Des dividendes extraordinaires sous le sapin
En Europe comme aux Etats-Unis, certaines entreprises distribuent régulièrement des dividendes extraordinaires, qui vont s’ajouter aux dividendes habituels. En voici quelques-unes.
Le dividende extraordinaire est un dividende ponctuel, qui n’a pas vocation à être régulier. Les entreprises versent des dividendes extraordinaires pour alléger leurs excédents de trésorerie, par exemple en l’absence d’opportunités d’investissement rentables ou parce qu’elles ne veulent pas prendre le risque d’investir quand les temps sont incertains. Comme elles sont exceptionnelles et que leur montant est imprévisible, ces distributions ne sont pas prises en compte dans le calcul du rendement en dividende ; les actions qui versent structurellement des dividendes supplémentaires importants présentent donc sur le papier des rendements relativement faibles, mais appartiennent dans la pratique à la catégorie des titres à dividende élevé.
A la discrétion de l’entreprise
Notons qu’un nombre croissant d’entreprises préfèrent les dividendes spéciaux aux dividendes (trimestriels, semestriels ou annuels) ordinaires. Tout comme les rachats d’actions propres, ces opérations sont facultatives et décidées par la direction – à ce propos, il est permis de se demander pourquoi tant d’entreprises dépensent des milliards pour racheter leurs actions à des cours souvent record alors qu’elles pourraient opter pour des versements de dividendes supplémentaires.
Ce n’est pas tout à fait un hasard si aux Etats-Unis, le quatrième trimestre de 2024 est marqué par l’annonce d’une multitude de distributions extraordinaires. Le phénomène est majoritairement dû aux entreprises cycliques et sensibles aux taux, comme les assureurs ou les producteurs de pétrole et de gaz. D’une manière générale, les sociétés saines versent un dividende ordinaire, qui croît de préférence chaque année ; à cela viennent s’ajouter les rachats d’actions, les investissements ordinaires et éventuellement, des acquisitions. Certaines entreprises parviennent de surcroît à payer structurellement un ou plusieurs dividendes exceptionnels sur l’année, mais elles sont assez rares, même outre-Atlantique. Voici trois sociétés prometteuses qui versent structurellement un dividende extraordinaire.
Opportunité 1 : American Financial Group
Le meilleur exemple, et pour nous l’une des actions à dividende les plus performantes depuis longtemps, est American Financial Group (ticker AFG), qui allie vigoureuse croissance annuelle du dividende ordinaire et nombreuses distributions exceptionnelles. Fondé en 1959, cet assureur non-vie est spécialisé dans une trentaine de marchés de niche, comme les cultures ou les chevaux, pour ne citer qu’eux. Dirigée par les frères Lindner, qui comptent par ailleurs au nombre de ses actionnaires majoritaires, la société génère chaque année des capitaux excédentaires, dont une part significative est distribuée aux actionnaires.
En raison de son flux continu de distributions de dividendes et de rachats d’actions, AFG est le choix idéal pour l’investisseur (en dividendes). Sa flexibilité financière lui permet non seulement d’assurer sa croissance organique, mais aussi de procéder à des acquisitions et d’investir dans des start-up. Le dividende augmente d’au minimum 10 % l’an depuis 19 ans. AFG verse en outre, chaque année aussi, deux dividendes spéciaux au moins. Un supplément de 2 dollars a été payé en février et un autre, de 4,50 dollars, en décembre. L’investisseur percevra en 2024 9,43 dollars en tout, soit un rendement de 6,7 %. Il n’est pas surprenant que le titre AFG ait atteint un sommet historique la semaine dernière.
Opportunité 2 : TransDigm Group
TransDigm Group est un fabricant de composants techniques de haute qualité destinés à l’aviation commerciale et militaire, qui réalise chaque année plusieurs acquisitions modestes. Son chiffre d’affaires est majoritairement récurrent et les pièces de rechange et la maintenance lui assurent des marges bénéficiaires élevées. Concurrente de Parker Hannifin et de Honeywell, TransDigm a vu son chiffre d’affaires bondir de plus de 20 % en 2023. Pour 2024, les analystes tablent sur une croissance de 12 %, à 8,9 milliards de dollars – un nouveau record.
Il ne verse pas de dividende ordinaire, mais TransDigm distribue tous les ans un dividende exceptionnel financé, du moins en partie, par de l’argent emprunté, ce qui, compte tenu de l’importance et de la prévisibilité de ses flux de trésorerie, n’est en rien problématique. Comme le groupe privilégie les distributions de capitaux à l’allégement de sa dette, ce dividende est systématiquement élevé. En 2024, les investisseurs ont perçu 75 dollars, à quoi correspond un rendement de 6 %. Les dividendes spéciaux des trois années précédentes étaient eux aussi très généreux. L’action, qui se négocie à un ratio cours/bénéfice (C/B) de plus de 30 actuellement, a progressé de 30 % depuis janvier. Elle séduira surtout l’investisseur patient.
Opportunité 3 : Hexol
Né en 1893, ce chimiste suédois, figure majeure de l’industrie des plastiques, se concentre sur la production de polymères et de composés de caoutchouc. Il opère principalement dans des marchés de niche très rentables – il fabrique des pièces pour les dispositifs médicaux et les voitures ainsi que des applications destinées aux secteurs de la construction et des biens de consommation, par exemple. Sa division Engineered Products fournit des produits spécifiques, comme des roues et des pneus pour chariots élévateurs et d’autres véhicules appelés à évoluer dans des conditions difficiles.
Chez Hexpol aussi, une partie de la croissance est à mettre au crédit d’une série d’acquisitions mineures réalisées année après année. Après avoir considérablement progressé en 2021 et en 2022, le chiffre d’affaires a stagné l’an dernier (-0,9 %, à 22,1 milliards de couronnes) et devrait avoir cédé 7 % en 2024. La situation est due à la cyclicité du secteur, très à la traîne sur les marchés boursiers depuis tout un temps. Cela fait en revanche trois ans que le dividende affiche une croissance de 10 % au bas mot ; il a désormais atteint 4 couronnes suédoises (SEK), soit un rendement en dividende de près de 4 %, voire de 5,8 % si l’on ajoute le dividende exceptionnel de 2 SEK. Hexpol avait payé des dividendes extraordinaires en 2022 (4 SEK) et en 2017 (3 SEK) également. Vu la solidité de son bilan, sa marge d’exploitation de plus de 16 % et son ratio C/B de 14, Hexpol est un achat résolument envisageable.
Six à huit distributions par an
Depuis quelques années (depuis la fin de la pandémie, pour beaucoup d’entre elles), maintes entreprises du secteur de l’énergie versent un dividende de base relativement modeste, auquel elles ajoutent un dividende trimestriel variable. Ce qui revient dans la pratique à effectuer huit distributions par an. C’est le cas non seulement de grands groupes, comme ConocoPhillips (130 milliards de dollars de capitalisation boursière) et Diamondback Energy (52 milliards de dollars), mais aussi, et surtout, même, de sociétés plus petites, toutes très tributaires de l’évolution des prix du pétrole et du gaz. ConocoPhillips fut l’une des premières à annoncer, en 2021, l’adoption d’une nouvelle politique, qui consiste à verser, outre le dividende trimestriel fixe, un variable return of cash (VROC) tous les trois mois ou presque, en fonction des résultats du trimestre. En 2024, Conoco a payé trois VROC de 0,20 dollar chacun, qui sont venus s’ajouter au dividende ordinaire de 0,58 dollar. Conoco ne versera pas de VROC ce trimestre-ci, mais augmentera son dividende ordinaire de 34,5 %, à 0,78 dollar par action.
Dividendes extraordinaires européens
Un certain nombre d’entreprises européennes, surtout britanniques et scandinaves, distribuent régulièrement des dividendes extraordinaires. Aux Pays-Bas, Randstad est l’incarnation même de cette stratégie. Au dividende ordinaire de 2,28 euros par action, le groupe a ajouté au début du mois d’octobre un dividende exceptionnel de 1,27 euro, ce qui porte le rendement à 8,7 %. Il avait également versé, en 2022, 2021, 2019 et 2018, un dividende spécial, dans la plupart des cas supérieur au dividende ordinaire.
Une des décisions les plus inattendues est sans doute celle prise par D’Ieteren d’accorder un dividende extraordinaire de 75 euros. Le 10 décembre, date du détachement, le rendement en dividende atteignait 39 %, pour un cours de 193 euros.
Parmi les autres valeurs européennes qui distribuent régulièrement des dividendes spéciaux, citons la société française BIC et les chaînes d’habillement Inditex (Espagne) et Next (Royaume-Uni) ; un autre nom bien connu est celui du producteur de spiritueux français Rémy Cointreau, qui a versé un euro de plus par action en 2022 et en 2023.
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici