L’étrange affaire UBS

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Que s’est-il vraiment passé au sein de l’antenne belge du géant suisse de la gestion de fortune, aujourd’hui accusée d’évasion fiscale par la justice bruxelloise ?

Sale temps pour UBS. Faisant déjà l’objet de poursuites aux Etats-Unis, en France et en Allemagne, voilà que le géant bancaire suisse se retrouve à présent dans le collimateur de la justice bruxelloise. Le patron de sa filiale belge, Marcel Brühwiler, est inculpé pour des faits de blanchiment, de fraude fiscale grave organisée et d’exercice illégal de la profession d’intermédiaire financier en Belgique. UBS Belgium aurait, au cours des 10 dernières années, démarché de riches contribuables belges pour les aider à dissimuler leur fortune en Suisse. Plusieurs milliards d’euros auraient ainsi bénéficié de la complicité de la banque pour éluder l’impôt en trouvant refuge sur des comptes offshore. L’enquête ouverte par le juge Michel Claise (lire également l’ouverture de la section People de ce magazine) s’appuie sur des dénonciations d’anciens employés de la banque. Mais UBS nie farouchement.

Médiatisation

Le dossier est d’autant plus étrange que la manière dont il a été mis sur la place publique interpelle. “La communication du parquet me semble précipitée et incomplète, avance Jean-Pierre Buyle, avocat spécialisé en droit bancaire (Buyle Legal). Elle est intervenue à un curieux moment, alors que le principal intéressé n’avait pas encore été entendu. Pourquoi cet empressement ? Pour faire monter la pression, faire peur aux gens du métier ? Ce n’est pas parce qu’on inculpe quelqu’un que le dossier est solide et qu’il aboutira à des sanctions.” Et l’ancien bâtonnier de Bruxelles d’ajouter : “Pourquoi aussi inculper un dirigeant en place depuis deux ou trois ans alors que les faits sont visiblement anciens ? Est-ce à dire que d’autres inculpations vont suivre ? Visent-elles d’autres employés de la banque, des clients anciens ou existants ? Je note enfin qu’aucune précision n’a été donnée sur le mécanisme utilisé. Les montants évoqués sont pourtant impressionnants. D’où venait l’argent ? Difficile d’imaginer qu’il puisse s’agir d’argent noir qui dormait sur des comptes bancaires en Belgique.”

En réalité, les questions qui entourent UBS Belgium ne datent pas d’hier. Depuis son arrivée en Belgique en 2004, au moment de la première DLU, l’enseigne reste un mystère dans le petit monde feutré de la gestion de fortune à la belge. Nombreux sont les professionnels du secteur qui s’interrogent sur la capacité de la banque à percer dans un marché, certes porteur, mais toujours plus encombré. Ses résultats commerciaux n’ont d’ailleurs jamais été à la hauteur des moyens humains et matériels investis. Elle a même connu plusieurs années difficiles dans la foulée de la crise. Jusqu’à voir ses comptes s’enfoncer dans le rouge et faire l’objet d’une recapitalisation par sa maison mère zurichoise en 2010. Une opération de 5 millions d’euros dont nous révélions l’existence dans ces colonnes. Reste à savoir si derrière ce business, officiel mais à peine rentable, se cachait en réalité une activité parallèle de transmission dans l’ombre de patrimoines non déclarés… vers la Suisse.

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