Chez les concessions automobiles, c’est le printemps des rabais pour faire revenir le client

Rabais, financement à 0 %, etc. Les concessions automobiles multiplient les offres pour écouler leurs stocks. © RVA

Après une longue période de diète commerciale, les concessions automobiles multiplient les promotions pour relancer les ventes et rentrer du cash. Certaines dépassent les 10.000 euros et 20% de réduction. Des primes publiques à l’achat pourraient suivre.

Les conditions salon seraient-elles de retour ? C’est le sentiment qui domine en lisant les offres des différents constructeurs, avec la réou- verture des concessions au grand public depuis le 11 mai. Renault annonce des réductions ” jusqu’à 8.400 euros ” et un crédit à 0%. Certaines marques premium, comme Mercedes, ne sont pas en reste. Peugeot annonce jusqu’à 8.600 euros d’avantages. Alfa Romeo va jusqu’à 11.930 euros, avec un crédit à 0 %. ” Les offres sont encore plus intéressantes que celles du Salon ” promet Dominique Fontignies, directeur de la communication de FCA Belgique (Fiat Chrysler Automobile).

” Le défi est d’écouler les stocks, maintenant que les usines ont redémarré, déclare Joost Kaesemans, porte-parole de la fédération des importateurs automobiles, la Febiac. Les chiffres montrent que le marché reprend du poil de la bête. ” Les immatriculations avaient reculé de 90% en avril puisqu’il n’y avait quasiment pas de possibilité de livrer. Maintenant, on est à -40%/-42% pour les premiers jours de mai. ”

Plexiglas et masques à volonté

Sur le plan sanitaire, le secteur a fait de grands efforts pour rassurer, déployant des plaques de plexiglas aux comptoirs, du marquage au sol, des procédures. ” Nous avons verouillé les voitures dans le showroom et les collaborateurs sont équipés de masques “, indique Gianni Nobile, directeur de CAR Avenue Ital, basé dans le Brabant wallon et la région de Liège pour les marques Toyota et Nissan. Ce n’est pas toujours simple mais ” les clients sont dans l’empathie et la compréhension “.

La générosité des remises dépendra du niveau des stocks chez l’importateur et le concessionnaire. ” Nous faisons des offres pour deux raisons, explique un concessionnaire de belles allemandes. D’abord nous devons optimiser la trésorerie. Ensuite, les usines ont été arrêtées, les délais de livraison vont s’allonger pour certains modèles, alors nous orientons le client vers les véhicules immédiatement disponibles. ”

Remises sur le stock

” Pour le Salon de l’Auto, nous avions commandé du stock “, indique Jean-Marc Ponteville, porte-parole de D’Ieteren Auto, premier importateur du pays avec les marques du groupe VW (VW, Audi, Skoda, Seat, Porsche, Lamborghini, etc.), qui possède des concessions. Il reste encore des modèles à vendre, d’où les conditions… ” D’une manière générale, avec le Salon, il y a plus de stock en Belgique qu’ailleurs “, observe Jean-Marc Ponteville. En précisant : ” Ce n’est pas dans les habitudes de la maison de brader les prix “. Elle propose tout de même la nouvelle Golf, vendue à partir de 26.490 euros, avec une remise de 2.250 euros plus une prime de recyclage de 1.500 euros si l’on apporte une voiture ancienne, même hors d’usage. Et des SUV Skoda avec des baisses plus fortes.

Gianni Nobile, directeur de CAR Avenue Ital:
Gianni Nobile, directeur de CAR Avenue Ital: “S’il y a un enseignement de la crise, c’est bien celui-ci : il y a du potentiel dans les relations numériques avec le client.”© RVA

Quand le stock est moindre, la tentation des grosses promotions recule. ” Nous ne ferons pas de grosses remises car nous n’avons pas beaucoup de modèles en réserve, déclare René Aerts, porte-parole de Volvo. La demande du SUV XC40, assemblé à Gand, est importante. ” Les promotions sur le site portent plutôt sur des accessoires (siège enfant, porte-vélo, etc.). BMW n’annonce pas de fortes promotions sur son site, mais une garantie portée à quatre ans. Certains concessionnaires se montrent toutefois très généreux. En cherchant bien, on trouve des BMW avec de belles remises (8.000 à 10.000 euros et plus) chez Ginion, par exemple (Wavre, Waterloo).

Option sanitaire

Le groupe FCA (Fiat Chrysler Automobile) mise sur des promotions appelées ” Ready for you ” (puisque le véhicule est de stock) que l’on retrouve dans les différentes marques, y compris Jeep. La maison a même ajouté une option sanitaire à toutes ses marques, un pack D-Fence, incluant un purificateur d’air HEPA, qui liquide les bactéries, et une lampe UV pour assainir les surfaces de l’habitacle (volant, changement de vitesse, etc.).

Le niveau des réductions dépendra des efforts faits par l’importateur. ” Les marges du concessionaire sont très limitées, donc les actions relèvent surtout des marques “, déclare Filip Rylant, porte-parole de Traxio, la fédération de la distribution et de la réparation automobile, du cycle et des accessoiristes.

Les concessionnaires peuvent aller plus loin, mais à leurs frais. ” Certains le font mais moi je ne vais pas vendre sans marge, surtout à un client qui vient de loin uniquement pour le prix et que je ne reverrai plus pour les entretiens “, indique un concessionnaire Jaguar Land Rover, ébranlé par certaines offres agressives de confrères.

Bon redémarrage pour l’utilitaire

Côté résultats, il est encore tôt pour voir si ces actions commerciales rétablissent le niveau ” normal ” des ventes. ” Cela reprend doucement “, estime Olivier Piret, qui dirige plusieurs concessions SAGA Piret Mercedes à Mons, La Louvière, Mons, Nivelles, Tournai et Saint-Ghislain. ” Nous avons pas mal de travail pour réaliser les livraisons suspendues par le confinement, mais au niveau des visites dans le showroom, c’est encore réduit. ” Mercedes fait des offres : ” Nous n’avons pas de financement à 0 % mais nous faisons une opération où les premières mensualités sont décalées de trois mois. C’est une action dans le cadre de la crise du Covid-19 “.

Chez CAR Avenue Ital, c’est plutôt l’optimisme. ” La crise aura un impact sur les ventes mais peut-être moindre qu’on l’imagine “, estime Gianni Nobile, qui vend des Toyota et des Nissan. Les utilitaires sont déjà bien demandés. ” Nous avons remarqué une dynamique sur ce marché. En particulier chez ceux qui ont vu leur business s’accélérer avec la crise, comme les livraisons à domicile pour les achats en ligne, ou les secteurs qui n’ont pas été immobilisés, comme la construction. ”

Assurance perte d’emploi

L’un des paris des concessionnaires est l’attrait supplémentaire des voitures face aux inquiétudes sanitaires sur l’usage des transports en commun. Il pourrait être contrebalancé par les craintes sur l’emploi et les revenus rabotés par le chômage temporaire. Pour influencer la balance entre ces tendances, les constructeurs rivalisent d’imagination. En Allemagne, Volkswagen propose même une assurance perte d’emploi pour rassurer les prospects anxieux (campagne #vwfüreuch).

Par rapport à d’autres marchés, les ventes du Salon, déjà réalisées, devraient freiner l’impact de la crise sur le résultat de l’année. Pas l’effacer, malgré les promotions actuelles. ” Le marché devrait arriver à 435.000 immatriculations en 2020 et à 450.000 l’an prochain, contre une moyenne qui se situe habituellement entre 480.000 et 520.000 “, déclare Jean-Marc Ponteville, qui répercute les chiffres avancés par le CEO de D’Ieteren Auto, Denis Gorteman.

Bientôt des primes à l’achat ?

Aux promotions actuelles, parfois tonitruantes, pourraient succéder des primes publiques à l’achat pour venir en aide à l’industrie automobile. La France l’a annoncé, l’Allemagne y songe. Ce 27 mai, la Commission européenne devait dévoiler le contenu de son programme Green Deal. Selon l’agence Euractiv, il devrait intégrer un plan de 20 milliards d’aides à l’achat de véhicules propres sur deux ans. Histoire à la fois d’aider un secteur riche en emplois et de réduire les émissions.

Acea, l’association européenne des constructeurs, souhaite que ce plan touche tous les types de motorisations et pas seulement les électriques ou les hybrides. Sinon, le soutien au secteur serait trop limité. Avec l’argument qu’un véhicule neuf à carburant sera toujours moins polluant et émetteur de CO2 qu’un modèle ancien. La France va adopter cette approche.

Pousser le numérique

Les concessionnaires comptent aussi plus que jamais sur le numérique pour attirer les clients. Hormis Tesla et quelques expériences, le secteur avait soigneusement évité la vente en ligne, préférant le contact de visu pour négocier la vente. Durant le confinement, la nécessité de pousser la relation numérique pour mieux faire des affaires s’est imposée. ” S’il y a un enseignement de la crise, c’est bien celui-ci, indique Gianni Nobile : il y a du potentiel dans les relations numériques. Nous avons remarqué que le client est beaucoup plus digitalisé qu’on ne l’imagine dans ses demandes. On pourrait davantage virtualiser la prospection et même imaginer des rendez-vous en visioconférence. ”

Sur le plan sanitaire, le secteur a fait de grands efforts pour rassurer les visiteurs des showrooms.
Sur le plan sanitaire, le secteur a fait de grands efforts pour rassurer les visiteurs des showrooms.© RVA

” Nous allons repenser le processus de vente, confirme Olivier Piret (SAGA Piret Mercedes ). Les stocks doivent être visibles sur Internet, on doit pouvoir faire une visite virtuelle des véhicules, pour générer des leads, des demandes d’offre. C’est en cours chez nous, en partenariat avec la marque. ”

BMW a aussi noté l’intérêt grandissant de ses applications pour les clients. ” Elles permettent de paramétrer la voiture, de prendre rendez-vous pour les entretiens, précise Jeroen Lissen, corporate communication manager chez BMW Group Belux. Nous avons constaté une croissance énorme de l’utilisation de ces applications, qui permettent aussi aux clients de chatter avec les concessionnaires. Nous avons eu la chance d’avoir lancé ces services avant la crise. ”

Les actions commerciales

-,Des rabais, qui peuvent atteindre et dépasser 20% de la valeur catalogue. Ils intègrent en général un volet ” prime de recyclage “, un montant intéressant donné au client qui apporte un véhicule en fin de carrière.

– Un financement à 0 %.

Un report des mensualités pour le financement. Mercedes et Opel proposent cette formule.

Un subside public ? L’Union européenne propose de coordonner 20 milliards d’aides à l’achat de véhicules plus propres.

Auto5 : vélos et check-up ” Prêt à repartir ”

Chez les concessions automobiles, c'est le printemps des rabais pour faire revenir le client
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Les services automobiles cherchent aussi à vendre. C’est le cas d’Auto5, un acteur important sur le marché de l’entretien et des accessoires auto grand public. ” Les affaires ont bien redémarré, estime Oliver Renard, directeur marketing de la chaîne. Il y a un retard à rattraper avec les permutations de pneus hiver-été. ” Le business est déséquilibré : ” Le magasin tourne moins bien, l’atelier tourne plus “. Les clients se baladent moins dans les rayons pour se laisser tenter par un autoradio, un GPS, un désodorisant auto ou un gonfleur de pneus. Les vélos, eux, partent bien. Auto5 propose quelques modèles à assistance électrique et des pliables, placés près des caisses. ” Là, on a enregistré un boom “, continue Olivier Renard. L’offre de services a aussi été réaménagée. Le check-up d’été est devenu un check-up ” Prêt à repartir “, à 29,90 euros qui inclut la vérification de la batterie (qui a pu s’affaiblir après deux mois d’inactivité). Le business n’a pas récupéré son niveau de février. ” La réalité est que nous n’avons pas besoin de toutes nos équipes. ” Le chômage temporaire est donc encore de rigueur.

Chez les concessions automobiles, c'est le printemps des rabais pour faire revenir le client
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L’occasion démarre mieux

” Nous avons bien repris, avance Jean-Claude Gathon, patron de Soco, un acteur important de la voiture de seconde main en Wallonie, avec un stock d’un millier de voitures à proposer. Le client est en attente. ” Il indique ne pas avoir réduit ses prix. Il a sorti tout son personnel du chômage temporaire. Les promos semblent donc surtout toucher le neuf.

L’écho est identique chez Carsys, à Marche-en-Famenne, qui réunit un point de vente aux particuliers et un service d’enchères en ligne pour les professionnels, et vend 500 à 600 voitures par an. ” Nous vendons des véhicules récents, âgés d’un ou deux ans, déclare le patron, Michel Lecrombs. Nous n’avons pas observé de baisse de prix sur le marché, alors que nous avions craint une chute. Nous ne faisons pas d’actions commerciales particulières, ce n’est pas nécessaire.” Il regarde d’un oeil sceptique les promotions qui se multiplient sur le marché du neuf. “De 5.000 à 7.000 euros de rabais, ce n’est pas très sain”, estime-t-il. Le marché de la seconde main fait moins parler de lui que celui du neuf mais il est numériquement plus important. Il pesait, ces dernières années, 660.000 immatriculations par an, contre 540.000 (environ) pour le neuf.

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