Alors que le marché de l’emploi américain se refroidit, les marchés espèrent que la Réserve fédérale (Fed) baisse ses taux d’intérêt. Ou quand les mauvaises nouvelles peuvent être de bonnes nouvelles.
Bad news is good news. Les mauvaises nouvelles sont de bonnes nouvelles ; voilà un concept qui revient régulièrement parmi les investisseurs. Il veut que les mauvaises nouvelles pour l’économie, comme une hausse du chômage, un ralentissement de la croissance, etc., soient de bonnes nouvelles pour le marché, car cela pousserait une banque centrale comme la Fed à baisser les taux.
L’inverse existe aussi. De bonnes nouvelles pour l’économie peuvent être de mauvaises nouvelles pour le marché – dans un contexte d’inflation par exemple, comme nous l’avons connu ces dernières années, cela donne l’opportunité à la banque centrale de continuer à augmenter les taux ou à les garder élevés.
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Mauvaises nouvelles… bonnes nouvelles ?
Depuis la fin de la semaine dernière et en ce début de semaine, ce concept fait donc son retour. Vendredi, les chiffres de l’emploi aux États-Unis ont montré un refroidissement du marché du travail. 73.000 emplois ont été créés, ce qui est moins que prévu. Et surtout : les chiffres de mai et de juin ont été très fortement revus à la baisse, de respectivement 144.000 à 19.000 et de 147.000 à 14.000. Le chômage est légèrement en hausse, à 4,2%.
Pour de nombreux observateurs, c’est le signe que le grand ralentissement du marché du travail américain, attendu depuis le début de la hausse des taux d’intérêt, comme moyen pour ralentir l’inflation (le marché du travail était en surchauffe et c’était un des moteurs de l’inflation), est dorénavant là.
Pour les marchés, c’était bien sûr une mauvaise nouvelle. Ils ont clôturé dans le rouge, vendredi, après cette publication de données. La nouvelle salve de droits de douane de Trump a également pesé dans la balance.
Mais depuis, ils essayent de tirer quelques chose de positif de ces mauvaises nouvelles. À savoir : une baisse des taux de la Fed en réaction à la détérioration de la conjoncture. Les attentes pour une baisse des taux ont par exemple rapidement changé. 90% des analystes s’attendent désormais à une baisse en septembre, contre 63% il y a une semaine, montre l’outil de CME qui prend le pouls du marché à ce propos. Une baisse des taux, qui sont toujours très élevés à 4,25-4,50%, pourraient en tout cas être un nouveau carburant pour le rallye des marchés.
Politique
Ces perspectives des “mauvaises nouvelles, bonnes nouvelles” pourraient cependant vite être perturbées par Donald Trump. D’un côté, le président américain a viré la directrice du Bureau des statistiques vendredi, après ce rapport. Il pourra donc placer son candidat à la tête de cet organe… pour lui faire dire ce qu’il veut ? Ne verra-t-on plus que des rapports montrant une économie flamboyante ? Ce scénario peut sonner comme extrême et de la politique-fiction, mais est déjà une réelle crainte de professionnels du chiffre et autres observateurs. L’indépendance des institutions publiques américaines est minée tous les jours par Trump. Quoi qu’il en soit, des chiffres maquillés à la Staline, dans lesquels tout est rose, ne seraient donc pas optimaux pour le marché, car ils n’inciteraient pas la Fed à baisser les taux.
De l’autre côté, à niveau de la Fed justement, Trump peut désormais placer un candidat au Directoire, après la démission surprise d’une gouverneure ce week-end. Ce pion placé par Trump œuvrera de l’intérieur pour faire baisser les taux, car tel est le souhait du président… et la pomme de la discorde entre lui et le président de la Fed, Jerome Powell. Le remplacer lui est aussi dans les projets de Trump. Les taux baisseraient alors de manière beaucoup plus rapide.
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