Volatilité en bourse : “les ETF ont montré une certaine résilience”

ETF investment (Exchange Traded Funds). Trading, financial markets, data, business, investment funds. Abstract stock market and exchange concept. © Getty Images
Charly Pohu

Avril, avec les droits de douane de Trump, annoncés puis reportés, a été un mois très volatil en bourse. Comment cela s’est-il reflété sur le marché des ETF, et qu’est-ce que cela veut dire sur les tendances dans le monde de l’investissement ? À l’issue du rapport mensuel de BlackRock sur les flux du marché mondial de ces fonds négociés en bourse, Jérôme Folcque, co-directeur de la division Wealth de BlackRock en Belgique & Luxembourg, analyse la situation.

“Malgré la volatilité qu’on a vue, les flux mondiaux ont montré une certaine résilience”, indique d’emblée Jérôme Folcque. Les ETF d’actions, à échelle mondiale, ont ainsi continué à récolter des flux (en termes nets). Avec 107 milliards de dollars investis, avril a même fait mieux que la moyenne du premier trimestre.

Mais en y regardant de manière plus précise, il y a de nombreuses nuances. “La tendance qu’on avait déjà vue le mois précédent et au début du mois d’avril se poursuit : les flux vers les actions américaines ont ralenti. C’est un chiffre aux alentours de 36 milliards de dollars, contre 55 milliards en moyenne pour le premier trimestre. Ces flux se sont déplacés vers le reste du monde, hors US (les marchés émergents ont notamment récolté 31 milliards de dollars, plus du triple du mois de mars, NDLR). Cela reflète, après toute cette volatilité, une certaine prudence des investisseurs vis-à-vis du marché américain, en fonction de ce qui s’est passé du côté des négociations commerciales, des tarifs douaniers et de la géopolitique, entre autres.”

De manière sectorielle, sur les ETF d’actions américaines, les investisseurs ont adopté une approche défensive. Ils se sont tournés vers la technologie et les entreprises à dividendes (ces pans du marché ont récolté des flux positifs).

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Europe

En Europe, après un mois de mars de tous les records, les chiffres ont également ralenti. Les flux entrants d’ETF d’actions européennes sont de 9,2 milliards de dollars, ce qui est en dessous de la moyenne du premier trimestre. Les investisseurs internationaux qui avaient fortement investi dans les actions européennes en mars étaient notamment moins présents.

Mais les flux restent positifs, pour un troisième mois de suite, retient l’expert. Il y constate une tendance cyclique, et une confiance des investisseurs dans une reprise économique. Ils ont ainsi investi dans les ETF d’actions du secteur industriel (982 millions de dollars), dans les entreprises à dividendes (757 millions de dollars) et les moyennes capitalisations (511 millions).

“Dans ces périodes de forte volatilité, on assiste à des grands switchs régionaux et dans les secteurs”, en déduit Jérôme Folcque.

Obligations : les investisseurs jouent la carte de la sécurité

Pour le marché obligataire, les flux vers les ETF reprenant des papiers de dette ont aussi diminué, à 22 milliards de dollars. Soit la moitié de la moyenne du premier trimestre.

Mais là aussi, il y a des tendances sous-jacentes intéressantes. “Les obligations des gouvernements ont notamment bien fonctionné. Ils représentent 70% des flux des ETF obligataires, c’est énorme”, calcule Jérôme Folcque.

Et, nuance dans la nuance : les ETF d’obligations d’États à court terme ont connu un chiffre record (26 milliards de dollars, dépassant l’ancien record de 21 milliards de dollars établis en mars 2020). Tandis que ceux d’obligations à long terme ont connu un chiffre négatif : les investisseurs ont plus vendu qu’ils ont acheté. A -7 milliards de dollars, c’est la deuxième baisse la plus importante de leur histoire (le record reste mars 2020). “Avec la volatilité, les investisseurs prennent moins de risques sur les taux et vont plutôt se positionner au début de la courbe des taux d’intérêt et ainsi limiter l’impact d’éventuelles décisions des banques centrales”, analyse l’expert.

Il ajoute également un point sur l’or : les ETF sur le métal jaune en sont à leur cinquième mois consécutif d’entrées, affichant des inflows de près de 11 milliards de dollars. C’est le deuxième chiffre le plus élevé de l’histoire, après mars 2022.

La minute éducation financière

Après les chiffres et tendances du mois d’avril, Jérôme Folcque fait aussi le point sur un sujet d’éducation financière. Quelle est la liquidité des ETF, et quels sont les points d’attention pour les investisseurs ?

“La liquidité est la raison principale de l’attrait des ETF. On peut les négocier partout et à tout moment de la journée, lorsque les marchés sont ouverts. Cotée en bourse, une part d’un ETF se comporte comme une action d’une entreprise. C’est donc une liquidité élevée par rapport à des fonds traditionnels par exemple, où il peut y avoir un délai de 24 à 48h pour vendre.

L’ETF est perçu comme hyper liquide, mais il faut bien comprendre les nuances derrière. La liquidité de l’ETF reflète la liquidité des actifs sous-jacents. Pour un ETF sur le S&P 500 ou l’Euro Stoxx 50, les échanges des actifs sous-jacents sont plus nombreux et plus rapides que pour un ETF sur les marchés émergents ou les obligations à haut rendement, par exemple. S’il n’y a pas d’échanges sur le marché, pendant un temps, pour ces actifs sous-jacents, le dernier prix va être reflété dans l’ETF. Cela veut dire que valorisation ne change pas et qu’un cours va apparaître comme plat, mais pas que l’ETF ne s’échange pas.

Les ETF ont d’ailleurs un double niveau de liquidité. Le premier est le marché dit secondaire, de gré à gré entre les investisseurs : il y en a un qui vend les parts et l’autre qui en achète. Elles passent de main en main. L’autre niveau, c’est le marché primaire, qui est l’émission (ou la destruction) de parts. Un courtier peut par exemple demander à un gestionnaire de fonds de créer des parts supplémentaires, et le gestionnaire va chercher les sous-jacents qui correspondent aux critères demandés. C’est un peu comme cela que fonctionnent les fonds classiques, aussi. Ces deux niveaux de liquidité des ETF s’additionnent pour créer une couche de liquidité supplémentaire.

Un autre point d’attention encore est le spread, ou la différence entre les prix demandés par les vendeurs et les acheteurs. En cas de forte volatilité, ces écarts vont s’élargir. Les spreads des actifs sous-jacents vont donc aussi se refléter dans les spreads des ETF. Les transactions vont donc devenir plus onéreuses… mais cela permet de faire en sorte qu’il est toujours possible de négocier en bourse et qu’il reste de la liquidité.”

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