Début d’une réunion du CA de Renault pour remplacer Thierry Bolloré

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Nouvelle séquelle de l’affaire Carlos Ghosn, l’ex-PDG de Renault emporté par un scandale de malversations au Japon: le conseil d’administration du constructeur automobile français s’apprêtait vendredi à écarter son dauphin Thierry Bolloré.

Le groupe au losange avait annoncé jeudi une réunion vendredi matin de son conseil d’administration “afin de se prononcer sur la gouvernance du groupe”.

L’AFP a appris vendredi vers 08H15, auprès d’une source proche de l’entreprise, que la réunion avait bien démarré peu auparavant au siège du groupe, à Boulogne-Billancourt au sud-ouest de Paris.

Le départ du directeur général est à l’ordre du jour: “L’enjeu, c’est de discuter de l’avenir de Thierry Bolloré”, a précisé jeudi à l’AFP une source proche du constructeur.

Une autre source au fait du dossier a été plus explicite: “Soit il démissionne, soit il est révoqué”. La date du départ doit être discutée, mais la recherche d’un remplaçant n’a pas encore été lancée, a indiqué cette source.

L’actuelle directrice financière de Renault, Clotilde Delbos, est favorite pour assurer l’intérim, a précisé vendredi matin à l’AFP une autre source proche de Renault.

Ce serait pour le constructeur une façon de tourner définitivement la page de l’ère Carlos Ghosn, son ancien PDG déchu, qui attend son procès au Japon où il a été mis en examen et assigné à résidence pour de multiples malversations présumées. M. Ghosn avait fait de Thierry Bolloré son successeur présomptif.

Dans un entretien publié par Les Échos dans son édition de vendredi, M. Bolloré a dénoncé “un coup de force inquiétant”. “La seule chose que l’on me reproche peut-être, c’est d’avoir été nommé directeur-général adjoint début 2018, sur proposition de Carlos Ghosn”, a-t-il estimé.

De son côté, l’Etat français, premier actionnaire de Renault avec 15% du capital, ne s’immiscera pas dans les choix de gouvernance du groupe, a affirmé mercredi le ministre de l’Economie et des Finances, Bruno Le Maire, disant “faire confiance” au président du groupe, Jean-Dominique Senard.

– “Aller au bout du renouvellement” –

“Ce qui compte aujourd’hui, c’est la stabilité de l’alliance (avec Nissan, NDLR), sa capacité à conquérir de nouveaux marchés” et à assurer la transition vers les véhicules électriques, a renchéri vendredi sur Public Sénat Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d’Etat aux Transports.

“Nous avons toute confiance en Jean-Dominique Senard pour proposer la stratégie adéquate”, a-t-il insisté.

Ce départ de Thierry Bolloré interviendrait alors qu’un renouvellement du management de Nissan, dont Renault détient 43%, a été décidé cette semaine pour écarter les principaux dirigeants de l’ère Ghosn — qui sont aussi ceux ayant dénoncé à la justice japonaise les errements présumés du dirigeant franco-libano-brésilien.

Un nouveau directeur général, Makoto Uchida, 53 ans, a été nommé mardi, en remplacement de Hiroto Saikawa.

Depuis l’éclatement de l’affaire Ghosn, les relations entre le management français et japonais étaient exécrables, menaçant la survie de l’alliance, qui inclut aussi Mitsubishi et est devenue l’an dernier le premier constructeur automobile mondial en nombre de voitures vendues.

Des voix s’élevaient au Japon pour réclamer la tête de M. Bolloré.

Mais au sein même de l’État français, on ne cachait pas la volonté de tourner la page: “La question d’aller au bout du renouvellement du management se pose”, déclarait cette semaine une source proche de l’État, sous couvert d’anonymat.

– “Performance pas satisfaisante” –

Lors de sa nomination en janvier comme président, Jean-Dominique Senard avait accepté de travailler avec M. Bolloré, confirmé simultanément à la direction exécutive. Il l’avait ensuite soutenu alors que des rumeurs annonçaient son possible départ.

Plusieurs sources familières du dossier ont cependant assuré que la décision de se séparer de M. Bolloré, attendue vendredi, était celle de M. Senard et de lui seul.

Une autre source proche affirme au contraire que la pression contre M. Bolloré venait de toutes parts. “C’est l’État qui est en train d’accélérer très fort pour que ça s’arrête vite”, affirme-t-elle. “Non seulement l’État, mais aussi les salariés, les managers de Renault, les partenaires japonais” réclamaient ce départ.

Un proche du groupe français mettait aussi en avant “la performance pas satisfaisante de l’entreprise” sous la direction de Thierry Bolloré, alors que les ventes et la rentabilité baissent cette année.

Ancien cadre de l’équipementier automobile français Faurecia, M. Bolloré, âgé de 55 ans, avait rejoint Renault en 2012, où il a gravi tous les échelons jusqu’à assurer l’intérim à la direction du groupe après l’arrestation de M. Ghosn en novembre 2018.

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