À partir de quel patrimoine le private equity devient-il intéressant pour le particulier ?

Geert Vastiau et Lode Langedock. "À long terme, le ‘private equity’ se résume toujours à une histoire de croissance." © Kurt BV
Patrick Claerhout Patrick Claerhout is redacteur bij Trends.

Depuis sa création en 2000, le gestionnaire de patrimoine Quaestor s’est spécialisé dans le “private equity”. Alors qu’un public plus large peut désormais investir dans ce secteur, l’entreprise ne travaille pas avec n’importe qui. Les cofondateurs et associés Geert Vastiau et Lode Langedock pensent que cela ne fonctionne que pour les patrimoines à partir de 2,5 millions d’euros.

La démocratisation du private equity est une tendance impossible à ignorer. On en a pris conscience aussi chez le gestionnaire de patrimoine Quaestor qui voit de plus en plus de clients venir frapper à sa porte en raison de son expertise et sa spécialisation dans ce domaine. À tel point que l’entreprise envisage d’ouvrir un deuxième établissement, en plus de son siège principal à Roulers. L’entreprise compte sept associés, 35 collaborateurs et une clientèle composée d’environ 800 familles flamandes fortunées. Quaestor gère 2,3 milliards d’euros d’actifs, dont la moitié est investie en private equity. À cela s’ajoutent encore un milliard d’euros d’engagements de clients pour des investissements en private equity.

TRENDS-TENDANCES. Comment travaillez-vous concrètement ?

GEERT VASTIAU. Tout commence par le screening et la sélection de bons fonds de private equity. Nous sommes actifs depuis des années dans ce domaine et avons de bons contacts avec des maisons comme Apheon, Waterland, Hummingbird, Sofindev, Main Capital, Down to Earth… Pour investir dans leurs fonds, nous créons nos propres fonds nourriciers (feeder funds). Chaque année, nous offrons à nos clients la possibilité de souscrire pour cinq à sept de ces fonds. En regroupant ces moyens, nous pouvons nous présenter comme un investisseur institutionnel auprès des maisons de private equity. Cela nous permet d’obtenir un ticket important qui reste hors de portée des investisseurs individuels. Nous prenons également toute l’administration à notre charge afin que les fonds n’aient qu’une seule contrepartie.

Il existe beaucoup de malentendus autour du “private equity”. Est-ce vraiment une classe d’actifs supérieure ?

LODE LANGEDOCK. Dans une perspective historique, le rendement est incontestablement plus élevé que celui des entreprises cotées. Nous pensons qu’il en sera de même à l’avenir, mais qu’il est surtout important de choisir les bons gestionnaires et les bons fonds. Par le passé, le rendement était quasiment assuré grâce au vent arrière des taux d’intérêt dans le buy-out et le venture capital. Mais ces dernières années ont été difficiles. Nous constatons des écarts de plus en plus importants dans les rendements entre les gestionnaires. La différence entre un bon et un mauvais gestionnaire est bien plus grande dans le private equity que dans la gestion d’actions classique.

“La différence entre un bon et un mauvais gestionnaire est bien plus grande dans le “private equity” que dans la gestion d’actions classique.” – Lode Langedock

À quoi un investisseur intéressé doit-il faire attention ?

L.L. Avant tout au fait que son argent est immobilisé longtemps. Les trois à quatre premières années, un investissement rapportera à peine. La constitution de l’allocation se fait progressivement, tout comme la réduction lors de la vente des participations. Il s’agit d’investissements à moyen et long terme dans des entreprises. Il faut donc avoir cet horizon en tête. Sinon, mieux vaut ne pas s’y lancer. En réalisant de nouveaux engagements avec l’argent gagné auparavant sur ses investissements initiaux dans d’anciens fonds, on peut créer au fil des années un effet cumulatif. C’est le moment où certains clients augmentent la part de private equity de leur portefeuille.

Cela implique que le “private equity” n’est pas fait pour tout le monde ?

G.V. Exact, et c’est quelque chose qui nous préoccupe. Chez certains acteurs, on peut déjà investir en private equity à partir de 100.000 euros, voire moins. Ce type d’investisseur n’est pas toujours suffisamment informé sur l’illiquidité et les risques. Or, la dernière chose que nous voulons, c’est que le private equity acquière une mauvaise réputation. C’est pourquoi nous maintenons un seuil de 2,5 millions d’euros pour ceux qui souhaitent devenir clients chez Quaestor, afin qu’une diversification minimale soit possible. Nous préférons qu’un client soit investi dans 10 fonds nourriciers plutôt que dans un seul. Être dans un seul fonds ne peut en réalité pas être l’objectif. Nous sommes convaincus que le private equity fonctionne mieux pour les grands patrimoines.

Les banques et les grandes banques se sont également lancées dans cette branche. Représentent-elles une menace pour Quaestor ?

G.V. Nous sommes présents depuis 20 ans. Les banques se sont mises en action récemment, et encore, à la demande de leurs clients. Le private equity n’est pas dans leur ADN. Souvent, les banques ou les gestionnaires de patrimoine créent un fonds qui investit dans une série d’autres fonds de private equity. Nous considérons cela plutôt comme une “boîte noire”. L’investisseur ne sait pas exactement où va son argent et est très éloigné des investissements réels. Nous ne proposons jamais à nos clients un fonds dans lequel les partenaires de Quaestor n’investissent pas.

“Les banques n’ont pas le “private equity” dans leur ADN. Ce n’est qu’à la demande de leurs clients qu’elles s’y sont mises.” – Geert Vastiau

Comment créez-vous cette transparence ?

L.L. Tout d’abord, nous classons les investissements en trois types. Les fonds de buy-out absorbent la majorité des investissements. Dans le venture capital, l’investisseur sait qu’il a affaire à des entreprises en démarrage, et le growth capital est destiné aux entreprises qui peuvent passer à la rentabilité et à la croissance. Dans chaque segment, nous proposons chaque année un ou plusieurs fonds à nos clients. Le client peut choisir dans quoi investir et à quel moment. Nos portefeuilles sont faits sur mesure et nous participons activement aux investissements de ces fonds, par exemple en siégeant au conseil de surveillance du fonds. Nous faisons venir les gestionnaires de fonds en Belgique pour expliquer leur vision et leur stratégie à nos clients.

Avec les taux et la baisse des valorisations, la machine du “private equity” a ralenti ces dernières années. Comment voyez-vous l’avenir ?

L.L. Nous constatons une amélioration, des transactions de nouveau en hausse. Nous nous dirigeons vers un nouvel équilibre entre les attentes des vendeurs et les moyens que les acheteurs souhaitent déployer. Le private equity a déjà prouvé toute sa résilience, et on croit que ce sera à nouveau le cas maintenant. À long terme, le private equity se résume toujours à une histoire de croissance.

Comment comptez-vous en tirer parti ?

Ces dernières années, nous nous sommes davantage positionnés comme co-investisseurs aux côtés des fonds et avons créé un véhicule spécifique pour cela. Nous avons, par exemple, investi directement dans le capital de Deliveroo et Showpad. Nous avertissons les clients qui participent que le risque est plus élevé, car ils investissent dans une entreprise spécifique. L’avantage du co-investissement est que les coûts sont plus faibles, ce qui peut offrir un rendement potentiellement plus élevé. L’étape suivante est que nous souhaitons créer chaque année un fonds dédié aux co-investissements. Nous l’avons fait pour la première fois cette année. C’est un fonds de 75 millions d’euros, avec lequel nous pouvons réaliser différentes co-investissements directement dans le capital d’entreprises. Pour 2026, nous visons un fonds de 125 millions d’euros.

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