Trop de cadavres dans le placard de bpost!

© Belga/AFP via Getty Images

Les dommages directs et indirects du nouvel aveu d’irrégularités dans l’octroi des marchés publics sont importants. Nous n’avons d’autre choix que d’abaisser notre conseil.

Après un nouvel avertissement sur résultats et l’aveu de nouvelles irrégularités dans l’octroi des marchés publics dans le chef de bpost, personne ne sait combien de cadavres l’on est encore susceptible de découvrir dans le placard de l’opérateur postal. Et tant que cette épée de Damoclès plane sur l’action, l’on ne peut non plus évaluer la pertinence d’un investissement dans le titre. Nous aussi, nous aurions dû être plus méfiants vu l’absence manifeste de gouvernance d’entreprise, d’une gestion digne de ce nom, d’éthique et de contrôle au sein de la société semi-publique. Si la faible valorisation a pour l’instant absorbé une partie du choc suscité par cet abus de confiance, tant que la culture d’entreprise ayant permis de telles malversations systématiques subsiste, il est difficile d’estimer précisément les risques auxquels s’exposent les investisseurs, et donc de déterminer quelle compensation pourrait être adéquate en termes de valorisation.

Cette mauvaise gestion a déjà laissé des stigmates énormes, et le nouvel aveu concernant les marchés publics pourrait, selon un communiqué de presse publié par l’entreprise, amputer le bénéfice d’exploitation de 25 à 50 millions en 2023, soit 10 à 20% de l’objectif de 240 à 260 millions d’euros précédemment fixé. Et avec l’accumulation de dossiers, l’amende pourrait bien être relevée.

Pour bpost, les dommages indirects sont encore bien plus importants. L’opérateur postal a engagé une transformation nécessaire pour devenir un acteur logistique moderne; cette dernière ne pourra être menée à bien si la direction doit se concentrer sur d’autres dossiers. En outre, l’actionnaire principal, le gouvernement, continue de défendre des intérêts qui hypothèquent l’avenir de l’entreprise, en cherchant à maximiser l’emploi (ce qui pèse sur la rentabilité) et les dividendes (ce qui réduit les possibilités d’investissement). Le conseil d’administration, où le gouvernement est aussi largement représenté, n’a pas non plus réussi à jouer son rôle d’organe de contrôle pour prévenir ou du moins résoudre rapidement les problèmes.

Depuis son introduction en Bourse en 2013, l’action a cédé 70% de sa valeur (si l’on tient compte des dividendes, les investisseurs de la première heure ont perdu 43%).

Ce nouveau coup dur est d’autant plus regrettable que bpost a montré une certaine résilience l’an dernier. Il était parvenu à limiter les dégâts dans un contexte de hausse rapide des coûts salariaux, de concurrence acharnée et de perte de confiance des consommateurs. Sur l’exercice 2022, son chiffre d’affaires (CA) a augmenté de 1,5%, mais le bénéfice d’exploitation a chuté de 20%, à 278,5 millions d’euros. Le CA était attendu stable en 2023, malgré les pressions accrues sur les marges; reste désormais à voir quel sera l’effet des nouvelles révélations. Le dividende de 0,4 euro par action qui sera payé en mai n’est pour l’instant pas remis en question. L’entreprise veut distribuer chaque année 30 à 50% du bénéfice net en dividendes, mais vu les sérieux doutes qui planent sur le modèle de gestion, et donc sur les résultats à venir, le versement du dividende est incertain à partir de 2023.

Conclusion

Après ce nouveau coup de massue pour les actionnaires, valoriser l’entreprise et juger de ses résultats devient un exercice très difficile. Le ratio cours/bénéfice de 5 et le rendement du dividende de près de 9% ne nous semblent pas suffisants au regard des incertitudes. Nous n’avons pour l’instant pas d’autre choix que de revenir sur notre conseil d’achat.

Conseil: conserver/attendre

Risque: élevé

Rating: 2C

Cours: 4,5 euros

Ticker: BPOST BB

Code ISIN: BE0974268972

Marché: Euronext Bruxelles

Capit. boursière: 901 millions EUR

C/B 2022: 6

C/B attendu 2023: 5

Perf. cours sur 12 mois: -23%

Perf. depuis le 01/01: -10%

Rendement du dividende: 9%

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