Le pétrole, un secteur qui restera intéressant
La rédaction répond à la question d’un abonné: “Le secteur du pétrole souffre terriblement depuis plusieurs années. Quelles sont ses perspectives?”
Les compagnies pétrolières ont considérablement réduit leurs investissements ces dernières années. TotalEnergies a investi 107 milliards d’euros entre 2011 et 2014, contre 51 milliards depuis quatre ans. La différence, soit plus de 10 milliards d’euros par an, a ainsi reflué vers l’actionnaire, sous forme de versements de dividendes et de rachats d’actions. Les flux de trésorerie disponibles atteignent 14,1% de la capitalisation boursière, argent qui appartient aux actionnaires. A titre de comparaison, le MSCI World affiche une moyenne de 4,2%.
Cette situation est très similaire à celle du secteur du tabac il y a 25 ans. Le monde avait compris que fumer était mauvais pour la santé et qu’il y aurait de moins en moins de fumeurs. Les fonds de pension se sont retirés, laissant sur le carreau les actions, faiblement valorisées, des fabricants de tabac, dont les bénéfices sont partis à la hausse alors qu’eux non plus n’investissaient plus beaucoup. Au 21e siècle, l’indice MSCI Tobacco a enregistré un rendement total de 1.710%, contre 214% pour le MSCI World. Il se pourrait bien qu’en 2040, nous constations que les compagnies pétrolières ont connu une évolution similaire.
Il y a 25 ans, les investisseurs estimaient que leurs rendements ne diminueraient pas s’ils évitaient les valeurs du tabac, et leur position est aujourd’hui, vis-à-vis des sociétés pétrolières, identique. Le pétrole a de surcroît, par rapport au tabac, l’avantage de la rareté. S’il n’y a plus d’investissements dans le tabac, les quantités de cigarettes produites ne changeront pas fondamentalement; si l’on cesse d’investir dans l’or noir, les quantités disponibles vont tout simplement diminuer. Les conséquences du recul, de 50% environ, des investissements dans le pétrole ces 10 dernières années, se manifestent déjà sur les marchés, alors que la consommation continue d’atteindre des sommets. Entre 2010 et 2020, le prix du pétrole pour livraison immédiate était inférieur de 2,2% au prix pour livraison à un an; ce phénomène, appelé report, est l’expression d’une surabondance. Désormais enterré, la situation de report s’est muée en un déport de 7,4%. Ce qui atteste l’existence d’une pénurie mondiale et prouve qu’il restera intéressant d’investir dans le secteur.
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