Les Européens qui ont investi à Wall Street subissent un mini-krach


Dollar et chute des cours : les investisseurs européens qui ont misé sur les Etats-Unis ont perdu en un mois environ 15% de leurs avoirs. Explications.
C’est la double peine : les investisseurs européens, qui avaient été jusque dans un passé récent friands d’actions américaines, sont en train de boire doublement la tasse. Ils subissent depuis un mois une dépréciation du dollar face à l’euro (-5%) à quoi s’ajoute la forte baisse des actions américaines (-9% pour le S&P 500, -10% pour le Nasdaq 100).
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Georges Saravelos, analyste star de la Deutsche Bank, s’inquiète de cette baisse rapide : il observe que les investisseurs européens perdent actuellement autant d’argent sur leurs positions dans le S&P que lors des premières semaines du mouvement de chute provoqué par l’inflation en 2022 et qui s’était soldé sur un plongeon boursier de 30%. Si cette tendance se poursuit, elle pourrait remettre en cause l’idée même du dollar comme valeur refuge, ajoute-t-il.
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15 milliards en un mois
Le retournement est spectaculaire. Le grand gestionnaire d’actifs BlackRock dans sa revue des « ETP » (Exchange-traded products), qui sont les produits financiers négociés en bourse (parmi lesquels on trouve essentiellement les ETF, les fonds indiciels), observe ainsi que « 13,4 milliards de dollars ont été injectés (par le biais d’ETP) dans les actions européennes en février, ce qui représente non seulement plus du triple des flux de janvier (3,7 milliards de dollars), mais marque également le deuxième mois d’entrées le plus élevé jamais enregistré, derrière mars 2015 (14,7 milliards de dollars) ». Parallèlement, les flux vers les actions européennes cotées aux États-Unis ont atteint 2,7 milliards de dollars – le niveau le plus élevé depuis février 2023.
Et cela, malgré le fait qu’il existe relativement peu d’ETP liés aux actions européennes. Ces 15 milliards attiré en un mois vers les actions sont toutefois à relativiser, face au flux qui s’était déversé vers les actions américaines l’an dernier : environ 900 milliards de dollars s’étaient investis via les ETP dans les actions américaines. Ce flux avait été animés en grande partie par l’épargne européenne. Avec un taux d’épargne de plus de 13% de leurs revenus disponibles, les ménages européens représentent au sens large une masse d’épargne de plus de 35.000 milliards d’euros, si l’on tient compte des dépôts bancaires, des assurances-vie, des fonds de placement ….
Les USA sont devenus fondamentalement différents
Toutefois, si ce bateau commence à bouger et quitter les ports américains, cela risque de faire très mal. Car le revirement que l’on observe ces dernières semaines a peu de précédents, car il ne s’agit pas d’une réaction à un choc économique ou financier, mais à un événement purement politique. Stéphane Boujnah, PDG d’Euronext, explique à Bloomberg que pour les Européens, « les États-Unis sont aujourd’hui un pays fondamentalement différent par rapport à il y a un an », en grande partie à cause des politiques et de l’imprévisibilité introduites par l’administration de Donald Trump après son retour au pouvoir. Selon lui, cette transformation s’explique d’abord par « la volatilité massive » des marchés qui résulte des décisions politiques de Donald Trump, notamment à travers des fluctuations quotidiennes sur des sujets comme les droits de douane. Cette instabilité rend les États-Unis moins prévisibles pour les investisseurs. Il souligne aussi que cette incertitude, combinée à des interrogations sur l’inflation et à un écart croissant entre les valorisations boursières aux États-Unis et en Europe, a entraîné une migration de capitaux vers l’Europe. Les valorisations plus attractives des actions européennes attirent désormais les investisseurs, un phénomène amplifié par les politiques américaines.
Enfin, il semble suggérer que cette différence ne se limite pas aux aspects économiques, mais reflète aussi un changement dans l’environnement global des affaires, les entreprises européennes réévaluant leurs projets d’investissement aux États-Unis face à ces nouvelles dynamiques.
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