Deux applis, un même service : MyGov.be va-t-il tuer itsme ?

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Caroline Lallemand

Lancée en 2017 par un consortium privé, l’application très populaire itsme s’est rapidement imposée comme l’outil majeur d’authentification en Belgique. Aujourd’hui, l’État déploie MyGov.be. Avec quel impact pour itsme?

L’application MyGov.be est désormais disponible comme clé numérique pour les services publics en ligne, annonce ce 4 novembre BOSA sur son site. MyGov.be peut déjà être utilisé pour se connecter aux sites gouvernementaux (Tax-on-Web, My Pension, etc.) depuis octobre. Une annonce discrète par le SPF Stratégie et Appui pour cet outil qui n’est pas censé remplacer itsme mais lui offrir une alternative. MyGov offre des possibilités similaires, comme consulter les messages dans son eBox, demander des documents officiels (extraits d’actes de naissance et de mariage, la carte ISI+, des certificats de vaccination,…), accéder à des procédures administratives via un guichet en ligne,…

« Une fonction souveraine »

C’est Mathieu Michel, alors Secrétaire d’État à la Digitalisation dans le gouvernement Vivaldi, qui a posé les jalons de MyGov.be sur cette conviction : « Le plus haut niveau d’identification doit être garanti par l’État. C’est une fonction souveraine. » Pour lui, s’appuyer exclusivement sur un service privé expose à un risque, expliquait-t-il dans nos colonnes. Sur son site, l’ex-Secrétaire d’Etat maintenant député fédéral se félicite de cette concrétisation. « L’État belge dispose aujourd’hui de sa propre capacité d’identification numérique, indépendante et interopérable », peut-on lire. « C’est un signal fort, à un moment où l’Europe avance vers l’identité numérique commune. »

L’outil répond à une obligation européenne. Le règlement eIDAS 2.0 impose en effet aux États membres de l’EU de proposer au moins un portefeuille d’identité numérique officiel (appelé « EUDI Wallet ») à leurs citoyens.  

Deux logiques qui se croisent

MyGov.be été mis sur pied non pas pour évincer itsme, mais pour compléter l’écosystème, comme méthode d’authentification alternative régalienne (au même titre que la carte eID, l’eID sur mobile, etc.). Les deux outils pourraient paraître redondants mais ils ont, dans la pratique, des logiques différentes.

Lancée en 2017 par le consortium belge Belgian Mobile ID (banques + opérateurs télécoms) en partenariat avec l’Etat, itsme est déjà bien ancré dans les habitudes avec pas moins de 7 millions d’utilisateurs. Le citoyen dispose d’un outil déjà mature, éprouvé et largement reconnu : identification, signature, accès aux services. Son avantage est clair : l’adoption est déjà faite, l’intégration est en place.

Avec MyGov.be, la logique est différente : elle vise l’avenir, celle d’une infrastructure publique capable de centraliser les services, de délivrer une identité numérique « souveraine », en quelque sorte un filet de sécurité pour l’État en cas de dépendance unique.

Vers une cohabitation

Dans la pratique, pour le citoyen, les deux applications peuvent coexister. Mais ce modèle hybride n’est pas sans défis. Encore en phase de déploiement, MyGov.be montre des limites et n’est pas encore aussi intuitive ni intégrée aux services privés qu’itsme. Il faut que l’outil soit désormais adopté par le plus grand nombre de citoyens et ne reste pas une option marginale. Il faudra aussi clarifier ses usages pour que l’utilisateur ne soit pas désorienté entre les deux options.

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