Plus “inclusif” : comment le luxe veut conquérir de nouveaux clients

Magasins de luxe dans un centre commercial, image d’illustration. (Photo by Ploy Phutpheng/SOPA Images/LightRocket via Getty Images) © SOPA Images/LightRocket via Gett
Charly Pohu

Le luxe traverse une période creuse. Mais il mise sur l’inclusivité au niveau des prix et l’innovation numérique pour attirer de nouveaux publics.

Depuis la fin de la relance post-covid et la vague d’inflation et le ralentissement économique qui ont suivi, le secteur du luxe traverse une période moins évidente. Les ventes n’augmentent pas en ligne droite mais connaissent quelques baisses, comme le montrent les bilans trimestriels publiés par les entreprises.

Il multiplie donc les pistes pour relancer la machine et attirer de nouveaux clients, comme la possibilité de régler en cryptomonnaies ou les collaborations avec les stars plébiscitées par les jeunes. Mais il mise aussi sur une autre option : le luxe “inclusif” – contrairement à l’image “exclusive” qui lui est généralement associée. Cette dernière veut dire que les produits ne sont pas accessibles au commun des mortels, mais uniquement à ceux qui ont le budget pour (et parfois aussi la patience).

Abordable

“Inclusif”, cela veut donc dire abordable. “Le luxe inclusif peut sembler être un oxymore. Pourtant, les gammes abordables ne sont qu’un des moyens utilisés par le secteur pour conquérir le cœur de la jeune génération, élargir son public et fidéliser de futurs clients qui grandiront avec la marque, ce qui pourrait permettre d’élargir sa gamme de produits au fil du temps”, analyse Gillian Diesen de Pictet Asset Management dans une note.

L’experte donne l’exemple du Birkin, emblématique sac à main d’Hermès. Il coûte au moins 10.000 euros, et n’est disponible que sur liste d’attente, ce qui peut prendre deux à trois ans. Un produit qui n’est donc pas facilement accessible. Mais le rouge à lèvres Hermès peut déjà être acheté pour 70 euros, compare-t-elle. D’autres aussi suivent la tendance : “Des marques telles que Balenciaga et Miu Miu proposent désormais des gammes plus abordables de foulards, d’accessoires et d’articles lifestyle. Les parfums, les lunettes de soleil et les expériences bien-être sont de plus en plus populaires, car ils permettent de profiter du luxe à moindre coût”, décrit Gillian Diesen.

L’expérience est tout aussi importante que le prix, poursuit l’experte. Notamment pour fidéliser la jeune clientèle, qui est davantage à la recherche d’expériences et de personnalisation. En effet, si vous allez dans les boutiques de luxe sur l’Avenue de la Toison d’Or ou le Boulevard de Waterloo à Bruxelles, un vigile vous ouvre la porte et vous souhaite la bienvenue, le personnel est aux petits oignons pour vous conseiller personnellement, et vous repartez avec un beau sac en papier… avec son étui transparent adapté pour le protéger de la pluie. Un traitement royal, même si on achète un gadget.

Les magasins physiques restent d’ailleurs la place forte des ventes du luxe. Mais cette expérience personnalisée commence déjà plus tôt. En ligne, notamment. L’innovation numérique est aussi une manière pour le luxe d’être inclusif et de capter ces nouveaux clients. “Les plateformes numériques permettent aux consommateurs d’effectuer des recherches et même d’essayer des produits en réalité augmentée (RA). Les marques utilisent la technologie pour attirer les consommateurs (par exemple avec des écrans de veille personnalisés, des cadeaux numériques, la possibilité de télécharger ses propres photos) et pour cibler leur marketing. Le contenu pour la communauté est particulièrement important, avec des conseils de style et des témoignages authentiques. Et cela ne vaut pas seulement pour le jeune public : les marques s’adressent également aux consommateurs plus âgés en faisant appel à des mannequins et des ambassadeurs de leur génération”, poursuit Gillian Diesen.

Rester soi-même

Le défi dans cette recherche de nouveaux publics, c’est de rester soi-même. Et ça, les groupes du luxe le réussissent plutôt bien, note l’experte. Cela grâce à un atout qui lui est spécifique : l’intemporalité de ses produits. Il n’a pas besoin de créer des nouvelles collections tous les ans, car il y a une ligne de produits classiques qui résistent à l’épreuve du temps et restent au goût du jour pendant une plus longue période – bien que de légères variations soient possibles. Les acheteurs les apprécient pour cela. Ces collections ne demandent pas une grande innovation ou remise en question tous les trois mois.

Ces produits laissent donc justement la place aux marques pour, à côté, créer des éditions limitées ou collaborations avec des artistes ou d’autres marques pour répondre à la demande de nouveauté et attirer des nouveaux publics. Ainsi que d’innover sur d’autres niveaux, comme sur le plan technologique, pour se montrer plus inclusif.

Reste à voir si cette inclusivité pourra booster les ventes et redresser les cours en bourse, qui ont vécu des hauts et des bas ces deux à trois dernières années.

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