Plongée au coeur du Virtual Park de Mouscron, ou quand le virtuel devient réalité

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Le plus grand parc de réalité virtuelle d’Europe vient de brancher ses ordinateurs et ses casques à Mouscron. Virtual Park propose six attractions dans un espace de 4.000 m2. Ses fondateurs belges espèrent également en faire un incubateur d’entreprises dédié à cette technologie de pointe.

C’était dans l’air, c’est devenu réalité. Un parc de loisirs entièrement consacré à la réalité virtuelle (VR) et augmentée (AR) a ouvert ses portes à Mouscron début du mois. Conquête de Mars, courses de motos, combats de robots, etc. Au total, ce ne sont pas moins de six attractions qui doivent permettre au public de Virtual Park de découvrir les multiples facettes de cette technologie. Le tout dans un espace de 4.000 m2, de quoi s’imposer comme le plus grand parc du genre en Europe et rivaliser avec les plus gros acteurs mondiaux, comme The Void aux Etats-Unis ou VR Park à Dubaï. Et les ambitions de ses fondateurs, les frères Jean-Louis et Frédéric Verbaert, sont à la hauteur du gigantisme de leur projet puisqu’ils visent 65.000 visiteurs dès la première année d’exploitation et espèrent être rentables dans les deux ou trois ans.

Virtual Park vise 65.000 visiteurs dès la première année d’exploitation et espère être rentable dans les deux ou trois ans.

Pour atteindre ces objectifs, les frères Verbaert misent sur une technologie à la pointe, une expertise et un accompagnement de qualité, ainsi que des prix très compétitifs par rapport à la concurrence. ” Au niveau technologique, nous sommes, par exemple, les seuls à proposer, avec notre jeu Arena 42, une expérience en full-body tracking grâce à la technologie Optitrack 100% wireless. Les moindres mouvements des joueurs sont repérés par un ensemble de 54 caméras qui les retransmettent dans l’espace virtuel, explique Jean-Louis Verbaert. Un petit studio français, SmartVR Studio, avec son expertise 3D, est notre partenaire software principal pour développer l’aspect ludique et nous, nous adaptons cela au hardware. Mon frère et moi sommes avant tout des passionnés de la technique et savons exactement ce qui fonctionne ou pas. Beaucoup de nos concurrents sont de purs marketeurs qui ne savent pas du tout ce qu’est la VR. ” Pour accompagner le public, Virtual Park a embauché six employés fixes auxquels s’ajoutent plusieurs étudiants. Les jours d’affluence, ce sont jusqu’à 10 personnes qui sont présentes pour encadrer les visiteurs. ” Par ailleurs, nous sommes les seuls à ouvrir à la journée, alors que nos concurrents pratiquent des prix assez similaires, mais pour une session, voire une heure. ”

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Virtual Park limite pour l’instant le nombre de visiteurs à une centaine, mais il pourra, à terme, en accueillir jusqu’à 300 simultanément. ” Le plus simple est de réserver son ticket en ligne, conseille Jean-Louis Verbaert. On peut se présenter à l’entrée pour acheter sa place, mais si le quota est atteint, il faudra revenir… ” Une fois à l’intérieur, la visite se déroule comme dans n’importe quel parc de loisirs : on choisit son attraction et on fait la file. ” Comme nous limitons le nombre de visiteurs, l’attente est franchement raisonnable. En quatre heures, on a le temps de faire toutes les attractions, plusieurs fois. ”

C’est avec ces arguments que Virtual Park compte attirer à la fois un public familial, intéressé par les nouvelles technologies, et un public professionnel, au travers de team-building. ” Nous pensons qu’à terme, ce dernier marché constituera même 50% de notre activité “, précise l’entrepreneur.

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Virtual Cabs, l’embryon de Virtual Park

Ce n’est pourtant qu’il y a quatre ou cinq ans que l’aventure Virtual Park a commencé pour les frères Verbaert, avec l’achat d’un casque de réalité virtuelle. ” C’était encore quelque chose d’assez basique, mais nous avons trouvé cela extraordinaire ! se remémore Jean-Louis. Frédéric et moi y avons vu un véritable potentiel et nous sommes dit que le jour ou la technologie permettrait de se déplacer dans un monde virtuel, il faudrait la faire découvrir au grand public. ”

Ce jour est arrivé vers la fin de l’année 2016 avec l’ouverture de Virtual Cabs, une petite de salle de réalité virtuelle de 150 m2 dans le centre de Tournai, lancée avec un capital de 15.000 euros. ” Nous avons tout construit, configuré et décoré de nos mains. Nous avons mis tout l’investissement dans le matériel, les casques VR et les PC sac à dos. Ce que nous voulions, c’était mettre l’accent sur la découverte de cette technologie. Le reste, c’était du bricolage. En y repensant, c’était même vraiment ridicule comme déco. A se demander comment cela a pu fonctionner ( rires) ! ” Un euphémisme, puisque Virtual Cabs a été rentable dès la première année.

Fort de ce succès, le duo Verbaert a pu passer à la seconde partie de son projet. ” Dès le départ, Virtual Cabs était conçu comme un embryon pour tâter le marché, voir si les gens étaient mûrs et avaient envie de découvrir la VR. Nous avions déjà dans un coin de nos têtes l’idée un peu folle d’ouvrir un grand parc d’attractions VR “, se souvient Jean-Louis. Les frères se sont donc mis en quête de financements dès l’été 2017, business plan à l’appui. ” Nous avons expliqué aux banques et aux invests qu’ils pouvaient attendre nos chiffres de fin d’année mais qu’ils risquaient du coup de rater le train. ” Au total, les Verbaert ont réuni un peu plus d’un million d’euros pour leur projet, environ 80% issus de prêts bancaires ou de fonds d’investissement régionaux comme WapInvest (Wallonie picarde) et 20% venant de prêts privés. Le capital ainsi rassemblé leur a permis de conserver l’entièreté des parts de Virtual Cabs SPRL, l’entreprise créatrice et exploitante de Virtual Park, et d’entamer l’installation du parc à partir du mois d’août 2018. Pas de business angels et autres fonds spécialisés en start-up donc, ” des acteurs qui nous sollicitent, maintenant que tout est en place, pour tenter de devenir actionnaires minoritaires “.

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Mouscron, capitale virtuelle

Restait encore à trouver un bâtiment adéquat. Pas facile, puisqu’il fallait à la fois une très grande surface et pas de poutres de soutien, incompatibles avec l’utilisation de la VR. ” C’est l’intercommunale IEG qui nous l’a dénichée, à Mouscron, précise Jean-Louis Verbaert. Elle a acheté le bâtiment et nous l’a loué dans la foulée via un bail à long terme. Nous aurions pu nous installer un peu partout mais comme nous avions déjà tissé quelques liens et connaissances dans la région, c’était assez pratique. Et puis, nous avons vraiment senti un réel intérêt de la part de la ville et d’IEG. Ils nous ont fait sentir que nous n’étions pas qu’un numéro. C’est très motivant de travailler avec des gens intéressés par votre projet. Je ne suis pas persuadé que nous aurions été aussi bien accueillis à Bruxelles, par exemple. ”

La situation géographique de Mouscron a également pesé favorablement dans la balance. ” La ville est située à cinq minutes de la France et de la Flandre, une belle zone de chalandise, fait remarquer le patron. On le ressent d’ailleurs dans notre clientèle, qui doit bien être composée à 50% de néerlandophones. Et comme nous souhaitions de toute façon toucher un public international (France, Royaume-Uni, Luxembourg, Pays-Bas), nous occupons finalement une place assez centrale. ”

Frédéric et Jean-Louis VerbaertLes deux frères ont réuni un peu plus d'un million d'euros pour leur projet Virtual Park.
Frédéric et Jean-Louis VerbaertLes deux frères ont réuni un peu plus d’un million d’euros pour leur projet Virtual Park.© pg

De la VR faite maison

Enfin, ce n’est pas parce que Virtual Park vient à peine d’ouvrir ses portes que Jean-Louis et Frédéric Verbaert ne nourrissent pas déjà des projets de développement. A commencer par de nouvelles attractions. ” Nous avons encore 200 à 300 m2 de libres. Sans donner de détails, puisque les négociations sont en cours, nous envisageons deux ou trois projets qui pourraient remplir cette zone. Le tout est de trouver des partenariats intéressants qui font appel à d’autres technologies VR que celles que nous avons déjà mises en place. ”

” Dans le futur, nous allons également tenter d’attirer des profils de type ingénieur afin de créer une petite équipe et développer du software et du hardware en interne, précise encore Jean-Louis Verbaert. Mais dans un premier temps, nous fonctionnerons surtout avec des étudiants, en infographie, informatique, etc. des hautes écoles de la région. Ce serait dommage de toujours dépendre de boîtes externes alors que nous pourrions faire les choses chez nous et développer la VR en Wallonie. ”

Ce dernier point s’accorde parfaitement avec un autre axe d’évolution voulu par les créateurs de Virtual Park : la transformation des 600 m2 d’espace de bureaux disponibles en véritable incubateur de sociétés spécialisées dans la réalité virtuelle. ” Nous aimerions y accueillir des start-up de la VR, mettre des locaux à leur disposition, mais surtout notre matériel et notre infrastructure, autrement impayables pour des petites boîtes. Les jours comme le mardi, de 8 h à 18 h, le matériel est là et il est libre. Il s’agira d’une relation win-win, puisqu’en échange, nous négocierons un accès privilégié aux technologies ainsi développées. ” Qui dira encore que le virtuel n’est pas réel ?

L’attraction à la loupe : V-Race

Pour comprendre comment les frères Verbaert sont parvenus à monter Virtual Park en un temps chrono, avec des moyens relativement limités, attardons-nous avec Jean-Louis Verbaert sur la conception de V-Race, un jeu de course de motos futuriste inspiré du film Tron.

” Le module moto a été dessiné par mon frère et moi, avec des ingénieurs de mon autre entreprise, VW Automation. Nous avons envoyé les schémas à une société chinoise qui s’est chargée de mouler la coque et de nous fournir les vérins, les contrôleurs, etc.

Le développement du jeu vidéo a lui été confié à un studio japonais qui avait déjà développé un produit similaire pour un autre client. Pas besoin de réinventer la roue. Le software nous est cependant ouvert si nous souhaitons y apporter des développements par la suite.

Les casques, enfin, ont simplement été achetés à un fabricant réputé. Pour le matériel, nous sommes généralement de simples clients. Soit parce que les entreprises sont trop petites pour assumer des partenariats, soit par ce qu’elles sont beaucoup trop grandes. Prenez la marque Oculus par exemple. En fait, c’est Facebook. Et pour parvenir à négocier avec Facebook, il faut déjà être un très, très gros acteur.

Ce que nous avons fait et continuons à faire chez Virtual Park, c’est opérer la synthèse de plusieurs technologies. Voilà ce qu’est la VR à l’heure actuelle. Personne ne vend du clé sur porte… Pour l’instant, car nous y pensons pour le futur. ”

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