Satya Nadella, le PDG de Microsoft avertit que même les géants technologiques peuvent s’effondrer. À l’heure de l’IA, il exhorte ses équipes à bâtir l’avenir plutôt qu’à protéger le passé.
« Notre secteur regorge d’études de cas d’entreprises autrefois brillantes, qui ont tout simplement disparu, a déclaré Satya Nadella lors d’une réunion avec ses employés, rapporte The Verge. Un message pour le moins troublant qui reflète les craintes du grand patron de l’une des entreprises technologiques les plus puissantes au monde. Un statut qui ne semble pas l’empêcher de regarder la vérité en face : tout peut s’écrouler du jour au lendemain.
« Certaines des plus grandes entreprises que nous avons bâties pourraient ne plus être aussi pertinentes à l’avenir », a ajouté Nadella, en réponse à une question sur le changement de culture perçu au sein de Microsoft. Des propos qui laissent transparaitre son malaise quant à l’avenir de sa firme à l’ère de l’IA.
Changement d’ambiance
L’exemple de DEC – Digital Equipment Corporation – est particulièrement frappant, tant il illustre ce qui hante Satya Nadella. Cette entreprise informatique a dominé le monde des mini-ordinateurs dans les années 70, avant de disparaitre face à une forte concurrence, dont IBM, et de mauvais choix stratégiques.
« J’y pense, et je me demande ce qu’il faut pour qu’une entreprise ne se contente pas de prospérer temporairement, mais continue de recruter les meilleurs talents, qui ne travailleront que s’ils ont la possibilité de bénéficier à la fois d’une forte rémunération et d’excellentes perspectives d’emploi », a continué le PDG.
Un récit édifiant, tenu après qu’un employé l’a informé de son ressenti quant à l’entreprise « nettement différente, plus froide, plus rigide et dépourvue de l’empathie que nous avons appris à apprécier ».
Et il ne semble pas être le seul à partager ce sentiment. Plusieurs employés de Microsoft ont fait état à The Verge d’une baisse de moral au coeur de l’entreprise. Or, les craintes de Nadella et de la direction en général se répercuteront forcément sur les employés, à travers des licenciements et des changements constants. Jusqu’à potentiellement aboutir à une culture de la peur au sein de Microsoft.
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Capable de faire mieux
Malgré ses réflexions alarmistes, Satya Nadella a assuré que l’équipe de direction « peut faire mieux et nous le ferons ». « Nous célébrons notre 51e anniversaire et, si l’on en croit certains indicateurs, nous prospérons », a-t-il souligné, avant de reprendre un ton plus sombre : « Mais en même temps, compte tenu des difficultés qui nous attendent pour évoluer dans un secteur industriel, technologique et économique en pleine mutation, nous avons un travail acharné devant nous ».
« Nous pouvons préserver nos valeurs et veiller à les respecter, tout en reconnaissant une vérité simple sur les marchés financiers : aucune entreprise n’a le droit d’exister éternellement », a déclaré Nadella lors de son intervention à l’assemblée générale la semaine dernière. « On gagne ce droit chaque jour en agissant sur un marché socialement utile et valorisé. C’est là que réside la difficulté. »
Prendre les devants dans l’IA
Microsoft le sait, elle a raté le coche des téléphones mobiles – « ma plus grosse erreur », a confié un jour Bill Gates –, mais elle ne peut se permettre de faire pareil avec l’intelligence artificielle. L’entreprise doit prendre la tête de cette ère de l’IA si elle ne veut pas être mise hors-jeu.
Le fait est que Microsoft, qui tire environ un cinquième de son chiffre d’affaires annuel de sa suite Microsoft 365 Copilot, a des raisons d’avoir peur. Plusieurs IA sont aujourd’hui capables de générer des tableurs, des présentations et des documents sans passer par Excel, PowerPoint ou Word, mettant en péril l’existence même de ces logiciels. Un danger dont est bien conscient le PDG.
« Toutes les catégories que nous avons peut-être aimées pendant quarante ans pourraient ne plus avoir d’importance, » a déclaré Satya Nadella. « En tant qu’entreprise, en tant que dirigeants, nous devons comprendre que notre valeur future ne dépendra que de notre capacité à bâtir ce qui est appelé à durer, plutôt que de nous accrocher à ce que nous avons construit dans le passé. »
Plus qu’une annonce de changement de stratégie, le PDG a envoyé un avertissement à ses employés : un basculement est en cours et des bouleversements internes vont suivre.