Investir dans le joyau de la sphère émergente qu’est l’Inde
Le pays pourrait bien devenir la 3e place boursière internationale à l’horizon 2030. Sur le long terme en effet, les perspectives de croissance de l’économie et des marchés boursiers indiens sont séduisantes. Qui désire s’y exposer a tout intérêt, s’il veut limiter les pertes en cas de repli, à investir graduellement.
Le terme “pays émergents” englobe des nations au profil très différent. L’Inde se profile depuis quelques années comme l’une des économies les plus prometteuses de la sphère. Son produit intérieur brut (PIB) a atteint 3.750 milliards de dollars en 2023, soit près du double des 2.000 milliards de dollars d’il y a 10 ans, ce qui en fait la 5e puissance économique mondiale. Laquelle, estime le FMI, connaîtra cette année un taux de croissance de 6,5 % ; la tendance devrait se maintenir par la suite.
Si croissance économique ne rime pas forcément avec essor boursier, la corrélation entre la conjoncture et les cours des sociétés indiennes est assez forte : la croissance de la capitalisation boursière du pays a suivi le rythme du PIB. L’indice MSCI India a été l’un des plus performants en 2023, progressant de 27 %. Sur les cinq dernières années, il a gagné 75 %, une performance proche de celle de l’indice phare américain, le S&P 500 (+81 %).
Les gestionnaires du fonds Robeco Indian Equities considèrent qu’un certain nombre d’évolutions politiques et économiques pourraient doper le marché boursier indien. Même si elle s’est toujours distinguée par sa forte croissance, l’Inde a longtemps été une économie fermée. La donne a changé en 2014, avec l’arrivée au pouvoir de Narendra Modi. Le Premier ministre, toujours en poste, a réformé l’économie pour permettre son ouverture et investi massivement dans les infrastructures publiques, afin d’améliorer la productivité.
L’Inde compte une population jeune – l’âge médian sera de 31 ans en 2030 – et en croissance, dont le pouvoir d’achat augmente. Les services financiers, dont le crédit, deviennent de plus en plus accessibles. Avec la généralisation de l’Internet mobile, le commerce électronique devrait croître de 20 % par an ces prochaines années.
Ces facteurs stimulent à la fois les investissements des ménages et des entreprises et la consommation intérieure. Laquelle, avance le cabinet Bain Consulting, devrait quadrupler d’ici à 2030. Un essor de la classe moyenne indienne est dès lors attendu : le nombre de ménages dont les revenus annuels se situent entre 10.000 et 35.000 dollars aura presque doublé en 2031. Actuellement à 35 % du PIB, l’endettement des ménages est inférieur de moitié à la moyenne des autres pays du G20. Le taux d’endettement des entreprises, lui, n’avait pas été si bas depuis des années. Elles vont donc pouvoir continuer d’investir.
Exportations
Les stratégistes de Robeco considèrent également l’urbanisation comme une source importante de croissance et de consommation. Au cours de la décennie écoulée, le gouvernement indien a investi deux fois plus dans les infrastructures routières et électriques qu’au cours de la précédente. L’Inde séduit de plus en plus les multinationales désireuses de diversifier une partie de leur chaîne d’approvisionnement et de leur production, pour dépendre moins de la Chine. Apple, par exemple, produit une partie de ses iPhone en Inde depuis 2020. L’Inde assure 1,8 % des exportations mondiales, la Chine, 15 % ; la marge de progression est considérable. Dans certains secteurs clés, le gouvernement encourage la production nationale. De même, il a mis en place un programme incitatif pour accueillir des sites de production de sociétés étrangères. L’Inde exporte de plus en plus ses technologies et ses services (4 % des services exportés à travers le monde proviennent du sous-continent).
Un marché florissant
Ces évolutions n’ont pas laissé la place boursière indienne de marbre. Sur les 10 dernières années, l’indice MSCI India a enregistré un rendement total de 244 %, soit 13 % par an. Les investisseurs institutionnels ont plébiscité les actions indiennes, souvent au détriment des chinoises, qui n’affichent plus les meilleurs taux de croissance. Depuis le début de l’année 2023, la Bourse indienne a généré un rendement supérieur de 50 % à celui de la place chinoise. Les banques d’investissement, et notamment Goldman Sachs, Janus Henderson ou encore Marshall Wace, estiment que l’Inde est la nouvelle championne de la croissance. La pondération du sous-continent augmente aussi dans les indices des marchés émergents, si bien que le pays pourrait devenir la 3e place boursière internationale à l’horizon 2030.
Les marchés financiers indiens s’ouvrent lentement aux capitaux étrangers, même si 2 % seulement des obligations d’Etat indiennes sont détenues par des investisseurs étrangers. JP Morgan a inclus l’Inde dans son indice des marchés émergents, ce qui devrait entraîner un accroissement des flux de capitaux vers le pays.
Un sommet
Toutes ces bonnes nouvelles ont gonflé les valorisations, qui incluent déjà les attentes élevées. L’indice MSCI India affiche désormais un rapport cours/bénéfice de 27, largement supérieur à la moyenne de la décennie écoulée (24). Les valorisations des 50 plus grandes sociétés indiennes cotées, regroupées dans l’indice Nifty 50, atteignent leur moyenne des 10 dernières années. Quant à l’indice BSE Sensex, il a triplé depuis son plancher de mars 2020, alors que les bénéfices des entreprises n’ont “que” doublé sur la période.
Investir
L’envol des valorisations a entraîné des prises de bénéfices, ces dernières semaines. Certains investisseurs jugent en revanche que les perspectives de croissance justifient ces cours. Les actions indiennes pourraient donc fortement corriger, ou tout du moins stagner pendant un certain temps. A court et à moyen terme, des pertes ne sont pas à exclure. Sur le long terme toutefois, les perspectives de croissance de l’économie et des marchés boursiers indiens restent séduisantes. Qui désire s’y exposer a tout intérêt, s’il veut limiter les pertes en cas de repli, à investir graduellement, au fil des prochains trimestres. Voici trois manières de le faire.
1) Par le biais de fonds
Parce que le marché boursier indien manque de maturité et que les règles de gouvernance y sont moins strictes que dans les économies avancées, nous déconseillons de sélectionner soi-même des titres. L’on privilégiera les fonds à gestion active. Vous en trouverez la liste sur le site de Morningstar, par exemple ; il vous sera loisible de n’afficher, via les filtres, que ceux bénéficiant de la meilleure notation des analystes.
2) Par le biais d’Ashoka
Une autre possibilité consiste à acheter des titres de l’Ashoka India Equity Investment Trust, un fonds d’actions fermé basé au Royaume-Uni et coté à Londres.
L’équipe de gestionnaires, spécialisée dans les actions indiennes, mène une approche très active, qui s’affranchit grandement de son indice de référence, le MSCI India IMI. Ainsi le portefeuille inclut-il 35 % de grandes capitalisations seulement, contre 70 % dans l’indice. Les petites capitalisations sont en revanche surpondérées (45 %, contre 14 %). Ce faisant, le fonds devance structurellement l’indice. Depuis son introduction en Bourse, l’Ashoka India Equity Investment Trust a affiché un rendement de 149 % (18 % par an), contre respectivement 94 % et 13 % pour le MSCI India. La société ne facture pas de frais de gestion annuels, mais prélève une commission de performance de 30 % sur l’excédent de rendement par rapport à l’indice. Les frais administratifs avoisinent 0,3 % par an. Du fait de la nature fermée du fonds, le cours de l’action varie à la baisse ou à la hausse par rapport à la valeur intrinsèque du fonds.
3) Par le biais d’ETF
Les ETF, ou trackers, constituent une autre option pour investir en Inde. Le plus grand ETF disponible en Europe est l’iShares MSCI India UCITS ETF (code ISIN IE00BZCQB185). Cet ETF capitalisant, qui s’échange sur les principales Bourses européennes, réplique le MSCI India. L’indice de référence inclut 131 grandes et moyennes entreprises indiennes cotées. Le total des frais sur encours (TFE) est de 0,65 %.
Moins onéreux (TFE : 0,19 %), le Franklin FTSE India UCITS ETF (code ISIN IE00BHZRQZ17) réplique l’indice FTSE India 30/18 Capped, qui regroupe 213 sociétés, mais limite la pondération de la plus grande capitalisation boursière de l’indice à 30 %, et celle des autres à 18 %.
Ceux qui souhaitent s’exposer au Nifty 50, le célèbre indice qui regroupe les 50 sociétés indiennes majeures cotées, ne peuvent opter que pour un ETF synthétique, qui au lieu d’acheter directement les titres sous-jacents, opte pour des swaps. C’est le cas du Xtrackers Nifty 50 Swap UCITS ETF (code ISIN LU0292109690), dont le TFE est de 0,85 %.
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