Placements : toutes les nouveautés fiscales de 2012

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Le gouvernement Di Rupo prévoit de dégager de nouvelles recettes, en relevant l’impôt sur les produits de placement. A quoi faut-il s’attendre à partir du 1er janvier 2012 ?

Lorsque les premières intentions d’Elio Di Rupo ont été rendues publiques, en juillet dernier, les épargnants se sont inquiétés. Les projets semblaient particulièrement défavorables aux investisseurs en actions, dont les bénéfices allaient être taxés à 50 % pour peu qu’ils aient été réalisés dans l’année même de l’achat. Heureusement, la mesure n’a finalement pas été retenue et les personnes physiques qui vendent des actions avec plus-value (bénéfice) ne seront donc pas imposées, pour autant que l’opération relève de la gestion normale du patrimoine privé. Statu quo, donc, sur ce plan. Par contre, elles payeront, dès le 1er janvier 2012, 21 % de précompte mobilier (au lieu de 15) sur les dividendes des actions VVPR (“verlaagde voorheffing/précompte réduit”), et 25 % sur ceux des actions “ordinaires”.

Cet article s’intéresse à ce qui change au niveau de l’imposition des produits de placement des personnes physiques et plus particulièrement, à la conversion des titres papier au porteur.

Placements à taux fixe

Commençons par la bonne nouvelle : rien ne change pour les livrets d’épargne, dont les intérêts restent exonérés jusqu’à 1770 euros (année de revenus 2011) par personne et par an. Si vos intérêts sont plus élevés, vous devrez les renseigner dans votre déclaration à l’impôt sur les personnes physiques et acquitter un précompte de 15 %, à quoi s’ajoutera l’impôt communal, sur l’excédent. Bonne nouvelle également pour les assurances-placement de la Branche 21, qui restent exonérées à condition d’être conservées au moins 8 ans et un jour ou qu’une couverture décès correspondant à 130 % du capital placé au moins soit souscrite. Le précompte (de 21 %) ne sera dû qu’en cas de retrait dans les 8 ans et en l’absence de couverture décès de 130 %. Quant aux éventuelles participations aux bénéfices, elles resteront exonérées.

Un changement affecte par contre les autres revenus des placements à taux fixe, dont le taux du précompte mobilier passe de 15 à 21 %. C’est ainsi que dès le 1er janvier, vous payerez 21 % sur les intérêts de vos comptes à vue et à terme, bons de caisse, bons d’État et obligations. Pour être complets, ajoutons qu’à titre exceptionnel, le précompte mobilier sur les intérêts de la dernière émission de bons d’État – celle du 24 novembre au 2 décembre 2011 – est maintenu à 15 %.

Le précompte mobilier demeure un impôt prélevé à la source, qui conserve son caractère libératoire. L’intermédiaire financier (par exemple, la banque) le retient en vue de le reverser à l’État. Cela fait, le bénéficiaire n’a plus d’autre obligation fiscale ; il est dispensé de le renseigner dans sa déclaration à l’impôt des personnes physiques, ce qui lui permet d’échapper aux additionnels communaux.

Cotisation de solidarité de 4 %

Le précompte mobilier de 21 % est majoré de 4 % (pour s’établir de la sorte à 25 %) si le total des intérêts perçus majorés des dividendes des actions VVPR dépasse 20.000 euros par personne, par an. Le calcul de la limite des 20.000 euros ne tient pas compte des intérêts exonérés du livret d’épargne et des dividendes perçus soumis au précompte mobilier de 25 %.

Les modalités relatives à la mise en oeuvre pratique de la cotisation de solidarité restent à préciser. On envisage soit une retenue directe à la source – au moment du paiement -, soit une imposition ultérieure, sur la base de renseignements communiqués à un point central.

Titres papier au porteur

La loi sur la suppression des titres au porteur interdit, depuis 2008, la livraison matérielle de titres papier en Belgique. Si vous possédez encore des titres au porteur, vous avez jusqu’à la fin 2013 pour les placer sur un compte-titres. Ce délai vaut également pour les entreprises familiales.

Le gouvernement Di Rupo instaure une taxe de 1 % sur la dématérialisation des titres (par exemple, des actions cotées en Bourse) ou leur conversion en titres nominatifs (par exemple, des actions au porteur détenues par une entreprise familiale) en 2012. À partir du 1er janvier 2013, cette taxe passera à 2 %. Elle sera prélevée sur la valeur des titres, qu’il vaut donc mieux, si possible, convertir avant le Nouvel An encore ; à défaut, veillez à le faire dans le courant 2012.

Actions détenues par des entreprises familiales et des sociétés patrimoniales

Selon les dernières estimations, quelque 100.000 entreprises familiales et sociétés patrimoniales détiendraient encore des actions au porteur. Il est donc temps pour elles d’envisager de les convertir en actions nominatives ou de les dématérialiser auprès d’une banque.

Dans la pratique, nous constatons que, dans leur large majorité, les entreprises familiales et les sociétés patrimoniales choisissent de convertir les actions au porteur dont est composé leur capital en actions nominatives. Il leur suffit pour ce faire de modifier leurs statuts devant un notaire (d’un point de vue strictement juridique, la modification des statuts n’est même pas nécessaire, mais nous la recommandons parce qu’il est souhaitable de supprimer toute référence aux actions au porteur). L’adaptation prend deux semaines et coûte quelque 800 euros. À cela doit s’ajouter l’achat d’un registre des actionnaires (quelque 25 euros), qu’il convient, naturellement, de compléter.

La conversion en actions nominatives entraîne la disparition de l’anonymat. L’entreprise connaît l’identité de chacun des actionnaires, qui disposent quant à eux du droit de consulter le registre. L’anonymat disparaît vis-à-vis du fisc également, puisque l’Administration peut vérifier qui possède des actions nominatives d’une société donnée, et en quelle quantité.

Dématérialisation des actions à la banque

L’entreprise familiale et la société patrimoniale peuvent également choisir de “dématérialiser” leurs actions au porteur. L’opération exige une modification des statuts (800 euros environ). En gros, la dématérialisation consiste à détruire les titres papier et à en placer l’équivalent sur un compte-titres ; nous vous épargnerons les détails de la procédure mais sachez que la plupart des grandes banques – ainsi que quelques petites institutions de niche, qui visent spécifiquement les entrepreneurs – se chargent de l’opération.

Si elles ne facturent souvent rien pour la dématérialisation elle-même, il faut généralement prévoir un forfait annuel d’environ 500 euros pour les frais de base, à quoi s’ajoute un montant correspondant à 0,40 % des dividendes payés. Les titres dématérialisés sont inscrits au registre des actionnaires de la société, au nom du titulaire du compte. La société émettrice ne connaît donc pas nécessairement les détenteurs réels de ses actions (bien que ceci soit tout relatif depuis l’entrée en vigueur récente de l’obligation de déclarer les participations de 25 % et plus). Une certaine discrétion vaut en principe également vis-à-vis du fisc, puisque la banque doit pouvoir invoquer le secret bancaire.

Johan Steenackers et Johan Adriaens

Qu’est-ce qui changera le 1er janvier 2012 ?

– Le précompte mobilier sur les produits de placement à taux fixe passera de 15 à 21 %.

– Les intérêts des livrets d’épargne resteront intouchés puisque, comme c’est le cas actuellement, aucun précompte mobilier ne sera dû sur la première tranche de 1770 euros (année de revenus 2011) par personne, par an.

– De même, les revenus des assurances-placement de la Branche 21 resteront exonérés de précompte mobilier, pour autant que l’assurance soit conservée pendant 8 ans et 1 jour au moins ou qu’une couverture décès correspondant à 130 % du capital investi soit souscrite.

– Sur les dividendes d’actions “ordinaires”, le précompte mobilier restera fixé à 25 %.

– Sur les dividendes d’actions VVPR, il passera de 15 à 21 %.

– Une taxe de solidarité de 4 % sera due lorsque les intérêts seront supérieurs à 20.000 euros par an. Le précompte mobilier prélevé sur la partie excédentaire s’établira donc de facto à 25 % (au lieu de 21 %).

– Vous avez jusqu’à la fin 2013 pour placer vos titres papier au porteur sur un compte-titres. Toute opération de conversion sera taxée à 1 % en 2012 et à 2 % en 2013. Ces taxes seront également dues lors du placement sur un compte-titres ou de la conversion, en actions nominatives, d’actions au porteur constituant le capital d’une entreprise familiale ou d’une société patrimoniale.

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