AirGen, l’ambition de trois jeunes prodiges belges de l’IA

Maxime Schifflers, CyrilThielemans et Guillaume Schupp,
le trio à la tête d’AirGen, ne s’est pas rendu à San Fransisco que pour poser devant le Goden Gate Bridge.
Christophe Charlot
Christophe Charlot Journaliste

Après avoir fondé une agence spécialisée en IA qui avait réalisé le chatbot officiel du MR, trois jeunes entrepreneurs liégeois lancent AirGen, une boîte américaine en vue de booster, grâce à l’IA, l’efficacité des commerciaux. Et affichent l’ambition de devenir, à terme, une nouvelle licorne.

Passer un mois en Californie quand on a la vingtaine, cela sonne comme un petit air de vacances. Pourtant, ce trio-là n’est pas allé se dorer la pilule sur les plages bordant le Pacifique. Maxime Schifflers, Cyril Thielemans et Guillaume Schupp ont choisi de poser leurs valises plus au nord, à San Francisco. Pas pour visiter Alcatraz ou traverser le Golden Gate, mais pour rencontrer des investisseurs, des startupers et des entrepreneurs. Et accessoirement pour créer leur start-up, AirGen, dans le Delaware, un Etat qui se trouve de l’autre côté du pays, sur la côte est. Car malgré leur jeune âge, nos trois compères parlent plus business que jeux vidéo.

Leur discours d’initié et leur ambition hors norme démontrent une certaine maturité entrepreneuriale. Il y a un peu plus d’un an, ils ont fondé Meridiem, une agence spécialisée dans le développement de solutions d’intelligence artificielle sur mesure pour les entreprises. Sujet “à la mode” certes, mais leur approche leur a rapidement permis de convaincre des organisations de renom. Parmi elles, le MR, pour lequel ils ont développé Victor, un chatbot officiel qui permettait, en période pré-électorale, de répondre aux questions des électeurs sur le programme du parti politique. Ce succès a offert au trio une certaine crédibilité dans l’écosystème tech belge.

Développement d’AirGen

Mais s’ils sont partis à San Francisco à l’automne 2024, ce n’était pas pour Meridiem mais pour un autre projet : le développement d’AirGen. Le trio de jeunes entrepreneurs a, en effet, eu une nouvelle idée, partant d’un constat simple mais interpellant : les commerciaux passeraient environ 40% de leur temps à des tâches administratives comme la gestion des e-mails, des rendez-vous ou des données clients. Maxime, Cyril et Guillaume ont alors imaginé une solution basée sur l’IA pour prendre en charge ces tâches chronophages.

Connecté à des outils comme les CRM, les calendriers et les boîtes mail, AirGen peut organiser des rendez-vous, rédiger des e-mails ou mettre à jour des bases de données, libérant ainsi les commerciaux pour qu’ils se concentrent sur leur véritable mission : vendre. “Notre objectif avec AirGen est de permettre aux entreprises de maximiser le potentiel de leurs équipes commerciales, explique Cyril Thielemans. L’assistant IA se charge des tâches répétitives, ce qui améliore à la fois leur productivité et leur chiffre d’affaires.”

De Meridiem à AirGen : le pivot

Bien que Meridiem ait été une aventure plutôt positive, les trois jeunes entrepreneurs rêvaient de plus qu’une “simple agence” de services qu’ils voyaient comme limitée à de la consultance. Ils voulaient créer et vendre un produit scalable, capable de répondre à un problème universel et de s’imposer sur le marché global. Quand leur est venue l’idée d’AirGen, ils ont pris la décision de réaliser un pivot et de mettre leur agence en pause, malgré une belle première année et, selon eux, un chiffre d’affaires d’environ 100.000 euros.

“Nous avons toujours eu cette ambition de créer un produit qui ait un impact mondial, précise Maxime Schifflers. Passer d’une agence à un modèle produit, c’est un défi, mais aussi une opportunité énorme.”

Pour réaliser ce pivot, ils ont choisi de créer une société AirGen Inc. aux États-Unis : un moyen d’accéder aux investisseurs internationaux et de simplifier leur expansion sur le marché américain.

San Francisco : un apprentissage boostant

À San Francisco, les trois jeunes avaient bien l’intention de faire le plus de rencontres possibles et d’emmagasiner les bons conseils et les apprentissages dans la Silicon Valley. À raison de plusieurs événements chaque jour, le trio, notamment aidé par l’Awex, a rencontré des investisseurs, des entrepreneurs chevronnés et des experts en intelligence artificielle. Parfois avec un certain culot : “On demandait des rendez-vous via LinkedIn et on avait rapidement une réponse. Ce qui est incroyable, c’est que là-bas tout le monde est prêt à rencontrer de nouveaux entrepreneurs, à aider et donner du feedback. C’était parfois blessant mais toujours dans l’idée de nous faire progresser. On a adoré!”

Ces échanges leur ont permis de mieux appréhender le marché du numérique, les attentes des investisseurs et les subtilités des levées de fonds, de perfectionner leur produit, d’affiner leur stratégie commerciale… “Ce voyage nous a permis de remettre en question certaines de nos idées et de mieux comprendre les attentes des investisseurs, raconte Guillaume Schupp. Là-bas, ils misent avant tout sur les équipes plutôt que sur les idées. Ce qui compte, c’est notre capacité à exécuter notre vision.”

Ils ont également découvert une culture entrepreneuriale très différente de celle qu’ils connaissaient en Europe. “Un investisseur nous a surpris en nous disant que le premier redflag qu’il voyait était… qu’on n’a pas encore connu l’échec, glisse Cyril Thielemans. Aux États-Unis, l’échec est perçu comme une étape nécessaire pour réussir.”

Le trio a compris qu’aller vite pouvait être un atout sur un marché en plein boum et particulièrement concurrentiel.

Une première version prometteuse

Remontés à bloc, Maxime Schifflers, Cyril Thielemans et Guillaume Schupp sont revenus en Belgique avec la ferme intention de faire de leur produit un succès. La première version d’AirGen est prête et a été essayée par une série de bêta testeurs. Elle permet déjà de faire réaliser à l’IA certaines tâches dans l’environnement Microsoft, de manière étonnante. Sur base d’un prompt, il est par exemple possible de faire envoyer un e-mail à un contact pour proposer un rendez-vous sur la base des infos dont l’IA dispose: disponibilités dans le calendrier, e-mail du contact, historique des échanges pour savoir comment s’adresser à lui, etc. Via des API (application programming interface), AirGen sera en mesure de se connecter à pas mal d’outils: Outlook, Salesforce, HubSpot, Calendrier, OneDrive, internet… AirGen enverra un e-mail, bloquera un créneau dans l’agenda, etc. Et plus les utilisateurs discuteront avec AirGen, plus l’outil les connaîtra et les secondera.

Les trois fondateurs préparent une première levée de fonds à 250.000 euros dans le but de réaliser leurs premiers engagements : trois développeurs pour accélérer la mise en place du produit. C’est en Belgique que sera réalisé le développement et que démarreront les premières ventes aux entreprises, sous la forme de licences dont, à l’heure qu’il est, certains “détails” (dont le pricing) doivent encore être déterminés.

La prochaine étape…

Et ensuite ? Lever deux millions d’euros supplémentaires très rapidement pour continuer le développement et s’attaquer au marché américain. Il semble que les trois jeunes entrepreneurs ont compris qu’aller vite pouvait être un atout sur un marché en plein boum et particulièrement concurrentiel.

“Nous voulons bouleverser la manière dont les entreprises travaillent, en devenant le hub central pour gérer toutes leurs tâches administratives, tout en maintenant la flexibilité des outils qu’elles préfèrent”, conclut Cyril Thielemans. Le chemin est encore long, mais les jeunes patrons d’AirGen voient grand. Et ils n’hésitent pas à afficher leur détermination : “Nous comptons être l’une des prochaines licornes belges”. Ni plus ni moins…

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