Procès Arco : la défense de Francine Swiggers dénonce que sa cliente soit un “bouc-émissaire”
La défense de Francine Swiggers, ancienne dirigeante d’Arco, a dénoncé vendredi devant le tribunal néerlandophone de l’entreprise de Bruxelles que sa cliente était la bouc-émissaire de la débâcle autour de ce bras financier du mouvement ouvrier chrétien. Elle est la seule personne physique à devoir répondre devant le tribunal de la perte d’un investissement total d’environ 1,5 milliard d’euros, réparti entre quelque 800.000 coopérateurs d’Arco.
“Quand les choses tournent mal, nous avons tendance, en tant que société, à chercher un bouc-émissaire. C’est ce qui se passe avec madame Swiggers, en tant que responsable de la chair et du sang. Elle est impliquée à tort”, a plaidé l’avocate de la défense, Me Eline Tritsmans. “On fait comme si elle était seule aux commandes, non seulement chez Arco mais aussi chez Dexia”, a-t-elle dénoncé.
Pour l’avocate, plusieurs éléments vont en faveur de sa cliente. En premier lieu et surtout, la chronologie : “la plus grande partie de la tromperie s’est déroulée, selon les plaignants, entre 1995 et 2000, mais Mme Swiggers n’était alors pas encore présidente du groupe“.
Me Tritsmans a aussi fait référence au fait que l’assignation personnelle de Francine Swiggers a eu lieu le 10 mars 2015, six mois seulement après la convocation des sociétés Arco. “Cela semble être une décision stratégique, par laquelle Deminor a une nouvelle fois attiré l’attention de la presse”, a estimé la défense.
L’avocate a souligné en outre que toutes les décisions avaient été prises collégialement, par le conseil d’administration. “Tous les administrateurs de ces trente dernières années chez Arco auraient donc dû être ici.” Elle s’est également référée à la jurisprudence de la Cour de Cassation en termes de responsabilité individuelle des administrateurs et administratrices.
Le fait que Mme Swiggers soit soupçonnée d’avoir falsifié les comptes annuels d’Arco est “grotesque”, selon l’avocate. “Cette infraction lui est imputée individuellement alors que les comptes annuels ont été approuvés par l’ensemble du conseil d’administration, ainsi que par le réviseur d’entreprise et l’assemblée générale.”
Le plaignant Deminor avait aussi cité un rapport de l’Analysis Group, dans lequel la valorisation de l’action de Dexia dans les comptes annuels d’Arco était remise en cause. Pendant des années, Dexia n’a pas été valorisée au cours de l’action mais à la valeur liquidative (supérieure) indiquée dans le rapport annuel de la banque. “Mais c’est tout à fait conforme à la législation comptable belge, c’est même indiqué dans le rapport de l’Analysis Group“, a rétorqué Me Tritsmans. Elle a évoqué le fait que d’autres sociétés telles que le Holding communal ou KBC Ancora l’ont fait ou le font encore.
Dans sa plaidoirie, Deminor a aussi critiqué la communication de Mme Swiggers, par exemple dans le magazine “Visie” du mouvement ouvrier chrétien flamand. Mais pour la défense, la communication de sa cliente n’était pas trompeuse. Les comptes annuels d’Arco et les prospectus étaient, selon Me Tritsmans, toujours clairs et entièrement transparents quant aux risques associés à une action d’Arco. “Si ça se retrouve dans les comptes annuels, comment peut-on prétendre qu’ils sont falsifiés ?”, a interrogé l’avocate.
“Madame Swiggers a été accusée d’être restée positive mais cela montre juste de la persévérance. Aurait-elle dû quitter le navire et semer la panique en 2008 ? Je doute fortement que les coopérateurs auraient récupéré leur argent ainsi”, a conclu Me Tritsmans. “En revanche, il y avait un plan de relance crédible pour Dexia, approuvé par la Commission européenne. Personne n’aurait pu prédire la crise de la dette dans la zone euro, Mme Swiggers non plus. Elle a agi avec les meilleures intentions. Elle a été très profondément touchée par la chute d’Arco car elle a perdu une partie de sa carrière.”
Francine Swiggers n’était pas personnellement présente au procès vendredi.