Logements sociaux: les communes à l’amende

Le gouvernement flamand, dont sa ministre du Logement Melissa Depraetere, a alloué 6 milliards d’euros à la construction de 56.000 logements sociaux, d’ici 2042. © Getty Images

Pour résorber son énorme retard en matière de logements sociaux, la Flandre veut sanctionner les communes qui n’atteindraient pas leur objectif. Mais n’est-ce pas se tromper de cible ?

C’est la rentrée et d’emblée, le gouvernement flamand frappe fort avec 6 milliards d’euros alloués à la construction de 56.000 logements sociaux, d’ici 2042. Le montant est impressionnant, mais risque de ne pas suffire alors que 200.000 ménages patientent sur diverses listes d’attente et que ce nombre dépasse d’environ 20.000 unités l’ensemble des logements sociaux actuellement construits.

Un précédent “Objectif social contraignant” (Bindend Sociaal Objectief – BSO en néerlandais, ndlr) couvrant la période 2008-2025 prévoyait pourtant la construction de 50.000 logements sociaux et avait même fixé un objectif à atteindre pour chaque commune sur base de la situation locale au 31 décembre 2007. Seuls 35.000 ont finalement été construits. La faute aux communes ? C’est en tout cas ce que semble croire Melissa Depraetere, nouvelle ministre en charge du Logement.

BSO 2025-2042

Le gouvernement flamand vient en effet d’adopter un nouveau BSO. Couvrant la période 2025-2042, il déterminera pour chaque commune un nouvel objectif à atteindre et prévoit, contrairement au précédent, une sanction financière pour celles qui refuseront d’assumer leur part. Les candidats locataires, de leur côté, devront obligatoirement s’inscrire auprès de l’Office flamand de l’emploi et de la formation (VDAB) et atteindre, en matière linguistique, le niveau B1 contre A2 précédemment.

Pour les communes, les objectifs seront déterminés au départ de la situation au 31 décembre de cette année de sorte que les premières sanctions ne tomberont qu’en 2028 et correspondront à la prime de location (huurpremie) actuellement octroyée – sous conditions – aux ménages inscrits sur un liste d’attente depuis plus de quatre ans. Fin 2024, cette prime s’élevait en moyenne à 203 euros par mois, majorée de 34 euros par enfant à charge. En 2024, quelque 23.000 ménages en ont bénéficié. À multiplier par le nombre de logements sociaux manquants, cela peut chiffrer !

L’argent ne manque pas

Mais n’est-ce pas faire peu de cas de l’autonomie communale et en même temps, se tromper de cible ? Ce sont en effet les sociétés de logements sociaux qui construisent, pas les communes. Et selon une enquête menée en 2023 par Steunpunt Wonen, à la demande du ministre Matthias Diependaele, il leur faut en moyenne 10 ans pour mener à bien un projet.

Certes, dans une commune sur trois, la construction de logements sociaux suscite davantage d’opposition qu’un projet de construction classique, mais ces manœuvres de retardement – qui peuvent quelquefois s’éterniser – n’expliquent pas tout. Administrativement, en effet, tout s’est complexifié et les intervenants à mettre d’accord sont chaque jour plus nombreux.

Coordonner ne serait-il pas plus utile que sanctionner ? D’autant qu’en réalité, l’argent ne manque pas. Dans un récent arrêt (92/2023), la Cour constitutionnelle ne relevait-elle pas, pour les années 2020-2021, une sous-utilisation des crédits alloués au BSO de 2 milliards d’euros ?

Guillaume Capron

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