et autres appareils électroniques – ont reconnu mercredi qu’ils pouvaient être vulnérables à une faille de sécurité mais se sont attachés à minimiser les risques de piratage.

Selon un site spécialisé britannique, les puces du géant américain Intel présentent un important problème de sécurité du à un défaut dans la conception même du produit.

Potentiellement, cela pourrait permettre à des pirates de prendre le contrôle d’un ordinateur et d’accéder aux données (mots de passe, numéros de cartes bancaires etc.) qui y sont conservées, affirment le média ainsi que de nombreux experts en cybersécurité.

Ces affirmations ont fait dégringoler le titre Intel en Bourse (-3,40% à la clôture de Wall Street). Son patron, Brian Kraznich, a affirmé sur la chaîne CNBC que le souci touchait tous les micro-processeurs modernes et pas seulement ceux de son groupe.

Selon M. Kraznich, Intel est au courant “depuis quelques temps” du problème après des recherches effectuées par des experts en sécurité de Google. “Des acteurs malveillants” pourraient certes accéder aux informations de l’ordinateur, reconnaît Intel, mais au travers de procédés techniquement très complexes, rendant extrêmement difficile son exploitation par des pirates.

Intel indique qu’il avait l’intention de révéler le problème la semaine prochaine, en même temps que d’autres entreprises concernées.

Il est courant que les entreprises informées d’un risque de piratage mettent au point des correctifs de sécurité (“patches”) et préviennent leurs clients avant de rendre publique la faille, de façon à avoir une longueur d’avance sur les “hackers”.

Mais devant l’ampleur des inquiétudes relayées dans la presse et par des experts en cybersécurité, le groupe a choisi de communiquer plus tôt que prévu, de même que Google.

Ce dernier a confirmé sur son blog avoir découvert “de graves failles de sécurité (…) permettant de lire les mots de passe ou les clés de cryptage” sur des appareils comportant des puces de marques Intel, AMD et ARM. Google précise en avoir informé les trois entreprises le 1er juin 2017.

Si la faille peut effectivement permettre à des pirates d’accéder à des informations sensibles, Intel affirme qu’elle ne permet cependant “pas de corrompre, modifier ou effacer des informations” stockées dans l’ordinateur. L’entreprise ajoute ne pas avoir connaissance de tentatives d’utilisation de cette faille par des pirates.

Faille complexe

Le groupe a précisé avoir déjà commencé à diffuser des mises à jour de sécurité “pour atténuer ces failles”. Mais il nie avec vigueur tout défaut de conception ou dysfonctionnement dans la mesure où, selon les termes de Brian Kraznich, “le système fonctionne comme il doit fonctionner”.

ARM a confirmé à l’AFP travailler avec Intel et AMD à la résolution du problème, qui dans certains cas et pour certains modèles de puces seulement, pourrait “au pire” permettre l’accès “à de petites quantités d’informations”.

Google a aussi indiqué avoir commencé à protéger ses systèmes et incite ses utilisateurs à procéder aux dernières mises à jour de sécurité.

Interrogé par l’AFP, Microsoft a dit “être en train de déployer des protections pour ses services d’informatique dématérialisée” (“cloud”) et commence à “diffuser aujourd’hui des mises à jour de sécurité pour protéger (ses) clients”.

Selon l’analyste indépendant Jack Gold, qui a participé mercredi à une conférence téléphonique organisée par Intel, AMD et ARM sur le sujet, les inquiétudes sont exagérées.

“Des chercheurs ont trouvé un moyen d’utiliser l’architecture (informatique) telle qu’elle existe pour accéder à des recoins protégés de la mémoire de l’ordinateur et lire certaines informations”, a-t-il détaillé. Mais, affirme-t-il, “ce n’est pas quelque chose que le premier venu peut arriver à faire”.

Intel a également démenti que les correctifs de sécurité ralentissent considérablement les systèmes comme l’affirme la presse spécialisée.

Reste que le souci est préoccupant, s’attachent à dire les experts en sécurité. Ils estiment indispensable que tous les systèmes informatiques et tous les fournisseurs de “cloud” mettent en place les correctifs.

La nature complexe de la faille exige davantage qu’une simple mise à jour, expliquent-ils aussi: les entreprises devront redémarrer leurs systèmes pour appliquer le “patch” entraînant une possible interruption des services dans l’intervalle.

“Inévitablement, certaines petites entreprises vont se retrouver perturbées par le processus”, estime Graham Cluley, expert en cybersécurité qui anime un blog sur ce thème.

Autre problème, explique Gérôme Billois, expert cybersécurité au cabinet Wavestone: si ces correctifs permettent de combler la faille à court terme, seul le renouvellement des appareils permettra aux entreprises concernées de se prémunir durablement.

Le secteur cherche à rassurer

De nombreuses entreprises technologiques ont continué jeudi à diffuser des correctifs de sécurité pour tenter d’atténuer les inquiétudes nées de la révélation de failles de sécurité touchant la quasi totalité des micro-processeurs équipant ordinateurs et smartphones.

Le groupe américain Intel ainsi que ses concurrents AMD et ARM ont indiqué mercredi qu’un grand nombre de modèles de micro-processeurs -la pièce qui fait tourner serveurs informatiques, ordinateurs et téléphones portables-, pouvaient potentiellement être piratés et permettre l’accès à des informations stockées sur l’appareil ou le serveur, comme les mots de passe ou des clés de cryptage.

Des failles confirmées par l’agence américaine en charge de la cybersécurité (CERT), qui a également indiqué “ne pas avoir connaissance” de tentatives de piratage utilisant ces failles, baptisées “Spectre” et “Meltdown” (“fusion”), découvertes par des experts en sécurité informatique de Google.

Intel, ARM et AMD, ainsi que d’autres entreprises technologiques comme Microsoft, Amazon, Google ou Mozilla ont commencé à diffuser correctifs et mises à jour de sécurité pour limiter le problème.

A son tour, le groupe Apple a confirmé jeudi soir être concerné par ces failles.

“Tous les systèmes Mac et appareils (mobiles) iOS sont affectés mais il n’y a aucune attaque connue à l’heure actuelle”, a fait savoir la firme à la Pomme sur son blog officiel.

Pour éviter toute possibilité de piratage, Apple “conseille de ne télécharger des applications que depuis des sites sûrs, comme l’App Store”, a poursuivi le groupe, qui précise avoir diffusé des correctifs pour limiter l’impact possible de la faille “Meltdown” et en annonce d’autres prochainement.

Dans un nouveau communiqué diffusé jeudi, Intel a affirmé qu’il aurait d’ici la fin de la semaine prochaine “diffusé des mises à jour pour plus de 90% de ses processeurs sortis ces cinq dernières années”.

Malgré cela, le titre a encore perdu près de 2% jeudi après avoir déjà clôturé en repli de 3,40% la veille.

Les inquiétudes viennent du fait que l’écrasante majorité des appareils électroniques et informatiques fabriqués ces dernières années dans le monde est équipée de puces de ce type.

Selon certains experts, au sujet de la faille touchant la puce elle-même, seul son remplacement par un micro-processeur conçu différemment permettrait de se prémunir durablement, une perspective lourde de conséquences pour tout le secteur.

Ceci étant, expliquent-ils également, un piratage de ces processeurs exige un niveau technique très élevé, limitant selon eux les risques.

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