2011, l’année de tous les dangers pour le BlackBerry

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Un cours de Bourse en chute, des concurrents agressifs, un nouveau système d’exploitation, une première tablette : les défis que doit relever RIM, le fabricant du BlackBerry, sont nombreux.

Le fabricant du BlackBerry est-il au bord du précipice ? La question peut sembler curieuse alors que Research In Motion (RIM) a publié, la semaine dernière, des résultats supérieurs aux attentes, avec un bénéfice en hausse de 45 % sur un an, à 911 millions de dollars, pour un chiffre d’affaires record de 5,5 milliards, en progression de 60 %.

L’équipementier télécoms a conquis 5 millions de nouveaux clients pour porter le nombre total d’utilisateurs de BlackBerry à 55 millions. Des performances qui ont permis à RIM de porter ses réserves de cash à 2,5 milliards de dollars. Pas vraiment le portrait d’une entreprise proche de la faillite.

Ces bons résultats n’ont pourtant pas fondamentalement changé l’état d’esprit des observateurs. Sur 41 avis d’analystes compilés par Alacra Pulse, 20 sont positifs, recommandant l’action à l’achat, 8 sont négatifs et 13 sont neutres. Une majorité d’avis positifs qu’il faut relativiser car le titre RIM accuse encore une baisse de 17 % depuis le début de l’année. Alors qu’un équipementier comme Motorola, longtemps en difficulté, a vu son cours bondir de 18 %.

RIM paie le prix de ses échecs à conquérir le marché grand public, qu’il s’agisse du Storm, lancé l’année dernière, et même du Torch, cet été. C’est surtout vrai aux Etats-Unis, où sa part de marché a fondu de 20 % en un an. “RIM tente de copier l’iPhone avec un système archaïque, qu’il vient à peine d’équiper d’un navigateur Web décent, et leur technologie tactile ne fonctionne tout simplement pas”, explique l’analyste Rob Enderle. A l’inverse, l’iPhone et les téléphones Google Android envahissent les entreprises, le principal marché du BlackBerry.

Résultat : si les ventes de RIM augmentent fortement grâce aux efforts d’expansion en dehors du continent américain, elles peinent à suivre le rythme de ses concurrents. Le groupe canadien a été pour la première fois dépassé par Apple au troisième trimestre. Et il devrait voir celui-ci écouler 16 millions d’appareils quand lui-même en vendra 14 millions. Gartner accorde à sa plateforme une part de marché des smartphones de 14,8 %, contre 20,7 % l’année dernière. Apple et Android sont devant lui, avec respectivement 16,7 % et 25,5 % des appareils vendus.

2011 apparaît donc bien comme l’année de tous les dangers pour RIM. Une partie de son avenir se joue avec le lancement de sa tablette PlayBook, prévu pour le premier trimestre. Avec elle, le roupe canadien espère contrer les progrès de l’iPad en entreprise.

Problème : le fabricant aura alors trois plateformes logicielles à son catalogue. BBOS, qui équipe tous ses anciens smartphones, la nouvelle génération (BBOS6) qui ne fonctionne que sur certains appareils comme le récent BlackBerry Torch, et QNX pour sa future tablette. Le système d’exploitation de demain, selon RIM. “A terme, tous les Blackberry seront sur QNX”, confirme Mike Lazaradis, coprésident de l’entreprise.

Cette transition prendra toutefois du temps, ce qui ne favorisera pas le développement de nouvelles applications. Or, le BlackBerry accuse un retard énorme sur ce critère devenu crucial pour les acheteurs de smarpthones. Sa bibliothèque ne compte que 15.000 applications aujourd’hui, contre 200.000 pour Android et plus de 300.000 pour l’iPhone. “Les développeurs ont déjà leur main pleine avec iOS et Android, et attendront de voir qui de RIM, Microsoft, Palm ou Nokia occupera la troisième et dernière marche du podium”, estime Rob Enderle.

Le lancement de la nouvelle architecture matérielle QNX, développée pour le PlayBook, représente d’ailleurs un défi technologique en soi. “QNX nous permettra d’utiliser les processeurs multi-coeurs dans nos futurs produits, précise le coprésident de RIM à L’Expansion.com. Alors que tous les autres essaient de construire une tablette à partir d’un téléphone, nous ferons l’inverse.”

Une démarche qui ne convainc pas tous les experts : “Je ne vois pas l’avantage de redévelopper encore un autre Unix pour mobile, Android est très bien pour cela, rétorque Rob Enderle. Quant aux puces multi-coeurs dans les téléphones, ARM en a déjà fait la démonstration voici 2 ans. Tout le monde en aura en 2011… sauf peut-être RIM !”

Le groupe canadien est toutefois conscient de ses lacunes. Il a ainsi acquis cette année TAT, spécialiste suédois de l’interface graphique pour écran tactile, et le distributeur d’applications Cellmania. Reste à intégrer ces nouvelles technologies, stratégiques pour l’avenir du secteur. En cas d’échec, RIM pourra toujours considérer un rapprochement avec Nokia, l’autre fabricant de téléphones en perte de vitesse.

Jean-Baptiste Su (dans la Silicon Valley), L’Expansion.com

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