Corruption: 12 ans de prison requis contre l’héritier de Samsung

Lee Jae-Yong © Reuters

Le parquet sud-coréen a requis lundi 12 ans de réclusion à l’encontre de l’héritier de l’empire Samsung dans le vaste scandale de corruption à tiroirs qui a emporté l’ex-présidente Park Geun-Hye.

Lee Jae-Yong, vice-président de Samsung Electronics et fils du président du groupe Samsung, Lee Kun-Hee, est accusé d’avoir été “le bénéficiaire ultime” des délits commis à l’occasion de cette affaire.

Si les juges suivent les réquisitions du parquet, il s’agirait d’une des sentences les plus sévères jamais infligée à un patron de chaebol, ces énormes conglomérats qui dominent l’économie sud-coréenne.

M. Lee, 49 ans, et quatre autres cadres dirigeants de Samsung, qui pèse un cinquième du PIB sud-coréen, sont accusés d’avoir soudoyé la confidente de l’ombre de l’ex-présidente.

Ils sont soupçonnés d’avoir versé à Choi Soon-Sil des millions de dollars en échange de faveurs politiques, en particulier l’aval des autorités à une fusion controversée.

“Les prévenus entretenaient des liens rapprochés avec le pouvoir et cherchaient à obtenir des bénéfices personnels”, a dit le procureur.

M. Lee était le “bénéficiaire ultime” des délits commis lors de ce scandale, a-t-il martelé. Il est également poursuivi pour abus de biens sociaux et pour avoir caché des actifs à l’étranger.

Dix ans de réclusion ont été réclamés contre trois de ses co-prévenus et sept ans de prison contre le quatrième.

‘Nombreux défauts’

Depuis la crise cardiaque de son père en 2014, M. Lee dirige de fait le mastodonte dont le navire amiral, Samsung Electronics, est le premier fabricant mondial de smartphones.

L’héritier dément toute malversation.

“Une fois encore, je regrette profondément et je présente mes excuses pour avoir causé une énorme déception”, a-t-il dit dans sa dernière déclaration au tribunal.

M. Lee est en détention provisoire depuis six mois, période durant laquelle il a réalisé qu’il avait de “nombreux défauts” et qu’il y avait certaines choses qu’il avait “omis de superviser” en tant que capitaine d’industrie.

Mais, a-t-il martelé: “je n’ai jamais recherché les faveurs de la présidente à des fins personnelles”.

La semaine dernière, en prenant la parole pour se défendre pour la première fois à la barre, il avait affirmé qu’il ne jouait aucun rôle dans les prises de décisions du groupe Samsung et qu’il “écoutait la plupart du temps les autres cadres”.

La fusion en cause concerne deux unités de Samsung, Cheil Industries et C&T, réalisée en 2015 après avoir reçu le feu vert de la caisse nationale de retraites, un important actionnaire de Samsung.

Elle était considérée comme une étape clé pour la transition en douceur au sommet du groupe Samsung.

Cette opération avait été dénoncée par certains actionnaires emmenés par le fonds spéculatif américain Elliott, qui estimaient que C&T avait été délibérément sous-évaluée.

Relations malsaines

Samsung, le chaebol qui a versé les plus grosses sommes à des fondations contrôlées par l’amie de Mme Park, est aussi soupçonné d’avoir payé des millions d’euros, sous couvert de financer en Allemagne les entraînements sportifs de cavaliers sud-coréens, parmi lesquels la fille de la confidente.

Le jugement est attendu le 25 août.

Une porte-parole du groupe Samsung s’est refusée à tout commentaire sur ces réquisitions.

Malgré ce scandale et le fiasco du rappel planétaire de ses smartphones phare en 2016, l’action Samsung a grimpé régulièrement ces derniers mois, portée par l’ascension fulgurante de ses bénéfices.

Le titre Samsung a clôturé lundi en baisse de 0,25%.

Mme Park a été formellement destituée de ses fonctions en mars et est actuellement en procès.

Son amie de 40 ans, accusée de s’être servie de son influence pour se mêler des affaires de l’Etat en plus d’avoir soutiré 70 millions de dollars à des entreprises, est aussi en cours de jugement.

Une éventuelle condamnation de M. Lee porterait un coup à la défense de Mme Park.

Celle-ci est poursuivie pour 18 chefs, y compris coercition, abus de pouvoir et corruption. Elle est également accusée d’avoir permis à Mme Choi, qui n’avait aucune fonction officielle ni habilitation de sécurité, d’avoir eu son mot à dire dans les affaires du gouvernement.

Les accointances malsaines entre élites politique et économique ont été mises au jour par cette affaire. Les millions de Sud-Coréens qui étaient descendus dans la rue pour demander le départ de Mme Park réclamaient aussi l’arrestation des patrons de chaebols.

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