N’investissez pas dans l’IA… mais avec l’IA

Investir avec l’IA, image d’illustration. © Reuters
Danny Reweghs
Danny Reweghs Journaliste

Les investisseurs se sont pris de passion pour l’intelligence artificielle (IA) ces dernières années. Elle stimule l’imagination de multiples façons. Ces derniers temps, l’attention s’est surtout portée sur les investissements colossaux dans les infrastructures informatiques en découlant. Mais il est aussi possible d’investir en utilisant l’IA comme outil. Il existe différents fonds.

Ce n’est qu’une question de temps avant que l’on se focalise sur les secteurs qui profitent le plus de cette technologie. L’IA a aussi un effet beaucoup plus direct sur le monde de l’investissement. Plusieurs sociétés de trading utilisent déjà l’IA pour développer et contrôler toutes sortes d’algorithmes. Il s’agit de stratégies informatisées qui achètent ou vendent des valeurs financières, sur la base de modèles mathématiques, d’analyses statistiques ou de l’IA.

Citadel est l’un des acteurs à la pointe dans ce domaine. Les algorithmes de ce teneur de marché et d’autres acteurs similaires détectent bien plus rapidement les nouveaux modèles et s’adaptent plus vite aux conditions de marché changeantes que les traders humains.

Suivez les cours des actions et ETF sur notre plateforme Trends Bourse Live & Abonnez-vous à notre newsletter Bourse

L’IA, boussole d’investissement en période d’incertitude

Il est difficile pour les investisseurs privés d’accéder à des stratégies d’IA spécifiques. Citadel, par exemple, n’est ouvert qu’aux participations d’acteurs institutionnels ou de particuliers fortunés qui apportent au moins 10 millions de dollars. De plus en plus d’acteurs ont néanmoins recours à la méthode.

Même BlackRock a expliqué que ces méthodes gagnaient en importance. Les secteurs économiques traditionnels ayant perdu de leur vigueur, le géant des fonds dispose d’un système qui ajuste notamment les positions en fonction de la fréquence des lettres majuscules dans les publications de Trump sur les réseaux, des offres d’emploi et d’autres variables inhabituelles afin d’évaluer l’humeur du marché. Une étude de l’université de Stanford révèle que cette utilisation de l’IA deviendra bientôt monnaie courante.

Un modèle d’IA à la place des gestionnaires de fonds

Une équipe de scientifiques de Stanford a mis au point un modèle capable de remplacer les gestionnaires de fonds. Ils ont alimenté le système avec 170 indicateurs liés au rendement des actions. Outre des éléments connus comme les taux d’intérêt officiels et les notations de crédit des entreprises, il s’agissait d’éléments plus complexes comme les présentations d’analystes. Afin de tester la capacité prédictive du modèle, celui-ci a été confronté aux portefeuilles de 3.300 fonds sur la période 1990-2020.

Au lieu de laisser l’IA prendre les rênes, l’on a prévu la possibilité d’ajuster le portefeuille chaque trimestre. L’équipe de Stanford a ainsi imité autant que possible le travail d’un analyste de fonds IA. Le résultat a tellement bluffé les scientifiques qu’ils ont passé un an à vérifier les résultats avant d’oser les publier.
Durant le test, les fonds de l’univers ont généré 2,8 millions de dollars d’alpha par trimestre. Avec les ajustements du modèle, le chiffre est passé à 17,1 millions de dollars. Autrement dit, le rendement moyen a crû de plus de 500% avec l’IA et le système a devancé 93% des gestionnaires humains.

L’apprentissage automatique fait la différence

Maintenant que l’IA suscite des milliards d’investissements dans le monde, l’attention se tourne vers des applications concrètes. Ce glissement est déjà perceptible dans le secteur financier. Alors que Citadel et BlackRock utilisent l’IA pour des stratégies de trading ultra-rapides et des analyses de l’humeur, Pictet Asset Management opte pour une approche plus structurée, transparente et accessible avec sa stratégie Quest AI.
“Notre modèle ne se concentre pas sur le plus rapide mais sur celui qui peut combiner et interpréter les informations les plus pertinentes”, explqiue David Wright, co-head quantitative investments chez Pictet AM et l’un des développeurs de Pictet Quest AI. “Pour nous, l’important est la prévisibilité, la cohérence et l’évolutivité. Nous ne voulons pas surfer sur la vague mais apporter une plus-value.”

Au lieu d’intégrer des variables dans un modèle et d’observer le portefeuille qui en résulte, Pictet Quest opte pour une structure plus ouverte. Wright explique : “Nous utilisons l’apprentissage automatique car il nous permet de comprendre les prises de position. Nous établissons un diagramme à partir d’une série de caractéristiques. Les prévisions bénéficiaires ont-elles augmenté ou baissé ? Les grands investisseurs ont-ils une position importante ou modeste dans l’action ? Y a-t-il des effets saisonniers ? Des questions fermées qui donnent lieu à toutes sortes de ramifications. Le modèle établit ensuite une prévision du rendement pour le mois à venir sur la base des données historiques des cours des 12 dernières années.”

Un bon aperçu du rendement

Cette approche permet de comprendre comment le rendement est constitué. Wright : “Dans le cas d’une action d’Apple, une partie de l’évolution du cours est déterminée par le fait qu’il s’agit d’une grande capitalisation. Une autre partie l’est par le fait qu’il s’agit d’une technologique et que les prévisions de bénéfices ont enflé un brin. Il ne s’agit donc pas d’une boîte noire, comme beaucoup d’autres modèles basés sur l’IA. De plus, le système fonctionne bien dans tous les contextes de marché, sans dépendre de certains facteurs comme la dynamique ou la volatilité.”

À l’instar des scientifiques de Stanford, Pictet Quest choisit d’ajuster légèrement un portefeuille plutôt que de laisser l’IA se charger de toute la sélection des actions. L’objectif du fonds est d’obtenir un rendement annuel supérieur de 1,5% à celui du MSCI AC World Index, avec un écart de suivi de 2% par rapport à cet indice. Avec un rendement de 12,8% depuis son lancement en avril 2024 (9,8% pour l’indice mondial), le fonds y parvient très bien.

L’IA cherche des thèmes prometteurs

Plus près de chez nous, les ingénieurs en investissement autoproclamés de Robeco utilisent l’IA pour déceler de nouveaux thèmes d’investissement. À l’aide d’un modèle d’IA pour le traitement automatique du langage, 100.000 textes sont analysés. Cela permet d’évaluer les thèmes qui se démarquent dans le monde financier.
Le moteur d’IA fonctionne comme un système de filtrage avancé. Il détecte les tendances émergentes, mais aussi le degré de maturité et d’accessibilité de ces thèmes pour les investisseurs. Le fonds peut ainsi réagir aux développements pertinents avant qu’ils ne soient repris par le marché.

On examine ensuite quelles actions profitent le plus de ces tendances à long terme. Pour ce faire, la maison de fonds s’appuie sur un système d’IA pour analyser l’humeur. Enfin, Robeco utilise ses propres modèles quantitatifs pour constituer un portefeuille de 100 actions qui profitent d’environ 25 thèmes.

Cela constitue le portefeuille du Robeco Dynamic Theme Machine UCITS ETF (code ISIN IE000VG2WCW5) lancé en octobre dernier. Avec un écart de suivi de 5%, cet ETF dispose d’une large marge pour s’écarter de l’indice MSCI World. Fin juin, l’ETF détenait une importante position dans les technologies de l’information et la santé, tandis que les actions industrielles et de consommation pesaient moins lourd. Après un bon départ, le Robeco Dynamic Theme Machine a pris du retard sur l’indice mondial. Le climat boursier du printemps était alors déterminé par les tensions commerciales plutôt que par les thèmes d’investissement.

Une offre plus large

Le nombre de fonds (et d’ETF) qui utilisent l’IA ne cesse de croître. L’ETF AI-Enhanced Eurozone Equities (code ISIN IE000979OT00), par exemple, investit de manière assez similaire à Pictet Quest AI dans des actions de la zone euro. Tout comme Robeco NLP, l’ETF Invesco AI Enablers (code ISIN IE000LGWDNE5) utilise l’IA pour évaluer quelles entreprises jouent un rôle clé dans l’essor de l’IA. Une équipe d’analystes humains distingue ensuite les entreprises qui se focalisent sur l’IA de celles qui font davantage partie de l’univers qui l’entoure. Le 1er segment bénéficie d’une pondération un peu plus importante dans l’indice.

L’ETF Invesco AI Enablers UCITS est intéressant pour les investisseurs désireux de profiter du développement continu de cette technologie grâce à l’IA. Cela vaut aussi, dans un sens (thématique) un peu plus large, pour Robeco Dynamic Theme Machine, même si cette approche doit encore faire ses preuves dans différents contextes de marché. Pictet Quest AI affiche déjà un meilleur historique à cet égard. Depuis son lancement, il devance nettement l’indice MSCI World sur toutes les périodes de trois mois ou plus. Ce fonds est une alternative intéressante à un investissement dans un ETF traditionnel sur l’indice mondial.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content