AB InBev: pas noyé dans l’affaire Bud Light
Les répercussions de la campagne désastreuse se font encore sentir, ce trimestre, en Amérique du Nord, mais les autres parties du continent, surtout, sauvent la mise. La valorisation reste cependant élevée.
Le marketing peut influencer les ventes à la hausse ou à la baisse; AB InBev en a fait l’amère expérience aux Etats-Unis, un marché très lucratif. Mi-avril, il avait en effet lancé, pour promouvoir sa bière Bud Light, un partenariat avec Dylan Mulvaney, une influenceuse militant pour les droits des transgenres – c’était sans compter le boycott d’un pays profondément conservateur. Les ventes ont plongé durablement.
Au 3e trimestre, à périmètre constant, le chiffre d’affaires (CA) a de nouveau connu un recul organique de 12,7% en Amérique du Nord, encore plus marqué que les 10% attendus par les analystes. La baisse organique des volumes y atteint 17,1%. Si l’on tient compte des frais de marketing supplémentaires visant à limiter les répercussions négatives de la campagne, le cash-flow d’exploitation (Ebitda) recule de 26,7% en Amérique du Nord, et la marge d’Ebitda (Ebitda/CA) a reflué, de 37,9% au 3e trimestre de 2022 à 31,9% un an plus tard.
Si le géant brassicole ne peut ignorer ces chiffres alarmants, il n’est pour autant pas noyé dans le tsunami Bud Light. En Amérique centrale, par exemple (Mexique, Colombie, Pérou…), le groupe a le vent en poupe; la région forme désormais même le segment géographique le plus important. Le CA organique y a augmenté de 11,1%, dopé notamment par une croissance organique des volumes de 1,1%. Plus important encore, la croissance organique de l’Ebitda ajusté a atteint 14,5% (11,5% attendus), ce qui a permis à la marge d’Ebitda de progresser encore, de 45,6% à 47,3% (consensus: 44,9%). L’Amérique centrale apporte désormais près de 38% de l’Ebitda ajusté du groupe, contre 22,7% seulement pour l’Amérique du Nord.
L’Amérique du Sud (Brésil, surtout) enregistre de nouveau la plus forte croissance organique du CA (+23,4%), couplée à une forte progression de l’Ebitda (+54,5%); la marge d’Ebitda grimpe à 32,6%. L’Asie (principalement la Chine) manque les attentes, avec une hausse organique des volumes dépassant à peine 0,2%.
La situation globale du groupe n’est donc pas si tragique. La croissance organique des volumes au 3e trimestre a certes été plus faible que prévu (-3,4% contre -2,7%), mais à 15,57 milliards de dollars, le CA du trimestre affiche une progression organique de 5,0% par rapport à la même période de 2022 et dépasse même légèrement le consensus (+4,7%).
Sur le plan de la rentabilité aussi, les nouvelles sont bonnes. La marge d’Ebitda s’est contractée, de 35,2% à 34,9% sur un an, mais le marché craignait un repli à 33,7%. L’Amérique centrale, avec son excellente marge, sauve donc la mise. AB InBev a par conséquent réitéré ses prévisions de croissance de 4% à 8% de l’Ebitda organique ajusté pour l’exercice, malgré le plongeon des ventes aux Etats-Unis – alors même que certains de ses concurrents (Heineken, pour ne citer que lui) ont été contraints de revoir à la baisse leurs perspectives pour 2023.
Conclusion
Les investisseurs ont réagi positivement à l’annonce des résultats: l’action a gagné 5%. Elle a déjà rattrapé près de la moitié de la perte enregistrée depuis le début du scandale Bud Light. Nous conseillons toujours de la conserver: au-delà de la perte de volumes (temporaire?) aux Etats-Unis, la valorisation, à 20 fois les bénéfices et à 10 fois le ratio valeur de l’actif économique (EV)/Ebitda attendus pour 2023, est trop élevée pour que nous recommandions d’acheter. Nous nous félicitons aussi d’avoir retiré (provisoirement) le titre du portefeuille modèle.
Conseil: conserver/attendre
Risque: faible
Rating: 2A
Cours: 55,03 euros
Ticker: ABI BB
Code ISIN: BE0974293251
Marché: Euronext Bruxelles
Capit. boursière: 107,02 milliards EUR
C/B 2022: 21
C/B attendu 2023: 20
Perf. cours sur 12 mois: +6%
Perf. cours depuis le 01/01: -2%
Rendement du dividende: 1,4%
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