Pourquoi Base n’intéresse personne

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Mis à l’étalage par sa maison-mère KPN, l’opérateur mobile ne sera finalement pas vendu. Explications.

Le troisième opérateur du pays ne changera pas de mains. Le processus de mise en vente, officialisé en juin, s’est brutalement arrêté le 15 août dernier. “Les offres non contraignantes [reçues par l’entreprise] ne reflètent pas la position et les perspectives solides de Base”, estime le câblo-opérateur néerlandais KPN au sujet de sa filiale mobile en Belgique. En clair : les enchères se sont avérées trop basses. La maison-mère espérait environ 1,7 milliard d’euros. Personne n’a voulu débourser une telle somme, jugée trop élevée par de nombreux analystes. “KPN visait un montant équivalent à cinq ou six fois le résultat d’exploitation. C’est beaucoup si l’on compare par exemple à Mobistar, dont la valeur est estimée à quatre fois le résultat d’exploitation”, explique Emmanuel Carlier, analyste chez ING et spécialiste du secteur télécoms.

Le plantage de cette transaction est un camouflet pour Eelco Blok, le CEO de KPN. Celui-ci espérait donner un peu d’oxygène à son entreprise en cédant à bon prix une filiale à la rentabilité éprouvée. Confrontée sur le marché néerlandais à une concurrence féroce, qui lui a fait perdre des parts de marché et l’a contrainte à programmer d’importantes réductions d’effectifs, KPN a besoin de cash pour se consolider. Sa fragilité en a fait une proie de choix pour le milliardaire mexicain Carlos Slim, dont le groupe América Móvil détient depuis peu 28 % de KPN à la suite d’une OPA hostile. Le bras de fer entre Eelco Blok et son actionnaire sud-américain ne serait pas étranger à l’échec de la vente de Base. “Le rapport de force a tourné à l’avantage de Carlos Slim, analyse une source bien informée aux Pays-Bas. Eelco Blok voulait vendre Base pour remédier à la situation financière délicate de KPN. Mais il ne pouvait pas non plus brader sa filiale. De son côté, Carlos Slim préférait conserver Base dans le giron de KPN, considérant que la filiale belge avait encore du potentiel.”

Peu de candidats au rachat

Après de longues semaines d’atermoiements, tous les acquéreurs pressentis ont donc plié bagage. Telenet, qui opère surtout au nord du pays, a annoncé officiellement qu’il renonçait à l’acquisition de Base. Actif dans la téléphonie fixe, l’Internet et la télévision, le câblo-opérateur aurait pu faire main basse sur un réseau de téléphonie mobile en achetant Base. Mais certains doutent de la volonté réelle de Telenet de se lancer dans le mobile, une activité qui ne fait pas partie du core-business de son actionnaire majoritaire Liberty Global. “Telenet n’a jamais eu l’intention d’acheter Base. En tout cas pas en solo”, tranche Emmanuel Carlier (ING).

Pour faire offre, Telenet aurait sans doute été contraint de s’associer avec des fonds de private equity. Mais ceux-ci n’étaient certainement pas prêts non plus à payer le prix fort pour acquérir Base. Le retour sur investissement n’est en effet pas garanti dans un marché de la téléphonie mobile arrivé à maturité et touché par la baisse des revenus sur les communications vocales. Sans oublier qu’acheter Base implique de réaliser des investissements lourds dans le réseau mobile, notamment dans le nouveau standard 4G, afin de suivre l’explosion de la consommation de données sur smartphones et tablettes.

Ni le câblo wallon Voo, ni l’opérateur low-cost français Free, ni l’éditeur De Persgroep, évoqués comme candidats potentiels au rachat, n’ont déposé d’offre satisfaisante pour KPN. Au final, Base ne semble pas intéresser grand-monde. Peut-être le groupe hollandais remettra-t-il un jour sa filiale en vente. Mais, d’après les interlocuteurs que nous avons contactés, pas avant quelques années.

Gilles Quoistiaux

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