Budget, audience ou ton trop libre ? La RTBF coupe le micro à Léonet et Dayez

RTBF
Caroline Lallemand

Clap de fin pour « la semaine des 5 heures », l’émission culte de la RTBF animée par Rudy Léonet et Hugues Dayez depuis 30 ans. L’émission ne sera pas reconduite à la rentrée. Officiellement pour des raisons d’audience et de restrictions budgétaires. Officieusement, c’est la liberté de ton du duo qui aurait fini par déranger.

La RTBF a annoncé que son émission culte « la semaine des 5 heures » animée depuis 30 ans par le duo Rudy Léonet et Hugues Dayez ne serait pas reconduite à la rentrée de septembre. L’annonce étonne alors que la formule cartonne et compte de nombreux fans.

La RTBF met en avant des questions d’audience pour justifier sa suppression. “Les habitudes de consommation radio ont beaucoup évolué ces dernières années”, explique Axelle Pollet, porte-parole de la RTBF citée par L’Avenir. “On a constaté une érosion du nombre d’auditeurs en soirée, disons à partir de 19 heures”. Le créneau justement occupé par “La semaine des 5 heures”, affiche pourtant 9,6 % de parts de marché, soit autant, ou pas loin, que Matin Première, et davantage que toutes les autres émissions diffusées en journée, observe le média francophone. “Sauf que ça ne représente pas le même volume d’auditeurs”, argumente Axelle Pollet, qui estime que celles et ceux qui écoutaient la radio en soirée préfèrent désormais écouter la radio “autrement, en podcast par exemple”.

Des explications qui ne semblent pas convaincre car « La semaine des 5 heures » existe aussi en podcast et est même le deuxième le plus téléchargé de la RTBF avec 1,2 million de téléchargements.

Restrictions budgétaires

La RTBF invoque également des restrictions budgétaires imposées par des décisions politiques, avec un objectif d’économies de 12 %. L’émission, animée par Rudy Léonet, ex-employé à la retraite depuis un an, et Hugues Dayez, serait jugée trop coûteuse. Mais, derrière les justifications budgétaires, se cacheraient en réalité des raisons moins avouées. Ce serait avant tout l’esprit critique et la grande liberté de ton de ses deux animateurs souvent en roue libre qui dérangerait certaines sensibilités internes. Des critiques assumées, comme celles sur les films des frères Dardenne ou le film Natacha, auraient créé des tensions avec d’autres programmes plus promotionnels.

La décision est fortement critiquée par Rudy Léonet. Dans un long message publié sur son compte Facebook, il explique que la suppression de l’émission est « actée depuis longtemps en coulisses, malgré d’excellentes audiences en radio et en podcast ». Les motifs budgétaires ne seraient donc pour lui pas la cause principale de l’arrêt de l’émission. L’animateur précise que lui-même avait proposé une baisse volontaire de 12 % de sa rémunération. « Un geste resté sans réponse », regrette-t-il.

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Une liberté de ton qui dérange

Rudy Léonet évoque d’autres raisons à cette suppression. « L’émission et ses animateurs seraient devenus trop encombrants : jugés trop vieux, trop mâles cisgenres, trop ’blancs’, trop hétéronormatifs…  Dayez et Léonet ne seraient pas assez alignés sur la grille de La Première « dans une RTBF de plus en plus critiquée pour son dogmatisme ».

“Ce qui dérange la RTBF d’aujourd’hui c’est ce qui a fait le succès des 5 Heures depuis 30 ans: un ton, un regard critique, indépendant et impartial sur l’actualité culturelle. C’est en particulier leurs critiques sans complaisance des œuvres coproduites par la RTBF, leur enthousiasme pour les séries Netflix, HBO ou Amazon au détriment de certaines séries belges proposées sur Auvio, leur soutien à des artistes belges non issus de circuits validés comme The Voice – et même souvent des artistes flamands – qui ont fini par se heurter à une ligne éditoriale devenue de plus en plus rigide et ne relevant que de la seule et unique vision de l’entreprise”, poursuit le texte partagé par Rudy Léonet (à lire en intégralité ci-dessous).

De son côté, le service public insiste sur le fait que la Première continuera de mettre en avant le cinéma et la musique. Toujours salarié, Hugues Dayez n’est pas mis à l’écart, mais ses interventions seront plus ponctuelles, principalement dans les JT ou en cas d’événements cinéma majeurs. La RTBF explique qu’il restera “Monsieur Cinéma”, sans pour autant détailler quel projet concret l’attend à la rentrée.

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